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Nouvelles de ces derniers temps : édition du 15 juin 2017
Nouvelles de ces derniers temps, 15 juin 2017 1) Vous n’avez sans doute pas oublié de fêter le 2 juin la Fête Nationale de l’Italie. Comme chaque année, le Président de la République, Sergio Mattarella, a rappelé «  que les valeurs qui avaient uni l’Italie le 2 juin 1946 continuent à nous guider  »  : «  réaliser le même désir que nos pères  : donner aux générations futures une Italie en paix, prospère et solidaire, mais aussi en mesure d’assumer un rôle autorisé et de promotopnsà l’intérieur de cette communauté internationale que nous avons contribué à édifier  ». Si c’était la réalité…  ! Il a aussi rendu hommage aux hommes et aux femmes des forces armées, en particulier à «  ceux qui sont tombés sur le chemin de notre pays vers la liberté et la démocratie  ». Il a aussi porté une attention plus soutenue aux populations touchées par les tremblements de terre et aux forces qui leur ont prêté secours  ; les Maires de 400 Communes ont ouvert le rassemblement qui s’est tenu pour les victimes  des tremblements de terre. En tête des maires, on notait la présence de la Maire de Roma, Virginia Raggi. C’est Andrea Bocelli qui a chanté l’Hymne National Italien. Quelques maires de la Ligue du Nord ont refusé de participer à ce rassemblement unitaire, souvent désavoués par leurs administrés. D’autre part , une autre manifestation pacifiste était organisée par le Groupe mixte des «  Parlementaires pour la Paix  », dans les jardins de Castel Sant’Angelo, sous le mot d’ordre «  Nous défendons l’humanité, pas les frontières  ». En faisant un défilé sans forces militaires, ils veulent exprimer leur volonté de lutter contre la guerre. Le Groupe s’est formé il y a 4 ans, et il a recueilli environ une centaine de signatures de parlementaires de divers groupes, … Mais seulement 2 parlementaires ont participé à ce défilé non armé et non violent  ! C’était pourtant un défilé important d’associations pour la paix qui proposent de convertir les crédits militaires en crédit civils et solidaires, comme l’aide aux ONG qui travaillent au sauvetage des migrants en mer Méditerranée, actuellement fortement attaquées par plusieurs magistrats et organismes d’extrême droite. Les crédits militaires italiens représentent une somme de 23,3 milliards d’euros dont 5,5 pour l’achat d’armes nouvelles, alors que 5000 migrants sont morts en Méditerranée pour échapper à la guerre et à la misère. C’est pourquoi il y a deux défilés pour la fête nationale du pays. Les êtres humains auraient-ils besoin de guerre pour être «  heureux  »  ? Quelle belle conception du «  bonheur  »  ! 2) Les humains sont aussi motivés par la peur  : on ne sait pour quelle raison, le 4 juin dernier, la panique a pris les spectateurs d’une retransmission sportive sur grand écran place San Carlo à Turin, probablement  un pétard qui a fait craindre un attentat terroriste. Le résultat est qu’il y a eu 1527 blessés dont plusieurs graves. On a peur, on fuit, on se piétine, les plus faibles sont écrasés  : voilà ce que signifie vivre dans la peur. Cela a été pour le PD une nouvelle occasion d’attaquer Chiara Appendino, maire de Turin … qui n’y était pour rien. 3) Et voilà un grand spectacle pour réagir contre tous ces côtés négatifs de l’humanité  : à Ravenne une grande mise en scène théâtrale de la Divine Comédie de Dante, l’Enfer en 2017, le Purgatoire en 2019 et le Paradis en 2021, sur les places, dans les rues, devant les monuments de Ravenne (où, rappelons-le, se trouve le tombeau de Dante, mort en 1321). Le spectacle a été commandé par Ravenne Festival  et il est réalisé par le Théâtre delle Albe, une compagnie de Ravenne qui a déjà produit de nombreux spectacles dramatiques dans des