Histoire des régions

Promenades dans le Val d’Aoste


Promenades dans le Val d’Aoste

1 – Du Mont Blanc à Aoste dans la Vallée de la Doire Baltée

2 – Aoste

3 – D’Aoste à Pont-Saint-Martin : la vallée de la Doire Baltée

4 – Les vallées latérales

A – Sur la rive gauche de la Doire Baltée

B – Sur la rive droite de la Doire Baltée

De la France, on arrive dans la Vallée d’Aoste par le tunnel du Mont Blanc, à partir de Chamonix ou par le col du Petit-Saint-Bernard, à partir de Bourg Saint-Maurice.

1 – Du Mont Blanc à Aoste, dans la vallée de la Doire Baltée.

On débouche bientôt du tunnel sur Entrèves (= Entre les Eaux, parce qu’entre deux affluents de la Dora Baltea, la Dora di Veny et la Dora di Ferret). On y trouve une Maison Forte de 1391, restaurée en 1913, et appartenant maintenant aux Passerin d’Entrèves. De là, on peut traverser le Mont Blanc jusqu’à Chamonix, de juin à septembre si la neige le permet, par le téléphérique du Mont Blanc. Il part de La Pallud, arrive d’abord au Pavillon du Mont Fréty où on peut visiter le Jardin Botanique dédié à De Saussure (2178 m.) ; puis il monte à l’Aiguille du Midi et rejoint Chamonix. D’Entrèves on descend à Courmayeur, dans la conque au pied du Mont Blanc, un des plus grands centres d’alpinisme de la région. C’est l’ancienne implantation romaine d’Auri fondinae (= mines d’or), située là où les Salasses exploitaient les mines d’or du mont Chétif, et qui devint au Moyen-Âge la Curtis major puis Curia Major. C’est là qu’aurait été fondée la première église chrétienne de la région, où les fidèles seraient venus même de Chamonix par le col du Géant. Le lieu fut fréquenté à partir du XVIIe siècle, lorsqu’on y découvrit 4 sources minérales. On y construisit de grands hôtels lorsque le tourisme alpin se développa au XIXe siècle. C’est de là que, en 1864, Felice Giordano fit la première ascension du Mont Blanc par le côté italien. On peut voir à Courmayeur l’église des Saints Pantaléon et Valentin, avec son clocher roman, le Musée alpin « Duc des Abruzzes » sur l’alpinisme local (beau plastique du Mont Blanc) ; en descendant la rue centrale, après l’Église évangélique vaudoise, on peut voir la Tour Maluquin, reste d’un château du XIVe siècle.

Si on prend la route (de l’autoroute on ne voit rien, les tunnels étant nombreux), on descend à Pré-Saint-Didier (Cf. Photo ci-après) où on rejoint la route du Petit-Saint-Bernard. C’est une localité ancienne (« Prata ad Sanctum Desiderium »), connue pour sa source minérale arsenico-ferrugineuse qui fait encore l’objet de Thermes construits en 1834. Ce fut déjà une station militaire romaine, entre autres à cause des eaux thermales qui, dès le XVIIe siècle, furent la première raison du développement du tourisme, accrue par la présence de la famille de Savoie par la suite. Aujourd’hui c’est le terminus de la voie de chemin de fer ; la gare est la copie d’un grenier valdotain du XVIe siècle. Un casino a été construit en 1888.

Peu après, on passe à Morgex (d’un nom celtique, « Morgam »). Il reste de cet ancien lieu de marché, deux châteaux du XIVe siècle, le château de l’Archet, dont la tour date de 998 et celui de Pascal de la Ruine, et l’église paroissiale de Santa Maria Assunta, construite sur un édifice paléo-chrétien de la fin du Ve siècle. Morgex a un vin blanc renommé, un « spumante » à l’ancienne, vinifié fin décembre avec des raisins qui ont subi la neige et le gel. Après Morgex, on arrive à La Salle, dominée par le château de Chatelard (Cf. Photo ci-après), du XIIIe siècle, détruit par les Français en 1793. Un autre château, celui des Les Cours, a été transformé en maison d’enfants. Deux autres châteaux et une vingtaine d’églises et chapelles rappellent l’importance ancienne du lieu. L’église de San Cassiano, restaurée au XIXe siècle, conserve son clocher roman. On passe à Derby (église paroissiale du XVe s.).

On arrive bientôt à Avise, du nom de la famille qui possédait le territoire déjà au début du XIIe siècle, et qui résidait dans deux châteaux, celui de Rochefort, détruit maintenant et abandonné au XVe siècle pour celui d’Avise, érigé à la fin du XVe siècle, renforcé d’un donjon trapu orné de mâchicoulis en corbeaux. Les Avise furent d’abord fidèles à l’empereur Henri IV puis ils se soumirent aux Savoie dès 1285. Plus loin on voit encore un autre château, le château Blonay, du nom de la famille à qui les Avise le remirent au XVIIe siècle, appelé aussi « château des prisons » à cause de son donjon fermé. Avise a une centrale hydroélectrique. De là on continue sur Liverogne, dominé par un éperon rocheux sur lequel est maintenant une chapelle, mais qui porta le château de Rochefort. Le bourg est un ancien village rural, où on trouve encore les restes d’un pont romain, et l’ancien hospice des pèlerins, fondé en 1368, qui porte encore des fresques représentant les Sept Oeuvres de Miséricorde et Les Vertus opposées aux péchés mortels, un des rares témoignages des nombreuses structures destinées à accueillir les pèlerins.

Plus loin à droite, on passe à Arvier, dans une petite conque emplie de vignobles jusqu’à 1000 mètres qui produisent le vin appelé « Enfer ». C’est l’ancienne station romaine d’Arebrigium. Le pays a aussi les restes du château de La Mothe (Les La Mothe furent les premiers feudataires jusqu’au XIVe siècle), un donjon carré. À 4,5 kms au dessus se trouve le château de Montmayeur qui contrôlait le débouché de la Valgrisenche, construit en 1271, restructuré en 1312, qui fut la résidence des troupes du comte de Savoie. On arrive enfin à Villeneuve, (Cf. Panorama ci-contre) qui n’est plus qu’à 670 mètres d’altitude, et qui comporte deux des plus intéressants monuments médiévaux de la Région ; d’abord l’ancienne église paroissiale de Santa Maria, construite au XIe siècle sur les restes d’un baptistère du Ve siècle de forme octogonale ; c’est une des plus anciennes du Val d’Aoste. L’autre monument est un château, le « Chatel-Argent », sur un lieu déjà occupé au IIIe millénaire av. J.C. et qui fut aussi un lieu de sépulture pour les Romains (pierres funéraires romaines). Le château fut toujours solidement contrôlé par les Savoie dès sa construction au XIIIe siècle ; le nom viendrait du fait qu’on y battait monnaie d’argent ; la chapelle remonterait à 1050. Un peu plus bas, en construisant la centrale hydroélectrique, on trouva en 1917 un sépulcre de 3200-2800 av.J.C. On a aussi des traces de l’ancienne voie romaine. Le hameau de Saint-Nicolas est le village natal de Jean-Baptiste Cerlogne, à qui est consacré le Musée où se trouve le Centre d’Etudes Franco-provençales René Willien. L’Église de Saint-Nicolas de Bari date des XII-XIIIe siècles.

Un peu en dehors de la route (8 kms) sur la droite se trouve Introd (du français « entre-eaux »), en amphithéâtre au-dessus de la Dora, planté de vignes qui produisent le vin « Enfer d’Arvier ». Le château, qui appartenait aux Savoie, fut donné en fief en 1242 à Marco di Bard et à ses descendants, les Sarriod de la Tour, jusqu’en 1648, date à la quelle il passe aux Roncas ; il a un plan elliptique, avec un donjon central carré ; il fut reconstruit selon le modèle originel en 1910 suite à un incendie ; il comprend des fresques d’environ 1478 sur la vie du Christ et sur saint Christophe ; la ferme du château, la « cascina » (ferme) Ola, est un rare exemple de construction rurale en bois du XVIe siècle ; une église paroissiale, de la Conversion de S. Paul, a un bel autel baroque piémontais.Continuons à descendre et on traverse Saint-Pierre, déjà habité à l’époque néolithique (un village de cabanes est de la fin du IVe millénaire, le plus ancien site en Val d’Aoste), avec son château (Cf. Photo ci-après) adossé au clocher roman du XIe siècle. Déjà existant en 1191, il a été reconstruit en 1873 par l’architecte Camillo Boggio (1847-1924) selon une vision romantique des châteaux. Il contient un Musée Régional de Sciences Naturelles, sur la géologie, la faune et la flore du Val d’Aoste. De l’autre côté de la route on voit sur la route de Cogne le village d’Aymavilles (son nom vient des deux citoyens romains, Caius Aimus et Caius Avilius, qui firent construire le Pont-acqueduc de Pondel en 3 av. J.C. (Cf. Histoire) ; il a été confirmé par l’ancien feudataire du village, Aymone di Challant). Sur un côteau, le château, ancienne forteresse militaire construite en 1287 et transformée en résidence seigneuriale de 1713 à 1728, malheureusement fermée au public. L’église Saint-Léger, reconstruite en style baroque en 1762 a encore son clocher roman contenant une cloche de 1372 ; la crypte est d’un grand intérêt, c’est la plus ancienne de la Vallée, datant environ du Xe siècle.

