La chanson par auteur
Un nouveau « cantautore », Beppe Giampà
La chanson est souvent, avec la poésie, une cendrillon de la culture dominante, et elle attend souvent ce prince charmant que sont ses lecteurs et auditeurs. C’est particulièrement le cas de la chanson italienne en France, où personne n’a jamais, à notre connaissance, parlé de Beppe Giampà.
Je l’ai découvert moi-même il y a peu de temps, et j’ai aimé ce qu’il fait.
Beppe Giampà est né à Asti en février 1976, il devient auteur-compositeur-interprète (cantautore) et écrit son premier album en 2009, E il sentimento brucia, en collaboration avec le compositeur Giovanni Lodigiani, suivi en 2012 par la mise en musique de textes de Cesare Pavese, I mattini passano chiari, tirés de son livre Verrà la morte e avrà i tuoi occhi, qu’il chantera non seulement en Italie, mais en Allemagne, en Belgique et en Autriche.
Il participera ensuite à un spectacle consacré aux principales œuvres littéraires de la Résistance au fascisme, ce qui lui vaudra le prix Ponti della Memoria, donné par le MEI (Meeting delle Etichette Indipendenti, créé en 1997 par les producteurs discographiques indépendants) et par la commune de Milan.
En 2015, il publie Le stagioni in città, ballades inspirées par les histoires de Marcovaldo d’Italo Calvino, et en 2016 paraît son grand album Della fatal quiete, où il met en musique et chante des poésies de Ugo Foscolo, Giacomo Leopardi, Giosuè Carducci, Giovanni Pascoli et Dino Campana, qui lui vaudra une lettre de félicitations du Président de la République, Sergio Mattarella.
Après son disque de 2016, Canzone per Fausto e Iaio, Beppe Giampà publie La storia delle storie, il mito Granata che attraversa il ‘900, histoire du club de football Torino Calcio des origines (1906) à 1992, un disque original sur ce sport national.
Son disque le plus récent s’intitule La porta del mondo, où il chante à nouveau des poésies de Cesare Pavese (dont malheureusement le livret ne comporte pas les textes).
Après l’expérience de Stefano Palladini et Nazario Gargano de mettre en musique de grands poètes italiens et anglais, de G.G. Belli à Cavalcanti, Lorenzo de’ Medici, Parini, Leopardi, Saba et Ungaretti, à partir de 1975, voilà une nouvelle création qui mêle poésie et musique, faisant revivre de grands textes, en les rendant plus audibles et appréciables : la poésie n’est pas faite pour être lue en silence, mais pour être écoutée lue à haute voix et encore mieux chantée.
Écoutez Beppe Giampà. Vous pouvez commander ses disques (d’un prix moyen d’environ dix euros) à Gianluca Guzzetta, Senza Base Records snc, Via Roma n° 69 - 14053 Canelli (AT), Mobile 338 4881201. E-mail : commerciale@bitrecords.it
Et vous en trouverez quelques extraits dans notre ouvrage sur ce site, Poésie en musique, anthologie poético-musicale de la poésie italienne en cours de publication.
Giacomo Leopardi (1798-1837), L’infinito (1819)
(Enr. : Beppe Giampà, Infinito, Della fatal quiete, 2016)
Sempre caro mi fu quest’ermo colle,
e questa siepe che da tanta parte
dell’ultimo orizzonte il guardo esclude.
Ma sedendo e mirando, interminabili
spazi di là da quella, e sovrumani
silenzi, e profondissima quiete
io nel pensier mi fingo ; ove per poco
il cor non si spaura. E come il vento
odo stormir tra queste piante, io quello
infinito silenzio a questa voce
vo comparando : e mi sovvien l’eterno,
e le morte stagioni, e la presente
e viva, e il suon di lei. Così tra questa
immensità s’annega il pensier mio :
e il naufragar m’è dolce in questo mare.
Traduction française
J’ai toujours aimé cette colline solitaire
et cette haie qui de tant de côtés
dérobe au regard le fond de l’horizon.
Mais assis dans ma contemplation, d’interminables
espaces au-delà de celle-ci, et de surhumains
silences, et un calme très profond
j’imagine dans ma pensée ; et il s’en faut de peu
que mon cœur ne s’effraie. Et quand j’entends
le vent bruire entre ces plantes, moi je compare
ce silence infini à cette voix :
et je me souviens de l’éternité,
et des mortes saisons, et celle qui vit aujourd’hui
et de sa musique. Ainsi dans cette
immensité se noie ma pensée
et il m’est doux de faire naufrage dans cette mer.