espaces non théâtraux, et dont les fondateurs sont Ermanna Montanari et Marco Martinelli. Commencé le 17 juin, le spectacle durera jusqu’au 3 juillet. Les organisateurs ont fait un appel public et plus de 700 citoyens, dont certains de Bologne, se sont inscrits pour jouer les rôles des damnés  ; ils défileront avec les acteurs du théâtre pour donner voix et corps aux personnages de l’Enfer, Paolo et Francesca, Ciacco, Farinata degli Uberti, Pier delle Vigne, Brunetto Latini, Malacoda et Alichino, Vanni Fucci, Ulysse, le comte Ugolino (un bon point à qui saura les identifier  !). Ermanna et Marco interpréteront alternativement Virgile, tandis que Dante sera incarné par 80 spectateurs à la fois, protagonistes du voyage de la Comédie. Le comédien dit que «  Dante sait que pour sortir du mal, il faut la fatigue des pieds, parcourir un chemin, et c’est ce qui nous a inspiré le spectacle  ». Celui-ci part de trois mots «  vie, obscure, égarée  » (vita, oscura, smarrita) tirés des premiers vers du poème, qui sont inscrits sur la tombe de Dante, et les acteurs défilent dans leurs parcours ravennate en récitant les textes de Dante en alternance avec d’autres textes de James Joyce, Simone Weil, Pier Paolo Pasolini, Ezra Pound. Le défilé se terminera au Théâtre Rasi. Ce sera, dit Martinelli, une représentation de notre situation  : «  Au XXe siècle, nous avons expérimenté tant de variantes de ces forêts obscures que nous pouvons comprendre qu’on ne se sauve pas tout seul, mais ensemble  ». Alors relisez la Divine Comédie, c’est encore une grande expression de la réalité d‘aujourd’hui  : «  Nel mezzo del cammin di nostra vita                                 Au milieu du chemin de notre vie Mi ritrovai in una selva oscura                                              je me retrouvai dans une forêt obscure Chè la diritta via era smarrita  »                                           car j’avais égaré la voie droite. Et espérons que Dante sera mieux représenté que dans le spectacle donné par Romeo Castellucci à Avignon en 2008  ! (Nombreuses traductions disponibles, dont celles de Jacqueline Risset et celle d’Alain Delorme). 4) Un statut étrange des aumôniers militaires italiens. Le numéro d’avril-mai de la revue RADICI reprend le vieux problème du statut des aumôniers militaires italiens  : ils sont à la fois prêtres et officiers de l’armée italienne en vertu d’une loi de 1961. Est-ce normal  ? Cela ressemble au statut médiéval des évêques, à la fois seigneurs féodaux et donc contrôlés par l’empereur, et prêtres nommés par le pape  : ce fut un des grands conflits du Moyen-Âge. Rappelons que «  l’Ordinariat Militaire pour l’Italie  » est une «  circonscription personnelle  » de l’Église Catholique, une Église particulière assimilée à un diocèse et dirigée par un archevêque, actuellement l’archevêque Santo Marcianò depuis le 10 octobre 2013, qui a le grade de Général de corps d’armée. Lors de l’Unité italienne, les aumôniers militaires furent supprimés totalement à partir de 1878  ; c’est le Général Cadorna qui les réintroduisit en 1915 avant l’entrée en guerre de l’Italie et qui fit des aumôniers des lieutenants de l’armée, tandis que l’évêque qui était à leur tête eut le grade de Major Général  ; il y en avait 2738 en 1918. Le fascisme supprima à nouveau l’aumônier militaire, mais en 1925 fut créé «  l’Ordinariat militaire pour l’Italie  », repris par la République de façon définitive par la loi n° 512 du 1er juin 1961. Le pape Jean-Paul II l’a assimilé en 1986 à un diocèse ayant la possibilité d’avoir un séminaire. Les aumôniers militaires sont donc assimilés aux officiers, soumis en tant que tels à la discipline militaire et à l’obéissance à leurs supérieurs. C’est le gouvernement italien qui nomme l’évêque responsable, en accord avec le