Avant d’arriver à Aoste, on traverse Sarre, qui fut habitée dès l’âge de Bronze, puis traversée par la route romaine ; une borne de l’époque de Constantin indiquait une distance de 200 milles entre «Lugdunum » (Lyon) et « Augusta Praetoria » (Aoste). L’église paroissiale de Sarre, fondée par les Bénédictins au XIe siècle et refaite au XVIIe siècle a encore un clocher roman. Le château (Cf. Photo ci-après) contrôlait la route de Cogne ; il est fondé par Jacques de Bard, souche de la Maison de Sarre, en accord avec Amédée III de Savoie, et il fut acquis en 1708 par Jean-François Ferrod, le propriétaire des mines d’Ollomont, puis acheté comme résidence de chasse par Victor-Emmanuel II. Aujourd’hui possession de la Région, il contient un Musée d’histoire locale et de la famille de Savoie. Le roi Charles-Albert, après son abdication de 1849, devint comte de Sarre.Avant d’arriver à Aoste, notons qu’à Pré-Saint-Didier et à Morgex aboutit la route qui vient de France par le col du Petit-Saint-Bernard. Avant le col, on passe le Monument à Saint Bernard, en bronze, de 1902, et sur le sentier qui le longe, l’ancienne guérite des douaniers « des quatre vents » (orientée selon les 4 points cardinaux). Puis, on voit la masse de l’hospice du Petit-Saint-Bernard détruit pendant la seconde guerre mondiale et reconstruit en 1998, maintenant Bureau d’information touristique. Fondé par Saint Bernard en 1045, il fut détruit et reconstruit à plusieurs reprises, ravagé par les soldats français en 1691, restauré en 1712, puis saccagé en 1794 par les Français auxquels les Piémontais résistèrent pendant 4 ans, reconstruit en 1858 et en 1922 avec sa tour d’observation météorologique, à nouveau détruit en 1940 par les troupes françaises, puis saccagé par les Allemands en 1944; il était propriété des l’ordre des Saints Maurice et Lazare et servait au refuge des voyageurs pauvres, en particulier les émigrants valdotains et italiens. En territoire italien jusqu’à la seconde guerre mondiale, il est maintenant en territoire français depuis 1947. Le jardin alpin Chanousia, fondé en 1897 par l’ordre Mauricien, est ensuite intéressant à visiter : il vise à faire connaître la flore de haute altitude (il comporte 4000 espèces de flore alpine du monde entier) ; c’est l’abbé Pierre Chanoux, recteur de l’hospice du Petit-Saint-Bernard, qui le créa, passionné d’alpinisme, et son directeur Lino Vaccari qui le développa pendant 40 ans. À l’ancienne frontière, on trouve l’ancienne douane française, derrière laquelle est encore un « dolichenum », sanctuaire à Jupiter, lieu de culte militaire du IIIe siècle apr. J.C., en face duquel se trouve une Colonne de Jupiter haute de 4,35 m., qui avait donné son nom au mont (« mons Columnae Jovis » = Colonne de Joux) ; on y posa en 1886 une petit statue de Saint Bernard ! Nous avons signalé plus haut la présence d’un cromlech de la protohistoire et une « mansio » romaine (Cf. Histoire). Qui sait si Hannibal a traversé ce col par où passèrent, au long de l’histoire, plus de deux millions de soldats dans les deux sens, nous disent les spécialistes : c’était le plus commode avant l’ouverture des tunnels. C’est tout ce passé qui fait le charme historique du col, qui complète celui de son paysage herbeux entre le mont Belvédère (2641 m.) et le pointe Lancebranlette (2902 m.)

Dans la descente, on passe bientôt à Pont Serrand, puis on arrive à La Thuile, important centre touristique, dans une position stratégique depuis l’ancienne « Ariolica » romaine, entre la France et le Val d’Aoste, qui fut conquise par les Savoie dès 1040. Elle s’appela alors « Thuilia », puis la Thuile. On y découvrit en 1806 des mines de charbon qui furent exploitées jusqu’en 1966 (maximum de production en 1948 avec 112.000 tonnes d’anthracite). C’est aujourd’hui un centre de ski en communication avec celui de La Rosière, en France. Par un sentier on peut faire une excursion au lac du Rutor (ou : Ruitor) et au glacier du Rutor (du latin « Rivus torsus » = ruisseau tortueux) : de là, on a un beau panorama sur le massif du Mont Blanc. On descend ensuite la vallée de la Doire de La Thuile jusqu’à Pré-Saint-Didier ; dans les bois de la Valdigne, on jouit du spectacle naturel de « L’Orrido » (Cf. photo ci-avant), au-dessus des thermes, une violente cascade que les eaux de la Doire de Verney a creusée dans la roche. Au pied de la cascade jaillit la source thermale d’eaux à 35° qui rend la peau douce et fait circuler le sang ! On trouvera plein d’histoires et de légendes sur La Thuile en consultant le site « Connaître La Thuile », www.lathuile.it/datapage.asp.

Pour en savoir plus, visitez le site : www.lathuile.it/datapage.asp



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2- Aoste

Aoste est la capitale de la Région, elle est située dans un lieu stratégique, dans une plaine, à la confluence de la Doire Baltée et de son affluent de gauche, le Buthier, et au croisement des deux routes les plus importantes conduisant aux cols du Petit et du Grand-Saint-Bernard ; elle permettait donc le contrôle des plus grandes voies de communication commerciales et militaires dans l’Antiquité. Elle a probablement été occupée dès le IIIe millénaire av. J.C. (Cf. plus haut la découverte du site de culte mégalithique du quartier de Saint-Martin-de-Corléans, devenu ensuite lieu de sépulture monumentale avec des dolmen, puis nécropole vers 2000 av. J.C.). Elle fut aussi le lieu probable de la capitale mythique des Salasses, Cordelia (nom hérité de Cordelo, fondateur mythique de la ville, descendant de Saturne et compagnon d’Hercule). On connaît mieux les conditions de la romanisation des lieux en 25 av. J.C., date de la création d’une ville sur le précédent camp romain du consul Térence Varron Murena. On a vu plus haut le tracé de la ville romaine, avec son decumanus maximus et son cardo maximus, déterminant le tracé orthogonal des rues dans l’enceinte de 754 m. par 572, à peu près équivalente à celle d’Augusta Taurinorum, Turin. La ville atteignit 10.000 habitants au IIe siècle, plus que Turin, et avait une splendeur imposante. On a vu plus haut les principaux monuments de cette ville (Cf. Histoire). La centuriation (distribution de lots de terre, les « centuries », de 706 à 710 m. de côté, à d’anciens légionnaires) fut pratiquée tout autour de la ville. Aoste fut la dernière ville romaine construite en Italie, elle avait donc profité de toutes les expériences précédentes, et elle atteignit donc probablement la « perfection » de l’urbanisme romain ; malheureusement les crues médiévales du Buthier ont enseveli ou détruit beaucoup de monuments qui émergent peu à peu des fouilles actuelles.

Le pouvoir de l’Église s’affirma dès que disparut celui de l’empire ; le diocèse d’Aoste s’organise à partir du début du Ve siècle. Après la décadence qui suit les invasions barbares, la vie reprend vers l’an Mille, autour des deux pôles religieux de la cathédrale et de Saint Ours, où s’établissent les religieux, tandis que les nobles occupent les tours de l’ancienne muraille romaine, et le peuple le long des principales rues de la ville. Les tours de la muraille furent donc les points de départ de la féodalité locale, bientôt dominée par les vicomtes de Challant, remplacés seulement en 1295 par les comtes de Savoie. Les petits féodaux partirent alors souvent s’installer dans des châteaux de campagne.

Le premier monument de la ville est la cathédrale, sur la place Giovanni XXIII. C’était l’espace du Forum, à côté duquel l’empereur Constantin aurait fait construire un premier temple chrétien ; les traces de deux églises et d’un baptistère du IVe siècle ont été retrouvées dans les fouilles, ainsi que deux fonts baptismaux et deux tombes d’évêques. C’est ensuite l’évêque Anselme qui aurait fait construire une nouvelle église en style roman entre 994 et 1026, dont le choeur surélevé se trouve au-dessus de la crypte encore existante. Le choeur fut refait à l’époque gothique, laissant place au déambulatoire et aux trois chapelles actuelles ; le déambulatoire est maintenant occupé par le Musée du Trésor de la Cathédrale. Le cloître fut ajouté au XVe siècle (1422-1460).

La façade, construite en 1848, est de style néoclassique, avec les statues de S. Anselme et de S. Giocondo dans une niche, et celles de S. Jean-Baptiste, de la Vierge et de S. Ours sur le tympan. L’atrium est l’ancienne façade de la Renaissance, ornée de fresques réalisées par un peintre local de 1522 à 1530. L’église comporte deux clochers romans. L’intérieur conserve encore un cycle de fresques du XIe siècle (Plaies d’Égypte, Lazare, histoires de S.Eustache, anges, ancêtres du Christ) ; d’autres fresques et des vitraux ont été voulus par Georges de Challant entre 1494 et 1498. Le choeur surélevé comporte un autel baroque posé sur un sarcophage romain et le sépulcre de Thomas II de Savoie (1199-1249) : la mosaïque du sol (L’année, les mois, les travaux des mois) est du XIIe siècle ; le cloître (accès de la nef gauche de la cathédrale) a été construit de 1442 à1460. Plus au nord de la cathédrale et du Musée Archéologique Régional, on peut voir l’église du XVIIIe siècle de Saint-Étienne, et le Palais Roncas, en face du Musée, construit en 1606 par Pierre-Léonard Roncas, premier Secrétaire d’État de Charles-Emmanuel I de Savoie. Plus bas, au croisement de l’ancien cardo et de l’ancien decumanus, rue de Tillier, une fontaine surmontée d’une croix rappelle la tentative de Calvin d’introduire la Réforme à Aoste : la croix aurait servi à chasser Calvin de la ville. Un peu plus loin sur la rue de Tillier, on trouve la place Émile Chanoux, martyr de la Résistance, et la Mairie (Cf Photo ci-après), élevée de 1839 à 1842 sur un ancien couvent franciscain, avec une longue façade de 140 mètres et un tympan triangulaire orné de deux belles statues, d’une horloge et d’une méridienne. Le bâtiment de gauche englobe l’ancien Hôtel des États, qui abritait le Conseil des Commis. Tous les édifices de la place Chanoux ont été restructurés et abritent beaucoup d’hôtels. Dans la rue qui conduit à la gare, remarquer un immeuble de Gio Ponti de 1938, au n° 24-28. À l’angle de la rue Festaz, il y eut un prieuré bénédictin dont reste le clocher du XIIe siècle et l’église de 1680 ; S. Anselme, futur évêque de Canterbury, y enseigna ; l’ancienne église est maintenant une salle d’exposition ; devant la porte, voir le Lion de Judas, sculpture en bronze d’Arturo Martini (1936). En face, Jardins publics, au centre desquels se trouve le Monument à Victor-Emmanuel II d’Antonio Tortona (1886). Autres monuments modernes, le Palais des Postes, à plan semi-circulaire, de 1941, et la Gare, près de la Tour de Pailleron, sous laquelle est le Monument à Humbert I, en style Liberty, de 1903 ; elle fut inaugurée en 1886, le jour même où Aoste fut la première ville d’Italie à être éclairée par l’énergie électrique.

Pendant les années ’30, le fascisme tint à marquer sa présence dans la « Rome des Alpes » par la construction de nombreux monuments, comme par exemple, la Piazza della Repubblica, au bout de la rue Festaz ; l’ancienne Casa Littoria, avec sa tour et la colonne de bronze portant la Louve du Capitole, de Giuseppe Momo (1939), connu par le double escalier hélicoïdal des Musées du Vatican (1932), la caserne des Chasseurs Alpins Testafochi avec ses aigles de bronze à l’entrée (1933). Le fascisme voulait aussi insister sur la continuité entre l’empire romain et le régime de Mussolini, nouvel empereur ...Si on remonte maintenant vers la Porta Praetoria et le Théâtre romain, on arrive à l’église San Lorenzo (Cf. Photo ci-après), refaite au XVe siècle, puis transformée en caserne ; elle est utilisé aujourd’hui en salle d’expositions ; mais on trouve au-dessous une ancienne église du Ve siècle, construite sur le modèle de S. Ambrogio de Milan, où la forme de croix latine symbolise le triomphe sur les Ariens ; dans cette église, se trouvent les tombes des premiers évêques d’Aosta, Agnello, Grato et Gallo. À côté de l’église, un grand tilleul de plus de 400 ans, planté en 1529 à la place de l’orme du XIe siècle, mort de vieillesse.À côté de San Lorenzo, on doit voir le bel ensemble de Saint Ours, d’abord son clocher roman, de 1131 avec ses trois rangées de fenêtres géminées et sa fenêtre bigéminée qui ouvre sur la cloche de 21 quintaux, de 1559. C’est le plus haut de la ville (44 mètres). L’ensemble comprend, outre le clocher, la Collégiale, le Prieuré et les Cloîtres. La Collégiale fut d’abord dédiée à Saint Pierre, puis à Saint Ours : sur la première église, où l’on a récemment découvert une grande mosaïque du XIIe siècle, l’évêque Anselme I fit construire cette église à trois nefs avec crypte, abside semi-circulaire et couverture à chevrons remplacée par des voûtes, et il la fit décorer d’un cycle de fresques, maintenant fragmentaire. Au XVe siècle, Georges de Challant la fit décorer par ses meilleurs artistes, et il commanda en 1487 un choeur de 24 stalles en bois à dossiers et baldaquins gravés. Du début du XVIe siècle sont les 5 vitraux de l’abside (Saint Pierre, Vierge à l’enfant, Crucifixion, Bon Berger, Saint Ours). La crypte reste celle du XIe siècle, avec des piliers provenant de constructions romaines.

On accède au Cloître depuis la nef droite de la Collégiale. C’est le seul qui reste de cette époque en Italie du Nord ; il est orné de fresques de l’Ancien et du Nouveau Testament. Il a été voulu par l’évêque Eriberto en 1132 (le chapiteau XXXV représente la fondation du couvent) et comporte 40 chapiteaux restants des 52 d’origine, qui sont une des plus belles oeuvres de sculpture du XIIe siècle (Cf. le détail page suivante) qu’il est intéressant de voir en détail (après avoir relu les chapitres de la Bible qui y sont illustrés ...). Voir ci-dessous, à droite un chapiteau du cloître, à gauche le cloître.En-dessous du cloître se trouve enfin le prieuré, surmonté d’une tour octogonale (comme l’ancien baptistère), construit par Georges de Challant qui le prit pour demeure en 1468 quand il fut élu prieur de Saint Ours. On peut monter voir la salle prieurale et la chapelle ornée de fresques (Saint Georges, Annonciation, Saints) peintes en 1480 par des artistes locaux.On peut faire le tour des murailles romaines à partir de la Porta Praetoria, et suivre les tours : de la tour Plouvres, il ne reste qu’une petite partie ; on va vers le sud et on trouve les deux tours utilisées par les Challant, la tour du Pailleron, restaurée par d’Andrade entre 1891 et 1892, la tour de Bramafam (= Brame-faim ?), dans les jardins publics, en partie sur les restes de la « Porta Principalis Dextera », érigée sur les restes de la tour romaine avec des créneaux guelfes. En continuant vers le nord, on trouve la Tourneuve, érigée au XIIe siècle sur les restes de la tour romaine ; enfin au nord-est, la tour des Baillis (Balivi), acquise par les Savoie en 1263 pour y loger leurs représentants ; elle fut complétée par un autre corps de bâtiment en 1406 puis en 1540, et elle devint une prison jusqu’en 1984. La Tour des Baillis est aujourd’hui un musée.

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Évêques d’Aoste et autres saints d’AosteLe premier évêque d’Aoste fut Eustasio (en grec = celui qui est solide dans sa foi). Il fut remplacé par saint Grat (Ve siècle), à qui on attribua la découverte (« l’invention ») de la tête de s. Jean-Baptiste jetée dans un puits après sa décapitation. Les reliques de S. Grat furent retrouvées par des maçons de Fontaine Giocondo (501-502), puis, après un anonyme, Agnello (522-528) auquel succéda Gallo (Gallo, 529-546). On peut citer encore Anselme I (évêque d’Aoste de 994 à 1026), probable promoteur de l’ensemble de Sant’Orso, avec Eriberto (évêque de 1114 à 1138). Il y eut encore un Giacomo Porta (Porzia ?) (1216-9). Parmi les évêques connus, on peut encore citer Giorgio di Saluzzo (1433-1440) qui fut d’abord archidiacre de Lyon, Jean de Prangins (1440-44), seulement reconnu par l’antipape, dans cette période de conflits entre pape et antipape, François de Prez (1464-1511), d’origine suisse comme plusieurs autres, qui contribua à la construction de la cathédrale. D’autres personnalités que les évêques vinrent d’Aoste : saint Anselme (1033-1109), docteur de l’Église et archevêque de Canterbury, qui voulut montrer la vérité rationnelle de la foi chrétienne (la « preuve existentielle » de l’existence de Dieu), qui a sa statue à Aoste.Un autre valdotain est saint Bernard de Menthon (1008 ?- 1081), né à Aoste, archidiacre de la cathédrale, constructeur des deux hospices des cols du Petit et du Grand-Saint-Bernard, dont les chanoines ont pour but d’accueillir et de soigner les pèlerins avec l’aide d’une nouvelle race de chiens, les Saint-Bernard.



Les 40 chapiteaux du Cloître (à partir du pilier d’angle ; en sens contraire d’une montre) :

  1. I - Basilics monstrueux
  2. II – Ananias, Azarias et Misaël dans la fournaise (Bible, Livre de Daniel)
  3. III – Annonciation, David
  4. IV – Nativité de Jésus
  5. V – Les Mages devant Hérode
  6. VI – Rêve de Joseph, fuite en Égypte
  7. VII – Chapiteau décoratif
  8. VIII – Job
  9. IX – Rencontre d’Éléazar, fils d’Aaron (Nombres, 20, 28) et de Rebecca
  10. X – Chapiteau décoratif
  11. XI – Harpies
  12. XII – Fable de la cigogne et du renard
  13. XIII – Chapiteau corinthien
  14. XIV – Chapiteau décoratif
  15. XV – Chapiteau d’angle, décoratif
  16. XVI – Naissance d’Esaü et de Jacob, Esaü à la chasse, Rebecca pousse Jacob devant Isaac (Genèse)
  17. XVII – Rebecca conseille à Jacob de fuir, Rêve de Jacob
  18. XVIII – Troupeau de Rachel au pâturage, Jacob découvre le puits à Rachel (Genèse)
  19. XIX – Réconciliation de Jacob et Ésaü
  20. XX – Les 3 fils de Jacob avec leur soeur Dina, Laban se lamente des richesses de Jacob, Lia informe son père des trésors cachés (Genèse)
  21. XXI – Jacob revient avec Lia et Rachel, Lutte avec l’ange
  22. XXII – Joseph prend congé de ses frères (Genèse)
  23. XXIII – Pilier d’angle, décoratif
  24. XXIV - 4 aigles
  25. XXV – Têtes de bouc et rubans
  26. XXVI – 4 personnages = ?
  27. XXVII – Sophonie, Agée, Zaccarie, Malachie (les 4 derniers livres des Prophètes Mineurs)
  28. XXVIII – Isaïe, Jérémie, Ézéchiel, Daniel
  29. XXIX – Jonas, Michée, Nahum, Abacuc
  30. XXX – Osée, Joël, Amos, Abdias
  31. XXXI – Moïse, Balaam, Élias, Nathan
  32. XXXII - Chapiteau le plus gros : Vie et miracles de S. Ours, mort de Plotien
  33. XXXIII – André et Simon apôtres, Résurrection de Lazare
  34. XXXIV – Apôtres Barthélemy, Jacques, Marie-Madeleine, Marthe
  35. XXXV – Fondation du couvent : S. Pierre, S. Ours, l’évêque Eribert
  36. XXXVI – Inscription de référence de la fondation
  37. XXXVII – Pilier d’angle avec ébauche de chapiteau corinthien
  38. XXXVIII, XXXIX et XL – chapiteaux décoratifs du XVIIIe siècle


3 – D’Aoste à Pont-Saint-Martin : la vallée de la Doire Baltée

En sortant d’Aoste à l’Est, on arrive à Quart, sur l’ancienne route consulaire romaine (« Ad quartum lapidem » = au 4e mille d’Aoste), site de très ancienne occupation (on y trouve une nécropole énéolithique), puis domaine de la très puissante famille de la Porte Saint-Ours, qui, restant sans héritiers mâles, passe sous le contrôle des Savoie en 1378. Au-dessus se trouve le château de Quart, construit au XIIe siècle et aménagé ensuite par les Savoie. C’est une puissante et complexe forteresse restaurée et ouverte au public en 2009.

On passe ensuite à Brissogne avec son château, qui appartenait à la seigneurie de Quart et dont il ne reste que le donjon, puis à Saint-Marcel ; dans le vallon de Saint-Marcel, existait déjà au temps des Romains une mine de pyrite de cuivre et une mine de manganèse maintenant épuisées. C’est aussi le lieu d’une vaste zone aqueuse riche de faune, plus de 150 espèces d’oiseaux qui viennent y nidifier. On arrive à Nus (« Ad nonum lapidem »), on voit le château de « Pilate » dont on dit qu’y séjourna le procurateur romain partant pour son exil en Gaule, où il se serait suicidé à Vienne. En remontant à Ligna, on verrait l’oratoire de Cuney, au milieu d’un cirque glaciaire, à 2652 mètres, le plus haut édifice religieux de tout le Val d’Aoste, où l’on fait un pèlerinage à la Vierge de la Neige dans la chapelle construite en 1661 par les Dominicains.