Saint-Siège. Selon sa fonction ,  l’aumônier a un grade qui va de lieutenant à général  ; la loi précise sa discipline, son uniforme, ses galons distinctifs, son salaire, qui va de plus de 2000 euros (deux mille) par mois pour un lieutenant à plus de 5000 pour un colonel, et 9545 euros pour l’archevêque Santo Marianò, plus le 13e mois  ! L’État paie aussi les retraites des aumôniers, et une messe dite après 16h30 est considérée comme travail en heure supplémentaire. Précisons qu’en moyenne un curé de paroisse de campagne gagne environ 1000 euros par mois. Pour les actuels 205 aumôniers militaires, l’État a dépensé en 2015 une somme de plus de 10 millions d’euros, et l’assistance «  spirituelle  » aux forces armées coûte chaque année plus de 20 millions aux contribuables italiens. Le Vatican parle de temps en temps de rectifier ce statut qui n’a rien à voir avec la foi chrétienne et la vie évangélique, mais tout continue comme avant. RADICI pose alors la question  : «  Ces aumôniers sont-ils des soldats de Dieu ou des soldats de la nation  ? Un jour ou l’autre il faut choisir, parce qu’il y a entre les deux une nette antithèse  ». Même la Constitution italienne précise que «  l’Italie répudie a guerre  ». Ici c’est simplement la logique de la laïcité qui rend très bizarre ce statut privilégié de certains prêtres, qui deviennent serviteurs de l’État plus que de l’Église. Autre forme de cléricalisme de l’État italien, que viendrait confirmer la loi fiscale du 0,8/1000  ! On sous-estime trop l’influence de l’Église dans la Vie italienne. 5) Élections municipales 11 juin 2017 (Voir notre dossier sur les électiond municipales de 2016) Le même jour que nous un certain nombre de localités italiennes renouvelaient leur municipalité  : 25 chefs-lieux de province, dont six villes de plus de 100.000 habitants, 168 communes  ; il y a 107 ballottages, 28 élus de centre gauche, 20 de listes «  civiques  » (souvent des candidats politiques qui ont caché leur appartenance), 11 de centre droit, et 2 de droite dure. Les résultats sont encore incertains et il faut généralement attendre le 25 juin pour avoir des résultats définitifs. Les votants sont au nombre d’environ 60% sur l’ensemble du territoire. À Palerme, est élu Leoluca Orlando, avec 46,28% (la loi sicilienne établit depuis 2016 qu’il suffit de 40% des voix pour être élu, loi anti Leoluca Orlando qui a raté son coup  !), soutenu par tout le centre gauche  ; vient ensuite Fabrizio Ferrandelli, du centre droit, avec 31,19% et enfin Salvatore Fiorello du M5S  avec 16,27%, un échec un peu inattendu mais malgré tout prévisible à cause des malversations dont le M5S sicilien vient d’être accusé dans une forte proportion. À Gênes, c’est le centre droit Marco Bucci qui est premier avec 38,80%, suivi du centre gauche Giovanni Crivello avec 33,39%, et du M5S Luca Pirondini avec 18,07%. Des dissensions internes au M5S ont affaibli le candidat qui n’avait pas été choisi par les militants de la ville. À Vérone c’est aussi le centre droit Federico Sboarina qui arrive en tête avec 29,26%, devant une candidate indépendante et le centre gauche pas très loin derrière lui. À Tarente, l’emporte une «  indépendante  » avec 22, 27% devant le centre gauche qui obtient 17, 92%. Le centre droit est en tête aussi à Padoue, tandis qu’à Parme, c’est encore le Maire sortant, Federico Pizzarotti, ex-M5S et aujourd’hui sans étiquette qui l’emporte avec 34,78% devant le centre gauche, 32,73 et le centre droit, 19,27%. À Monza et à Lucques, le centre gauche est en tête à peu de distance du centre droit, qui l’emporte au contraire à Lecce, à Piacenza, à La Spezia, à Catanzaro, à Côme, à Asti, à Rieti, à Frosinone, à Oristano, à Gorizia, tandis que le centre gauche l’emporte à Alessandria, à Pistoia, à L’Aquila, à Cuneo, à