On arrive plus loin au château de Fénis (Cf. Photo ci-après), qui appartint aux Challant dès 1242 et fut reconstruit tel qu’il est aujourd’hui en 1340 par Aymon de Challant et son fils Boniface ; les Challant le gardèrent jusqu’en 1716, puis durent le vendre ; il fut enfin racheté, étudié et restauré en 1895 par Alfred d’Andrade qui le donna ensuite en 1906 à l’État italien qui le laisse à la Région en 1946. Protégé par une forte double enceinte et par des tours, ce n’en fut pas moins déjà un château de la Renaissance à fonction résidentielle et représentative. On entre d’abord dans une cour trapézoïdale, qui est reproduite à Turin dans le Château du Valentino, décorée de fresques de l’école de Giacomo Jaquerio (1375-1443, fresques vers 1414), dont le Saint Georges qui libère la princesse (Cf. photo ci-après), symbole de la lutte entre le Bien et le Mal, le Saint Christophe (1455-60) et L’Annonciation qui servent de fond à un escalier semi-circulaire. Sur les côtés, 24 Sages et philosophes de l’Antiquité, avec des proverbes et phrases en français d’époque. On entre ensuite dans la Salle d’armes et dans la Cuisine de la garnison, avec une cheminée où l’on pouvait cuire un boeuf entier, et les salles de service. À l’étage, on traverse la Chambre de la baronne, avec un lit du XVe siècle, la Salle baronale avec sa cheminée et ses meubles du XVe et XVIe siècles, et la Chapelle ornée de fresques de l’école de Giacomo Jaquerio (Annonciation, Vierge de Miséricorde, Crucifixion). La Cuisine est encore équipée. Au second étage, les chambres de la garnison, avec des meubles valdotains typiques. On monte à une tour d’où la vue est splendide. Dans le château vivaient environ 60 personnes, dont 40 de personnel de service, gardes, et c. (Cf Photo ci-après). Ce château constitue un Musée du meuble valdotain.

À Fenis, voir aussi dans la chapelle proche du château un crucifix en bois du XVe siècle, l’église paroissiale de Saint Maurice avec son autel baroque en bois peint et doré, et la Maison Forte des nobles De Tillier, où naquit l’historien du Val d’Aoste, Jean-Baptiste de Tillier (1678-1744), avocat à Aoste et secrétaire des États du Duché d’Aoste de 1700 à sa mort. Il fut en opposition constante avec le pouvoir centralisateur et antiautonomiste de Turin qui interdit plusieurs de ses oeuvres sur l’histoire du Val d’Aoste : Historique de la Vallée d’Aoste (1737), Chronologie des Familles nobles ou Nobiliaires du Duché d’Aoste, Chronologie des évêques, prévôts, archidiacres, gouverneurs du Duché, vi-baillifs, syndics d’Aoste.

La route continue sur Chambave, bourg d’anciens commerces et de marchés depuis le XIe siècle, qui possède une église paroissiale de 1471, construite sur une église romane du XIIe siècle, et refaite entre 1744 et 1889. Au-dessus, sur la colline de Saint Pantaléon, voir le château de Cly, appartenant aux Challant et siège de la juridiction jusqu’en 1640. Il en reste les murs d’enceinte et le donjon ; il contient une chapelle romane du XIIe siècle. On arrive ensuite à Châtillon, assez grand centre industriel et commercial au débouché de la Valtournenche.

Châtillon (Cf. Photo ci-après) est déjà existante à l’âge du Bronze, puis sous la domination romaine ; au Moyen-Âge, elle est le siège de la famille de Challant qui fut propriétaire des différents châteaux. Elle fut un centre commercial important, comportant des foires et marchés ; puis au XVIIIe siècle, elle devint un centre industriel minier (marbres verts), métallurgique, textile, agroalimentaire. La ville présente quelques palais du XVIIIe siècle (l’ex-palais Gervasone, dans la rue Chanoux) et l’église paroissiale de Saint-Pierre, au-dessus de laquelle se tient le château, résidence des Challant dès le XIIIe siècle et appartenant aujourd’hui aux comtes Passerin d’Entrèves. Sous le nouveau pont, on voit encore des éléments de l’ancien pont romain (Cf. photo après) sur le torrent Marmore, détruit par les Français en 1691. Derrière la gare se trouvent les ruines du château des Rives, le premier château des Challant, puis le château d’Ussel, restauré en 1999, qui domine toute la plaine de Châtillon et Saint-Vincent ; vide, il est aujourd’hui un centre d’expositions ; il fut construit en 1343 par Ebalo de Challant. Il est le premier château monobloc, constituant un seul corps de bâtiment au lieu d’avoir une enceinte extérieure. Le côté sud est une façade lisse coupée seulement par 4 doubles fenêtres géminées superposées ; aux deux angles deux petites tours rondes et une tour carrée au-dessus de la porte d’entrée, munie de mâchicoulis. Le côté nord présente au contraire trois grandes tours carrées, les deux latérales servant de latrines. La restauration a pourvu le château d’une toiture en matière transparente. (Pour en savoir plus, voir sur Google le site « castello di Ussel »).

La route continue de Châtillon à Saint-Vincent, dans la même conque dominée par le mont Zerbion (2720 m.), qui connaît la présence des hommes après le retrait du grand glacier qui l’occupait jusqu’à il y a 10.000 ans, laissant place à un grand lac de Champérious à Sarre : traces de civilisation des Salasses puis domination romaine marquée par le pont encore visible (Cf. Photo après). Le site appartint aux Challant en 1292, à la suppression des droits féodaux des seigneurs de Montjovet, puis passèrent aux Savoie qui leur confièrent la région en fief, en échange de l’abandon du viscontat d’Aoste. La célébrité de Saint-Vincent commença lorsque l’abbé Jean-Baptiste Perret, spécialiste de sciences naturelles, découvrit la source d’eaux thermales et ses vertus curatives en 1770 ; le roi Charles-Emmanuel III de Savoie (1701-1773) s’intéressa personnellement au développement des cures, et ses descendants suivirent ; en 1846 fut construit le premier établissement de bains, qui fut fréquenté par la cour de Turin et par la bourgeoisie locale. L’eau est définie « bicarbonate-sulfate-alcalin-brome-iodée carbonique ». Un funiculaire permet d’accéder à l’établissement « Fons salutis » construit en 1900. Le succès de Saint-Vincent est dû aussi à la création d’un Casino de jeux, un des cinq casinos italiens, créé en 1946 et inauguré en 1947 il est transféré en 1982 dans les locaux modernes actuels. Un peu après le Casino en allant vers Châtillon se trouve l’Hôtel Billia, construit en 1907 en style Liberty.On peut voir aussi l’église paroissiale Saint-Vincent, à côté du départ du funiculaire des Thermes. Elle a été construite au Ve siècle sur les ruines de l’installation thermale romaine, dont les absides furent réutilisées pour l’édifice religieux et dont les traces sont visibles dans la crypte. Le nouvel édifice roman existe déjà en 1153, comme bénéfice de l’abbaye d’Ainay à Lyon ; elle est à nouveau restructurée au XVe siècle et en 1691. L’intérieur contient quelques fresques du XVe siècle. Saint Vincent était un diacre de Saragosse martyrisé le 22 janvier 304 pendant les persécutions de Dioclétien. On en a fait le patron des vignerons, des tonneliers et des vinaigriers, peut-être parce que le mot « VIN » est dans son nom, ou parce qu’il fut torturé sur une roue de pressoir ; son culte s’est d’abord implanté en Bourgogne et en Champagne, à partir du Ve siècle (Cf. ci-contre l’église Saint Vincent).

Saint-Vincent était sur la « strada francigena », celle que prenaient les pèlerins venant de France pour aller à Rome ou dans les Pouilles pour partir en Terre Sainte. Cela lui donnait de l’importance. Mais il faut signaler aussi l’existence d’une nombreuse population locale dispersée autour de Saint-Vincent dans des « villages » au nombre d’une soixantaine : de petits groupes d’habitations fournies des équipements nécessaires, four, laiterie, école, fontaine, bois, lieu de culte (les nombreuses « chapelles » encore existantes autour de la ville) qui permettaient à une petite communauté d’avoir une existence difficile dans une solidarité étonnante. Le nom de ces villages indiquait souvent leur spécificité, Perrière (exploitation de la pierre), Les Moulins (existence de moulins à céréales), Favret (il y avait un « favro », un forgeron), Ecrivin (il y avait un écrivain public),etc. Il faut noter qu’en 1393, plusieurs chefs de villages d’adressent au seigneur, Iblet de Challant, pour lui demander la possibilité de prélever une partie des eaux du glacier du Mont Rose pour les porter jusqu’à la Colline de Joux et les distribuer ensuite dans les villages, moyennant le creusement du Canal Courtaud, encore existant, qui dura une quarantaine d’années et dont les villages garantirent l’entretien ; ce fut une entreprise inimaginable qui dit combien fut grande la solidarité et l’efficacité de ces villages. Piergiorgio Cretier en fait une étude dont on trouve les éléments sur Internet (www.comune.saint-vincent.ao.it).

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Le samedi au mardi-gras, s’y déroule chaque année sur le thème de l’épopée de la comtesse Catherine de Challant (Cf. photo avant) ; comme partout le carnaval célèbre la joie de l’arrivée du printemps, avant la sévérité du Carême. Catherine était une souveraine « démocrate » qui venait danser sur la place avec ses sujets et son mari, Pierre d’Introd, dans l’enthousiasme populaire ; en 1442, son père avait légué son patrimoine à ses deux filles, mais Catherine obtint aussi l’héritage de sa soeur Marguerite ; cela fut contesté par ses cousins au nom de la loi Salique qui interdisait aux filles d’hériter de leur père ; aidé par son second mari, Pierre de Sarriod, comte d’Introd, Catherine résista jusqu’en 1456 et n’abandonna la lutte qu’après la mort de son mari, tué dans une embuscade. Elle se remaria et tenta en vain jusqu’à sa mort en 1476 de récupérer son comté.Presque en face du château de Verrès se situe le château d’Issogne (Cf. Photo après) autour duquel est sis le village d’Issogne, construit sur une ancienne villa romaine. Il y eut d’abord une maison forte qui, en 1379, fut transformée en un château de résidence de style gothique par Yblet de Challant ; les Challant l’embellirent et l’agrandirent par la suite. Il fut restauré au XIXe siècle, donné en 1907 à l’État italien qui le remit à la Région en 1948. C’est un édifice quadrangulaire, avec de petites tours d’angle, autour d’un jardin intérieur, refait à l’italienne ; sur cette cour donnent les façades ornées de blasons des familles Challant ; au centre, la fontaine du grenadier, une fontaine de fer forgé représentant un grenadier avec des feuilles de chêne, symbole de la fécondité et de l’unité familiale, sur une base en pierre octogonale (Cf. photo ci-après); des fresques de la vie quotidienne et de boutiques de marchands ornent les voûtes des arcades (B du plan), elles ont été réalisées entre 1499 et 1509 par trois ateliers différents d’artisans. On peut visiter une dizaine de pièces d’un ensemble de 50 : après l’atrium (A du plan), au rez-de-chaussée, Salle à manger (C), cuisine (D), salle de séjour (E), salle de Justice (décorée de scènes de chasse) (L) ; au premier étage, chapelle (B), chambre nuptiale de René de Challant et de son épouse Mencia (D), Chambre du cardinal Madruzzo (C), parent du mari d’Isabelle de Challant, Jean-Frédéric de Madruce, chambre de Marguerite de la Chambre (F), un oratoire (G), salle d’armes (L) ; au second étage, loggia (B), et par un escalier en colimaçon, chambre de Georges de Challant (F. Cf. Photo ci-après), décorée de fresques et avec une grande cheminée, oratoire (G), Tour d’angle (H), d’où on a une belle vue sur les autres châteaux et le paysage, chambre d’Isabelle de Challant et Chambre de l’empereur où coucha Sigismond de Luxembourg en 1414, à l’extrémité sud-ouest du château (I), Chambre du Roi de France (où fut reçu Charles VIII en 1494) (L. Cf. Photo ci-après). C’est un bel ensemble qui comprend aussi de nombreux meubles et des armes anciennes (Voir un plan plus détaillé sur Internet, www.regione.vda.it ... castello di Issogne).

On raconte que le château est hanté par le fantôme de Blanche-Marie Gaspardone, première épouse de René de Challant, qui fut condamnée à mort pour avoir assassiné son amant, et exécutée en 1526 à Milan...Après Issogne, on entre dans la commune d’Arnad, dominée par trois châteaux, le château Supérieur (Cf. photo ci-après) qui appartint aux premiers feudataires, les Seigneurs de Bard, de 1214 à la fin du XIIIe siècle ; il revint aux Savoie en 1287 puis passa aux Vallaise qui étaient peut-être une branche des seigneurs de Bard. Il est abandonné vers la fin du XVIe siècle, les Vallaise s’étant installés dans un autre château ; il est aujourd’hui en ruines. Le deuxième château est le château Vallaise (Cf. photo après), ou Château inférieur, grande construction résidentielle du XVIIe siècle, ornée de fresques représentant des scènes mythologiques et des vues des localités appartenant aux Vallaise, à côté de paysages fantastiques. D’autres fresques louent les femmes de la Bible, Agar et Tamar. Plus loin se dresse encore une Tour du XIIe siècle, qui avait probablement fonction de maison forte.Il faut voir aussi l’église romane de San Martino (Cf. photo après), avec son abside couronnée de petits arcs. Elle a été édifiée entre le XIe et le XIIe siècle ; son portail est du XVe siècle, encadré de deux arbres tressés sculptés dans le tuf.Arnad est le lieu de production du « Lard d’Arnad » qui doit sa saveur à la nourriture des porcs (à base de châtaignes et de légumes) et au mode d’affinage avec des herbes de montagne, des épices et divers arômes (Voir le site : www.taccuinistorici.it) ; il peut se manger sur une tranche de « pan nèr », le pain typique du Val d’Aoste, tartiné de miel... Arnad produit aussi avec Montjovet un vin DOC, « denominazione di origine controllata ». Arnad a un mur d’escalade célèbre auprès de tous les alpinistes. On arrive enfin à Bard qui est le véritable verrou d’entrée dans la vallée d’Aoste, il garde de façon autrefois dite « inexpugnable » la gorge étroite dans laquelle il faut passer pour entrer ou sortir de la vallée pour entrer dans le Piémont ; le Fort qui le domine était donc un point stratégique qui fut déjà exploité par les Romains (il reste dans le village des traces de la voie romaine). Le village est d’origine médiévale, et ses maisons datent encore du XIIIe au XVIe siècles ; une des plus importantes est le Palais des comtes Nicole, les derniers comtes de Bard, dont ce sont les armoiries à deux bars qui donnent son nom au village ; la maison est disposée à cheval au-dessus de la route, ce qui permettait de recueillir les péages. On peut voir aussi la maison de l’évêque, la maison Challant, la maison Ciucca, et quelques autres. Le village vaut la peine d’une promenade à pied. La nouvelle route contourne maintenant le village. Voir ci-dessus une ruelle couverte du village.

Au-dessus du village, il y a donc le Fort de Bard, récemment restauré. Son site fut occupé dès la préhistoire (existence de gravures rupestres au pied de l’éperon rocheux), puis par les Romains, enfin par le roi des Goths Théodoric (455-526) ; y eut ensuite une fortification des comtes de Bard ; on y signale la domination d’Humbert Blanches-Mains, puis en 1242 Amédée IV s’empare du fief ; dans le fort, Charles Emmanuel II fit transférer en 1661 toutes les artilleries des châteaux de Verrès et de Montjovet. En 1800, Napoléon, arrivant du Grand-Saint-Bernard, dut contourner le Fort ; il le fit assiéger par ses troupes, et l’assaut dura du 19 mai au 1er juin, tellement fut forte la résistance des 400 soldats piémontais et autrichiens qui y étaient concentrés. Le Fort ne se rendit qu’après la chute d’Ivrée ; la garnison put sortir avec les honneurs des armes, et Napoléon fit raser le château au sol. Il ne fut reconstruit qu’entre 1830 et 1838, et il servit de prison (Cavour y fut enfermé pendant 8 mois en 1831 pour ses opinions libérales, et c’est là qu’il abandonna la carrière militaire pour se lancer dans l’action politique). Le Fort de Bard a été acquis par la Région et restauré. Il comprend maintenant quatre ouvrages principaux : 1) En bas, l’ouvrage Ferdinand qui abrite le Musée des Frontières, une histoire des Alpes Occidentales et de leur peuplement ; 2) Un peu plus haut, l’ouvrage des Mortiers, où la réouverture des canonnières permettra d’avoir une belle vue du panorama ; 3) L’ouvrage Victor, siège du Musée du Fort et des fortifications, une histoire des fortifications de Bard et des méthodes d’attaque et de défense, des Romains au XIXe siècle. On y trouve aussi un espace ludique destiné aux enfants, « Les Alpes des enfants » ; 4) L’ouvrage Charles-Albert, destiné à des expositions (Cf : ufficiostampa@fortedibard.it) et à des spectacles (septembre 2015 : le passage de Napoléon en 1800). De plus, dans l’étage enterré se trouvent intactes les anciennes prisons, consacrées à une histoire des prisonniers de Bard (« Galerie de la mémoire »). (Cf. plus haut, une vue ancienne du Fort de Bard).

On passe ensuite à Donnas, sur l’ancienne route romaine dont il reste une longueur de 221 mètres, de 5 mètres de large, qui témoigne de l’importance qu’a eue ce village de passage obligatoire pour entrer dans le Val d’Aoste en venant du Piémont (Cf. photo de la route dans Histoire). Dans la courbe de la Doire, un éperon rocheux forme une barrière naturelle qui a été amplement fortifiée. Une borne romaine indique que Donnas est à « XXXVI milles » d’Aoste. Depuis 1674, ce sont les comtes Henrielli qui disposent du fief concédé par les Savoie ; parmi d’autres maisons médiévales, leur palais construit contre une tour du XVe siècle, témoigne de l’ancienneté du village. Donnas, sur ses terrassements de colline, produit un vin rouge classé DOC depuis 1985. Tous les avant-derniers dimanches de janvier se déroule dans le village une grande Fête du Bois, vitrine de tout l’artisanat et de tout l’art populaire du village, avec environ 500 artisans (objets en bois, outils, dentelles, tissus, fer forgé, pierre ollaire ...)

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4 – Les vallées latérales

A – Sur la rive gauche de la Doire Baltée

a) La vallée du Grand-Saint-Bernard

Elle permet de rejoindre la Suisse, c’est la première vallée carrossable de la rive gauche depuis Courmayeur. On l’appelle souvent la Coumba Freide, la vallée froide à cause de son climat hivernal. L’accès au tunnel est protégé par des galeries qui protègent des avalanches ; après 5813 mètres de tunnel, on débouche à Bourg-Saint-Bernard puis à Martigny dans le Valais. La route qui part de Signayes, à la sortie d’Aoste, serait l’ancienne voie des Salasses. On traverse Gignod (qui fut peut-être l’ancienne Girosolis romaine). Du château de Gignod, il reste la Tour du XIIe siècle, peut-être d’origine romaine ; l’église paroissiale de Saint Hilaire a un clocher de 1481 et un cycle de fresques d’environ 1480. De l’ancien système d’irrigation construit au XIVe siècle, il reste la canal « Ru Neuf » qui apporte encore l’eau du Buthier à Aoste (Ci-contre, panorama de Gignod).