Lodi. Dans les Abruzzes, en Basilicata, en Campanie,  ce sont le centre gauche ou des listes «  indépendantes  » qui l’emportent. En Émilie, région traditionnellement rouge, dans le  Frioul, le Latium, et presque partout ailleurs, les résultats sont partagés. Il faut attendre le 25 juin. Notons que le Monde annonce simplement le 13 juin la «  défaite  » du M5S en ne parlant que de la ville de Gênes  ! Et le 14 juin, il insiste encore sur «  l’échec  » du M5S  : une obsession de beaucoup de médias  ! Et remarquons qu’à Lampedusa, la grande maire que fut Giusy Nicolini (photo ci-dessus), premier Prix UNESCO pour la Paix, a été battue par «  Totò  » Salvatore Martello, ancien maire jusqu’en 2001. Le nouveau maire, du PD comme l’ancienne mais soutenu par Renzi, va sans doute limiter le nombre de migrants accueillis à Lampedusa. 6) Les Italiens n’ont toujours pas de loi électorale  : On pensait que les partis politiques s’étaient mis d’accord sur un texte de loi électorale, en mettant au vote un projet appelé le «   Fianum  », du nom du député qui le présentait, Emanuele Fiano. Renzi s’était rapproché de Berlusconi, selon son vieux projet, et il semblait accepter une discussion avec le Mouvement 5 Étoiles sur un projet où il aurait renoncé à ce qu’il proposait dans son referendum perdu de décembre 2016. En effet le projet présenté à la Chambre proposait pour la première fois un système identique pour les deux chambres, proche de celui qui avait fonctionné pour le Sénat de 1948 à 1992. C’était un système proportionnel avec un seuil de 5% pour obtenir des élus. Ils s’étaient mis d’accord sur d’autres points dont l’organisation des collèges électoraux, mais sur la base de la démographie de 1991 (et non du dernier recensement comme le veut la loi), dépassée aujourd’hui, ce qui faisait dire à l’opposition que ce serait inconstitutionnel. Mais des incidents ont éclaté le 8 juin à propos du vote d’un amendement sur la loi dans le Trentin-Haut Adige, et l’accord entre les partis  est tombé à l’eau. Le vote sur l’amendement et l’incident technique n’ont été que des prétextes pour ne pas approuver un texte qui déplaisait profondément à beaucoup de groupes, en particulier aux représentant des petits partis qui auraient été éliminés par le seuil des 5%. Tout est à recommencer, et de toute façon, personne ne veut d’élections avant octobre 2017, car cela diminuerait le montant de la retraite des élus. 7) À Rome, Virginia Raggi contre le Ministre des Biens culturels. La Maire de Rome a fait appel au Tribunal Administratif Régional (TAR) contre la décision du MIBACT (Ministero dei beni e delle attività culturali e del turismo) de s’occuper seul du projet de Parc Archéologique du Colisée, qui apporterait des dommages aux habitants de Rome, pour des raisons financières (30% seulement des 40 millions qui rentreraient dans les caisses du Ministère reviendraient à la Commune) et locales (Virginia Raggi dit qu’elle n’acepte pas de voir ainsi les décisions tomber d’en haut sans consultation avec les pouvoirs locaux, en particulier pour la nomination du futur directeur du Parc). Une autre raison, dont on parle moins, est sans doute que le Parc obligerait peut-être à fermer à la circulation l’axe central de la rue des Forums Impériaux, dont on voit mal comment se passer, en particulier dans la situation actuelle où tous les camions des chantiers publics doivent y passer. Les zones qui seraient sous l’emprise du Parc incluraient le Colisée, les Forums, le Palatin, la Maison Dorée de Néron et le Colle Oppio, actuellement gérés par la Surintendance aux Beaux Arts et au paysage de la commune de Rome, et par la Surintendance du Colisée. Ceux-ci gèrent actuellement la totalité des monuments inclus dans la Muraille d’Aurélien, alors que le Parc ne gèrerait que