On passe ensuite à Allein, site déjà connu des Romains qui en exploitaient la forêt (Allein = Ad lignum). Le village est célèbre pour son carnaval, inspiré par les costumes des soldats de Napoléon lorsqu’ils franchirent le col en 1800 et par des personnages comme Arlequin, la Demoiselle, l’Ours, le Diable, le « Tocco » et la « Tocca », venus de tout le Val d’Aoste. En face d’Allein, Clusaz, localité stratégique, une des « clausurae » d’Auguste.On arrive ensuite, par une route au milieu de bois de mélèzes, à Etroubles (la Restapolis des Romains), à qui les Savoie accordèrent le monopole des transports pour le col et l’exemption du service militaire des jeunes de 1658 à 1915. On y conserve la Tour des seigneurs de La Vachery, qui furent parmi les premiers feudataires ; elle est estimée du XIIe siècle. Le village fut doté en 1317 d’un hospice pour les pèlerins. L’église, du XIXe siècle, a gardé son clocher du XVe siècle. Etroubles a aussi la tradition d’un carnaval proche de celui d’Allein. En reprenant la route du col, on arrive à Saint-Oyen, d’où part le raccordement avec l’autoroute du col. On y trouve le « Château Verdun », édifice fortifié donné en 1137 aux moines du col comme annexe de l’Hospice. L’autoroute, seule ouverte en hiver, est protégée de la neige et des avalanches.Saint-Léonard se trouve aussitôt après la déviation de l’autoroute. À l’entrée, après l’église néogothique, se dresse l’ancien château des feudataires du village, les de Bocha, et plus loin, une maison forte des mêmes feudataires. Au-dessus du village, il y a la source d’eau ferrugineuse de Citrin.Saint-Rhémy-en-Bosses est le dernier village avant le col, qui fut une étape sur l’ancienne route consulaire romaine, que l’on peut encore parcourir à pied jusqu’au col. Les Romains y avaient en effet installé un relais d’échange de chevaux. Le village produit un jambon renommé. On monte au col (2473 m.) dans un paysage désolé de plus en plus désert, au milieu de roches grisâtres. Un hôtel est dominé par la statue de Saint Bernard, sculptée en 1905 ; il est le patron des alpinistes. On franchit les douanes italienne et suisse, on longe le lac (le Lacus Poenus des Romains) et on arrive à l’Hospice. On relève aussi des restes d’un Temple romain et de « mansiones » du Ier siècle après J.C. Saint Bernard fonde l’hospice en 1050, lorsque le col sera débarrassé des attaques des Sarrasins grâce à l’évêque Hugo de Genève ; bientôt le col, appelé jusqu’alors Mons Jovis, prendra le nom de Grand-Saint-Bernard (Cf. ci-contre la statue de Saint Bernard au col). La dernière restauration de l’hospice remonte à 1825, il est géré maintenant par les Chanoines Réguliers de Saint Augustin qui gèrent aussi l’ensemble de Saint Ours à Aoste. Le col a toujours eu une grande importance stratégique, depuis les peuples qui ont précédé la conquête romaine (le col était contrôlé, d’après Tite Live, XXI, 32, par 2 tribus, les « Seduni » et les « Vegrari » et protégé par le dieu « Poeninus » (de « Pen » == sommet), qui laissa la place à un « Juppiter Summus Poeninus » qui donna le nom de « Mons Jovis » au moyen-âge. Le Musée de l’Hospice rappelle cette histoire ; dans l’église repose le corps de Sainte Faustine, martyre romaine du IIe-IIIe siècle (une des saintes Faustines...), dont Léon XII fait don aux moines en 1828.

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b) La vallée de la Valtelline (à partir d’Aoste)

C’est la vallée du Buthier de Valpelline, et du Buthier d’Ollomont. Ce parcours d’une trentaine de kms est intéressant pour ses paysages, qui offre de nombreuses excursions aux alpinistes en été et des pistes de ski en hiver. C’est aussi une vallée à connaître pour son passé historique, dont il reste quelques tours, à Valpelline et Oyace ; mais elle était déjà occupée par les Romains ; elle conserve aussi quelques traces des installations d’irrigation installées par les paysans dès le XIIIe siècle (« Ru » et pont-canal de Porossan, qui comporte un couloir inférieur pour l’écoulement de l’eau). Le village de Valpelline donne son nom à la vallée ; il fut inféodé aux seigneurs de Quart, puis aux La Tour de Valpelline, sous la seigneurie des Savoie ; son église paroissiale, Saint Pantaléon est de 1722 et contient un Musée d’Art Sacré. On y mange la « seupa à la valpelenentze » (bouillon de viande trempé de pain sec, de fontina et de choux bouillis).

De Valpelline, on peut remonter la vallée d’Ollomont parcourue par le torrent Buthier d’Ollomont. Elle est riche de mines de pyrite. La chapelle de Saint Pantaléon à Vaud a encore des fresques de 1443. Un peu plus haut, une excursion à la Fenêtre Durand permet de voir de nombreuses marmottes, des chamois et des bouquetins. C’était aussi un passage entre le Val d’Aoste et la Suisse, par lequel Calvin s’enfuit en Suisse après avoir été chassé par les habitants d’Aoste. On trouve dans toute cette vallée des maisons rustiques traditionnelles (Ci-contre, Ollomont).

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c) La Valtournenche et le Cervin (à partir de Châtillon)

La vallée (l’ancienne « vallis Tornenchia ») fut occupée par l’homme dès le IVe millénaire av. J.C. (une hache de cette époque est retrouvée sur le versant suisse du col de Teòdulo) ; des restes de l’âge du Bronze (IIe millénaire - début du Ier millénaire :gravures rupestres) et de l’âge du Fer (Ier millénaire av. J.C.) ont été retrouvés, ainsi que de nombreuses traces d’occupation romaine. Au Moyen-âge, la région fut inféodée aux Challand (qui y pratiquèrent le brigandage) jusqu’à ce que les Savoie reprenne le contrôle du fief en 1346 (Amédée VI, le Comte Vert). Pendant des siècles, la vallée fut une voie de communication avec la Suisse par le col de Teòdulo.

À la sortie de Châtillon, on passe près des mines de marbre (serpentine, de marbre vert) et on voit courir sur les versants les « ru », canalisations et aqueducs d’irrigation construits au moyen-âge. Le premier village est Antey-Saint-André (l’ « Anthesins » des Romains), ancien fief des seigneurs de Cly, doté d’une église paroissiale (Saint-André) créée au XIIe siècle et transformée par la suite, qui a un portail en pierre du gothique tardif. D’Antey, on peut monter à la station touristique d’été de La Magdeleine.

On monte à Torgnon, qui eut un développement important, grâce à une mine de fer qui permit au XVIIIe siècle la construction d’une fonderie, et qui explique la présence de population dès l’époque protohistorique. Elle appartint, comme Anthey, aux seigneurs de Cly. On a connaissance de son église paroissiale dès 1413 ; Saint-Martin fut ensuite refaite à l’époque baroque. On peut y voir encore d’anciens « rascards », greniers de paysans de la Renaissance (Cf. ci-contre, rascard du XVIe siècle). On arrive ensuite à Chamois, un des rares villages à n’avoir jamais construit de route d’accès, mais qu’on n’atteint que par un chemin muletier (« Les seingles » = en latin « cingula » = ceinture) ou un funiculaire. Là aussi, nombreux « rascards » bien conservés du fait de l’isolement de la commune.

On passe une petite centrale hydroélectrique et on arrive au chef-lieu de la vallée, Valtournenche, qui est un important centre touristique depuis les premières entreprises d’alpinisme dans le Cervin (c’est la patrie de Jean Antoine Carrel et on a disposé sur la place de nombreuses plaques commémoratives aux guides célèbres comme Georges Carrel et l’abbé Aimé Gorret). Le Cervin fut conquis en 1865. De la place on accède aussi au « rascard » d’Entrèves, restauré et site d’expositions. L’église paroissiale date de 1420, reconstruite en 1856La route continue, on passe près du gouffre de Busseraille, creusé par le torrent Marmore, une des marmites de géants de la vallée. Près d’un tunnel, on observe des filons de roches colorées vertes ou jaune-vert contenant des cristaux de roche. La route se termine à Breuil-Cervinia. Avant d’y arriver, on admire le Cervin reflété dans les eaux du Lac Bleu. Le village, autrefois petite agglomération de paysans, avec des maisons de bois et de pierre, est devenu, à partir du développement de l’alpinisme, un ensemble d’immeubles touristiques incohérent et sans plan ni recherche architecturale. On continue ensuite jusqu’au col de Teòdulo (3301 m.) qui fut un des grands points de passage vers le Valais

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d) Le Val d’Ayas à partir de Verrès

C’est la vallée du torrent Évançon (= « le torrent aux eaux claires »), appelé vallée de Challand dans la partie inférieure : ce fut pendant 4 siècles un fief des Challant, jusqu’en 1424 où le duc de Savoie les nomma comtes, dont le dernier descendant mourut en 1802 (Notons que le nom de Challant, que nous rencontrons souvent, viendrait de « Tsallan » (= « le pré autour de la maison, comme « chalet »). La partie supérieure a été colonisée par les allemands du Valais à partir du XIIIe siècle (les Walser), grâce aux passages vers la Suisse des cols des Cimes Blances et de Bettaforca.

En sortant de Verrès, on monte vers Isollaz, où on peut voir la cascade du torrent Evançon (chute de 50 mètres) et la Tour de Bonot ou des Signaux, puis on arrive à Challand Saint-Victor, dont on peut visiter l’église paroissiale de Saint-Victor, des XVe et XVIe siècles. Au-dessus du village, la chapelle de San Massimo conserve encore des fresques de Giacomino da Ivrea (1400-1469 ?), un peintre naïf, de style plus simple que ceux du Gothique International, mais qui eut beaucoup de commandes dans le Val d’Aoste et autour d’Ivrée. On continue à monter vers Challand Saint-Anselme, où on exploita une mine de pyrite et de cuivre, puis vers les ruines du château de Graines (Cf. les 2 photos ci-contre), construit par les moines de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaunes au XIe siècle, puis cédé aux Challand, abandonné au XVIIIe siècle et restauré par Alfred d’Andrade (1839-1915). Une légende raconte qu’il cacherait un trésor, gardé par une vache verte, que l’on ne pourrait rechercher que deux jours par an, le Vendredi Saint et le jour de la Saint-Jean...La partie supérieure de la vallée est devenue un site touristique qui a un peu gâté le paysage ancien, mais on peut encore y voir quelques maisons rurales (la Maison du sel de Brusson, Maison Fournier d’Antagnod) et résidences seigneuriales (Maison des Prieurs à Champoluc) du XVIe siècle et quelques chapelles anciennes. On atteint la commune d’Ayas, dispersée en de nombreux lieux d’habitation (Antagnod, Lignod, Champoluc, Saint-Jacques). Le territoire fut probablement occupé par les Salasses, mais on y trouve des traces de civilisation romaine (Antagnod = Ante lignum = avant la forêt). La conque d’Ayas est dominée par le Mont Rose, dit « la montagne mère », dont le nom ne vient pas de la couleur, même au coucher du soleil, mais du mot valdotain rouésa ou rouja qui signifie « le glacier » (en latin = rosia). Il culmine à 4634 mètres à la Pointe Dufour De nombreuses promenades et excursions sont possibles, été comme hiver, depuis la commune d’Ayas (Voir à gauche le col de San Teòdulo).

L’ascension du CervinLe Mont Cervin est un pic haut de 4478 mètres, symbole du relief alpin. Son nom latin était Mons Sivinus (ou Mons Silvus), devenu Mont Servin. C’est une parfaite pyramide à base quadrangulaire, avec 4 crêtes et 4 pentes. Le mont est resté inviolé jusqu’en 1857 : il était considéré comme « inaccessible ». C’est à cette date que des Valdotains, Aimé Gorret, Jean-Antoine et Jean-Jacques Carrel, commencent à penser à son ascension ; ils furent suivis par des Anglais guidés par John Tyndall (1820-1893) en 1862 ; il y eut ensuite de nombreuses tentatives non réussies. C’est seulement en 1865, après la réation du CAI (Club Alpino Italiano) en 1863 à Turin, que les Anglais Edward Whymper (1840-1911), Hawkins, Parker, l’Autrichien Thomas Stuart Kennedy (1841-1894) et les Valdotains Georges Carrel (1800-1870), chanoine en Valtournenche, et l’abbé Aimé Gorret (1836-1907) tentèrent à nouveau l’escalade. La première réussite fut celle du groupe de Whymper, le révérend Charles Hudson (1828-1865), le Docteur Douglas Robert Hadow, Lord Francis Douglas, le guide chamoniard Michel Croz et les deux Peter Taugwalder, par le versant suisse de la crête du nord-est. Au retour, 4 d’entre eux se tuèrent dans une chute de 400 m. suite à la rupture d’une corde (et d’une négligence de l’un d’entre eux ?). Deux jours après, les Italiens renouvelèrent l’exploit : Jean-Antoine Carrel, Jean-Baptiste Bich et Aimé Gorret (17 juillet 1865). En 1867, Jean-Noël Maquignaz ouvrira une voie plus rapide par la crête sud ouest. Les autres crêtes seront conquises peu à peu ; Walter Bonatti fera l’escalade en solitaire du 18 au 22 février 1965. En 1890, Jean-Antoine Carrel mourut d’épuisement pour sauver un client emmené au sommet du mont (Croix Carrel aux pieds du Cervin). Une autre arête du Cervin, le Zmut, fut gravie par Albert F. Mummery, Alexandre Burgenet, J. Petrus et A Gentinetta. L’un des alpinistes qui en réussit l’ascension fut Louis-Amédée de Savoie (1873-1933), duc des bruzzes, en 1893 ; au pied du Cervin, un refuge porte son nom, au-dessus de Breuil-Cervinia.

San Teòdulo (ou : Teodoro II)Il fut le premier évêque de Sion dans le Valais, entre le Ve et le VIe siècle. Le roi de Bourgogne Saint Sigismond (mort en 524) avait fait transférer à Sion, nouveau chef lieu du Valais, le siège du diocèse de Martigny. Teòdulo suggéra au roi, en 515, de construire l’abbaye de San Maurizio, à Agaune, en honneur des martyrs de la Légion Thébaine. La légende d’un miracle en a fait le protecteur des vignes et des vignerons, représenté avec une grappe dans chaque main.

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e) La vallée de Gressoney

C’est la dernière vallée de la rive gauche de la Doire, à partir de Pont-Saint-Martin, parcourue par le torrent du Lys (du nom romain Vallis Helia = vallée du soleil) qui prend sa source dans les glaciers du Mont Rose. Elle est moins dégradée que les autres vallées par les installations de grand tourisme. Elle est caractérisée par des différences ethniques importantes : groupes d’origine franco-provençale dans la partie basse (Lilianes, Fontanemore) et groupes d’origine allemande (les Walser, c’est-à-dire en allemand les gens du Valais, venus au XIIIe siècle) dans la partie centrale et haute (Issime, Gressoney) ; elle parle donc le « patois » franco-provençal en bas, le « töitschu » dans le centre et le « titsch » dans le nord. Le second et le troisième sont des variantes du dialecte allemand méridional, semblable au dialecte suisse allemand.

Cette pénétration de population allemande ne s’explique pas totalement, peut-être est-elle due à une surpopulation du Valais et aux avantages économiques donnés en Val d’Aoste par les moines de l’abbaye de Saint-Maurice qui eurent cette région en fief à cette époque.

Les habitations (Cf. ci-contre, maison de Gressoney) comportent des « stadel » (les « rascards » de la Val d’Ayas), « destinés à la conservation du fourrage et des provisions, soutenus par de petits piliers en bois ou en pierre, surmontés de dalles de pierre rondes et plates (les « funghi » = champignons) sur lesquelles reposent les poutres portantes ; cela avait pour fonction principale d’empêcher l’accès des rongeurs et de préserver l’entière récolte de l’humidité. Les habitations sont en pierre (la partie inférieure) et en bois, avec un rez-de-chaussée divisé en étable pour le bétail, cuisine et pièce d’habitation, et avec des étages supérieurs utilisés pour les chambres à coucher et, sous le toit, pour la conservation du foin et des denrées alimentaires. Elles sont dotées de balcons avec une charpente typique en bois, utilisée pour le séchage du seigle, de l’orge et du foin ; pour la couverture du toit, on utilise de larges pierres plates appelées « loses » que l’on dispose sur un poutrage en bois complexe » (Turin et Val d’Aoste, TCI et Biblioteca di Repubblica, 2005, p. 494).

On commence la remontée de la vallée et on arrive, après la conduite forcée d’une centrale hydroélectrique, à la Tour d’Héréraz, construction romaine, puis maison forte au Moyen-Âge transformée en église en 1878, ce qui fit de la tour un clocher. On passe ensuite à Lilianes (l’Insula Haeliana des Romains), avec son église paroissiale et son clocher des XVIe et XVIIe siècles, puis à Fontainemore (évangélisée par Saint Maure au VIe siècle), qui a un pont antérieur à 1300 (Cf. photo p. suiv.). Les maîtres maçons de Fontainemore se déplaçaient en Savoie, dans le duché d’Aoste ou à Turin, dans une émigration saisonnière. À l’entrée du site, fonctionne encore une belle fontaine, qui donne son nom au village. Au nord du village, la Lys creuse son lit dans l’« orrido » de Guillemore. On arrive à Issime (l’Axima des Romains), qui fut le siège du Tribunal. La façade de l’église San Giacomo Maggiore, du XIIIe siècle et reconstruite en 1683-84, est ornée d’un Jugement Dernier de 1698. Entre Issime et Gressoney qui sont de langue allemande, se trouve Gaby (de « gab » = le torrent), qui est de culture et de langue franco-provençales, ancien fief des Vallaise ; on y voit encore quelques maisons anciennes (maison Albert de 1676, Palatz à 5 étages de 1632) ; les cascades de Niel comportent 4 chutes d’eau et ont un grand charme ; le sanctuaire de la Vierge des Grâces est de 1714-18, elle a des fresques de Joseph Franz Curta (1827-1881), Mystères du Rosaire et Via Crucis.

On entre ensuite dans la plaine de Gressoney, où on passe d’abord au Castel Savoia (Cf. photo ci-contre), édifié en pierre locale, en style néo-gothique, pour la reine Marguerite de 1900 à 1904, sur projet de l’ingénieur Emilio Stramucci en 1899. Il sert aujourd’hui de lieu d’exposition et de concert ; à côté a été installé en 1990 un jardin alpin qui comprend un millier de plantes alpines. Puis on arrive à Gressoney-Saint-Jean, dans un paysage de conifères et de prés, avec ses maisons caractéristiques autour de l’église San Giovanni Battista (Cf. Photo ci-dessous à droite), construite en 1515, instituée en paroisse en 1660 et rehaussée au début du XVIIIe siècle, avec un clocher plus ancien que l’église. Les maisons (Cf. photo ci-contre) sont à visiter : Maison du Gabelou (1626), Maison de l’écrivain (1806) et plusieurs autres, éparses. On peut visiter aussi la Villa Marguerite (qui tient son nom du séjour de la reine de 1889 à 1903) construite en 1888 pour la famille du baron Anton Beck Peccoz, aujourd’hui siège de la Mairie de Gressoney. Le village fut habité à partir du XIIIe siècle par des allemands du Valais invités à venir s’installer dans cette région alors déserte par les moines de l’abbaye de Saint Maurice, en échange de franchises importantes, dont la liberté du commerce. Un peu plus haut, on arrive à Gressoney-la-Trinité, l’ancienne Treia de Grexoneto du XIIe siècle, signifiant peut-être le croisement de trois voies pour la vallée centrale, pour le Val d’Ayas et pour la Valsesia en Piémont. Le village est un peu dégradé aujourd’hui par les grandes implantations touristiques.

Le Mont Rose fut gravi pour la première fois par le médecin Pietro Giordani en 1801, après l’ascension des glaciers du Lys à 4000 mètres en 1778 par un groupe d’habitants. La pointe qu’atteint Giordani (4046 m.) prend son nom. En 1819-1820, deux autres expéditions (Jean Nicolas Vincent, Joseph Vincent et Joseph Zumstein) atteignent la première pointe Vincent (4215 m.) et la pointe Zumstein (4563 m.). En 1842, le père don Giovanni Gnifetti, curé d’Alagna, atteint 4559 mètres (Pointe Gnifetti), et en 1855 une expédition, guidée par l’anglais Hudson, atteint enfin la Pointe Dufour (4634 m.).Un funiculaire relie les pistes de Gressoney et Champoluc avec Alagna Valsesia, de l’autre côté de la montagne, au Piémont

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B – Sur la rive droite de la Doire Baltée

a) La vallée de la Valgrisenche

Elle commence à Liverogne où la Doire de Valgrisenche se jette dans la Doire Baltée. Elle fut toujours étroitement contrôlée par les seigneurs d’Avise, sous l’autorité des Savoie, car c’était un passage possible pour Chambéry par le col du Mont (2639 m.) qui communiquait avec la Tarentaise. Elle avait aussi d’étroits contacts avec la vallée de Rhêmes et par là avec la Valsavarenche.

On passe à Rochefort le sanctuaire, d’où on a un beau panorama sur la vallée et le premier village est Planaval, dominé par les ruines du château de Montmayeur et par la maison forte érigée par les Avise en 1312, et où on trouve encore quelques maisons rurales anciennes de qualité. On monte ensuite jusqu’à Valgrisenche, chef-lieu de la vallée, dans son bassin de prés et de forêts. Sur la petite place, église de Saint Grat, avec son clocher roman de 1398 et son petit musée d’art sacré ; elle remplace l’ancienne église construite en 1392. Le habitants pratiquent encore le tissage du « drap », un tissu rustique de laine de brebis, fait sur les anciens métiers à tisser, qu’on peut voir dans un salle d’exposition de la Coopérative, ouvert en 2009.La vallée est ensuite fermée par la digue du lac de Beauregard, réservoir de la Centrale créée en 1967 qui alimente la centrale d’Avise. On peut monter ensuite jusqu’à Bonne, Surier et le refuge Bezzi et faire une excursion au col du Mont.

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b) La vallée de Rhêmes

C’est la vallée de la Doire de Rhêmes qui débouche à Villeneuve, avant Aoste, c’est une des vallées qui parcourent le Parc National du Grand Paradis. « Bien peu de vallées offrent un tel silence poétique, une semblable intimité de haute montagne habitée, et un sens pastoral si marqué » (Turin et Val d’Aoste, TCI, op. cit., p. 629). Un développement touristique bien contrôlé a permis de ne pas dégrader les villages anciens et les paysages naturels. On arrive d’abord à Introd (= entre eaux, entre la Doire de Rhêmes et le torrent Savara), village déjà connu au néolithique ; il est dominé par son château (Cf. photo ci-contre), dont le donjon existait déjà en 1244, quand Guillaume Sarriod d’Introd eut l’autorisation de le couvrir de créneaux carrés, mais il remonte probablement au XIIe siècle ; il prend au XVe siècle une forme polygonale presque arrondie ; après les restaurations de 1912-15, il ne reste de l’ancienne structure que la tour, l’ancienne cuisine et 17 mètres de mur extérieur. Près du château, on visitera aussi l’Ola, ancienne construction rurale du XVe siècle destinée à emmagasiner les produits agricoles et à abriter les animaux. L’église paroissiale est ancienne, mais refaite en 1686, date de son autel baroque. Les deux ponts sont de 1827 et de 1915, ils ont remplacé l’ancien pont en bois.Le village suivant est Rhêmes-Saint-Georges, un des villages les plus anciens, puis Melignon et Rhêmes-Notre-Dame (Cf. Photo ci-contre) ; villages agricoles, ils s’orientent de plus en plus vers l’agriculture biologique. Chaque année a lieu une fête du sanglier.C’est un des points de départ importants des promenades dans le Parc du Grand Paradis. Au bout de la route, un sentier monte jusqu’au refuge Benevolo (2285 m.).

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c) La vallée de Valsavarenche

Sur le torrent Savara, on est là au coeur du Parc du Grand Paradis. Au Moyen-Âge, la région appartenait aux Chatel-Argent, puis aux Sarriod d’Introd, toujous sous le contrôle des Savoie. Ce fut un site de chasse privilégié des rois de Savoie puis d’Italie, à partir de 1850.Le Parc National du Grand Paradis a été créé en 1922, sous la poussée de Benedetto Croce, alors Ministre de l’Instruction Publique, à cheval sur la vallée d’Aoste et le Piémont ; son altitude va de 800 à 4061 mètres ; son amorce fut la réserve de bouquetins, menacés de disparition, que le roi Victor-Emmanuel II créa en 1856 ; il comporte de nombreux petits lacs et plus de 60 glaciers. La végétation est de mélèzes, de sapins rouges et de sapins blancs, de pins sylvestres, d’aunes, de rhododendrons, de genévriers, de genépis, et beaucoup de plantes rares propres à la vallée. Outre les chamois et les bouquetins - l’animal symbole de la région -, la faune présente des marmottes, des lièvres, des lynx, des renards, des blaireaux, des martres, des hermines, des écureuils, et de nombreuses espèces d’oiseaux (aigle royal, gypaète barbu, perdrix blanches, faisans, bartavelles, chouettes, pics noirs et rouges, hirondelles de montagne, martinets, rouges-queues, pinsons, corbeaux, becfigues, grives, roitelets, bouvreuils ...). On a déjà signalé le Pont-aqueduc romain (Cf. Histoire). À Valsavarenche, on verra l’église, avec son clocher de 1483 et sa Collection d’Art sacré ; on peut atteindre le Col du Nivolet qui permet de communiquer avec le Piémont.



d) La vallée de Cogne

Parcourue par le torrent Grand’Eyvia, elle est un des trois accès valdotains au Parc National du Grand Paradis. Ses premiers habitants furent probablement des bergers salasses, en contact avec le Piémont, avec lequel communiquent encore plusieurs cols, plus qu’avec la Doire Baltée (la route de Cogne n’est ouverte qu’en 1917). Du XIe siècle jusqu’en 1780, la vallée fut sous la juridiction des évêques d’Aoste ; elle avait des mines d’argent et de sulfure de plomb et zinc, déjà exploitées en 1150, tandis que les mines de fer ne sont ouvertes que vers 1433 (même si elles furent déjà actives dans l’antiquité). Les habitants de Cogne se révoltèrent à plusieurs reprises contre les évêques d’Aoste à propos des droits sur les mines : en 1363, puis en 1641, date après laquelle les évêques durent abandonner tous leurs droits, laissant les mines sans capitaux et donc à l’abandon jusqu’à l’intervention d’un médecin jacobin, Cesare Emanuele Grappein (1772- 1855) qui fit ouvrir en 1824 une route de Cogne à Vieyès et qui organisa une gestion collective des mines qui apporta beaucoup de bien-être aux habitants. Après sa mort, il y eut une période de crise, le contrat de gestion ayant été révoqué, et c’est seulement en 1903 que le belge Afred Theys fonda une nouvelle société, construisit un téléphérique pour le transport des minerais et modernisa l’exploitation. En 1915, l’Ansaldo de Gênes rachète les mines, crée un système de sidérurgie intégrée, et construit la route carrossable de Vieyès à Aymavilles et un chemin de fer électrique, en même temps qu’il utilise pour la production les ressources hydriques. Dans les années 30 du XXe siècle, la Société fit construire un quartier industriel de production et d’habitation à Cogne, qui fournit la meilleure production d’Italie en matières fines (magnétite privée de soufre et de phosphore) jusqu’à ce que la crise s’amorce en 1965 et que les mines ferment en 1979. Cela donne à Cogne une expérience de vie industrielle et de luttes ouvrières exceptionnelle en Val d’Aoste.

Après Aymavilles (voir Histoire), on passe à Ozein et on arrive à Cogne, après Vieyès et Épinel. Cogne est aujourd’hui un centre de sports d’hiver, mais qui a gardé quelques activités traditionnelles comme la fabrique de dentelles.L’église paroissiale de Saint-Ours était déjà connue en 1202, mais elle est reconstruite en 1642, avec 5 autels baroques. À côté de l’église se trouve la maison forte appelée Castello Reale (Cf. photo ci-contre) édifiée en 1191, restructurée et qui fut résidence de chasse de Victor-Emmanuel II. On peut parcourir les étapes de l’histoire industrielle de Cogne en visitant le Museo Minerario alpino dans l’ancien village des mineurs, fondé en 1990.Le patron de Cogne est San Besso, martyr de la fin du IIIe ou début du IVe siècle, qui aurait été un des survivants des 6600 soldats de la légion Thébaine, fusillés par l’empereur Maximien pour avoir refusé d’adorer les divinités païennes. Selon certaines traditions, il se serait réfugié à Cogne où les légionnaires romains l’auraient massacré en le précipitant de la grande roche du mont Futerio (Cf. photo à gauche) qui porte son nom et que l’on peut atteindre de Cogne par le col della Valletta. Cette roche était probablement honorée dans des rites très antérieurs au christianisme : on adorait des morceaux de pierre qui, disait-on, facilitait la fécondité. Il est le protecteur des soldats contre les dangers de la guerre.À la sortie de Cogne, une petite route conduit à Gimilian où se trouve la chapelle de Tarabouq consacrée à Saint Bernard. Si on continue vers Valnontey, on visitera le Jardin alpin Paradisia, créé en 1955, qui a maintenant une extension de 10.000 mètres, et qui comprend 1500 espèces de plantes des Alpes et du Grand Paradis.

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e) La vallée de Champorcher (Cf. carte ci-dessus)

Une dernière petite vallée débouche dans la Doire Baltée au niveau du Fort de Bard. Elle est parcourue par le torrent Ayasse. Elle tient son nom des porcs qu’on y élevait au Moyen-Âge à l’état sauvage, du fait de l’abondance des chênes et des hêtres qui disparaissent au XVIe siècle du fait de l’abaissement de la température. Le nom pourrait aussi se rapporter à San Porciero (ou San Porzio), compagnon de San Besso. Son premier village est Hône, où l’on a retrouvé des pierres de l’âge du Bronze et de l’âge du Fer, mais rien de l’époque romaine. Au Moyen-Âge, comme toute la vallée, Hône appartenait aux seigneurs de Bard, vassaux des Vallaise et des Savoie. Longtemps marginalisé, le village a cependant développé une fabrique de clous qui eut un rôle important pendant la première guerre mondiale pour la fabrication des chaussures militaires. Le village suivant est Pontboset, ancien village rural, où l’on peut voir encore beaucoup d’édifices ruraux anciens. On passe ensuite à Dogier, riche de quelques « rascards » anciens, puis à Salleret, qui conserve une petite chapelle de 1733 dont la façade est peinte de fresques de la Vierge et des Saints, puis à Mellier, enfin à Champorcher (Cf. photo à gauche), peut-être ancien site des Salasses, qui conserve la tour de son château (Cf. photo ci-contre) et une église ancienne, San Nicolò, de 1176, remaniée plus tard. Derrière l’église, il y a un beau groupe de « rascards ». Si on monte à Chandonney, on retrouvera le travail traditionnel du chanvre. Plus haut, on sera impressionné par le lac Miserin, et sur ses rives, le sanctuaire de la Vierge des Neiges, érigée en 1880 par la population de Champorcher sur un ancien édifice édifié après la peste de 1630. Encore plus haut, on peut monter à la Fenêtre de Champorcher, un col à 2826 mètres qui communique avec la vallée de Cogne, sur un sentier inter vallées qui fut très fréquenté dès le Moyen-Âge.Voilà donc quelques éléments d’histoire et de géographie pour commencer à connaître le Val d’Aoste et à y entreprendre des voyages. Pour ma part, je n’avais qu’une connaissance superficielle de la Région, que j’utilisais, comme beaucoup d’autres, pour descendre ailleurs, au Piémont et plus loin, par le tunnel du Mont Blanc. Je m’étais arrêté à Aoste et dans quelques châteaux, j’étais passé dans quelques vallées latérales, dont celle du Grand-Saint-Bernard (autre voie de communication !). Maintenant, après plusieurs semaines de travail intense sur la Vallée, je suis frappé et séduit par sa richesse humaine et artistique, par son architecture, – ses « rascards » rustiques comme ses châteaux –, et un de mes voeux serait d’aller explorer plus à fond cette région. À défaut de pouvoir maintenant le faire moi-même, je ne peux qu’inviter nos lecteurs à voyager dans le Val d’Aoste, à y passer des vacances (comme le faisaient les rois et reines d’Italie ou les papes !), à y faire de l’alpinisme, ou simplement à s’y arrêter un moment pour méditer devant les paysages splendides et émouvants que nous offre la montagne.Quelques livres cités dans « Histoire » vous aideront à mieux connaître, donc à augmenter votre plaisir. J.G. 26 mars 2011, revu le 15 juin 2015