la partie du Colisée et créerait donc une zone A et une zone B dans la gestion du patrimoine romain, chose inacceptacle pour la Commune. Le TAR a accepté la demande de la Maire, considérant que la décision ministérielle comportait un «  excès de pouvoir  », et il a bloqué les travaux du Parc, combattus aussi par quelques élus du Parti Démocratique et par plusieurs syndicats. Le Ministre a déclaré vouloir faire appel au Conseil d’État. C’est un nouvel arrêt aux décisions de Dario Franceschini et du gouvernement Renzi/Gentiloni  : déjà dans les semaines précédentes, les juges avaient bloqué la nomination de 5 directeurs des super-musées recrutés par Franceschini  : le Palais Ducal de Mantoue, la Galleria Estense de Modène, les Muséees Archéologiques nationaux de Tarente, Naples et Reggio Calabria. Le seul objectif de Franceschini est en effet de faire rentrer plus d’argent, sans se soucier trop du point de vue des locaux, de la globalité de l’histoire de Rome et des intérêts de la population. Pour cela, il faut centraliser. Attendons les résultats de la polémique, qui est aussi pour les amis de Renzi une façon de combattre le pouvoir du M5S que représente à Rome Virginia Raggi. 8) Quelques lectures nouvelles et passionnantes. * Élisabeth Crouzet-Pavan, La mort lente de Torcello. Histoire d’une cité disparue, Albin Michel, 2017, 494 pages. L’auteur a déjà publié plusieurs ouvrages sur l’Italie et Venise au Moyen-Âge et à la Renaissance, et celui-ci, reprise plus riche d’une publication de 1995, est particulièrement nouveau sur cet îlot de la Lagune, presque désert et que l’on va visiter aujourd’hui pendant une demi-journée pour sa cathédrale, sa célèbre mosaïque, son baptistère,  et son paysage calme, doté d’un seul hôtel (où vint se réfugier Hemingway à la recherche de tranquillité). Or ce fut le lieu le plus important de la Lagune, à partir du VIe siècle, à une époque où l’on parlait encore des Venetiae, les Venises, quand l’archipel du Rialto n’était pas encore devenu la Venise dominante, destructrice des autres îles  ; et aujourd’hui, l’historiographie a tendance à oublier ces commencements de la ville, aux dépens d’une pensée qui permette de sauvegarder l’avenir de la lagune. D’où le grand intérêt de cette recherche, basée en particulier sur l’étude de dizaines de cartons d’archives de l’Archivio di Stato du Campo dei Frari. Le livre raconte la disparition progressive de Torcello, à mesure que grandit la puissance dominatrice de la «  capitale  » du Rialto, l’exil des habitants, «  histoire d’une mort lente  » jusqu’à la réalité «  touristique  » d’aujourd’hui. La lecture est aisée et agréable, le livre est bien écrit et on suit le cours de cette histoire à la fois avec plaisir et tristesse, en découvrant cet aspect, généralement méconnu par les historiens officiels, de l’histoire de Venise et de sa construction progressive. On regrette un peu de n’avoir que deux cartes comme illustration (ci-dessus le Pont du Diable, restauré). * Mary Beard, S.P.Q.R., Histoire de l’ancienne Rome, Perrin, 2017, 592 pages (traduit de l’anglais). «  C'est une chose importante que la Rome antique. Ignorer les Romains, ce n'est pas seulement fermer les yeux sur le passé lointain. Aujourd'hui encore, Rome nous aide à définir notre rapport au monde et à penser ce que nous sommes, depuis les hautes sphères de la théorie jusqu'à la comédie populaire. Deux mille ans plus tard, elle continue de soutenir l'édifice de la culture et de la politique occidentales, de façonner ce que nous écrivons, notre vision du monde et la place que nous y occupons  »  : ce sont les premières phrases du prologue, et elles rendent déjà compte de l’intérêt et de la force du livre  ; ces mille ans d’histoire de Rome disent aussi nos problèmes d’aujourd’hui. Certes, dira-t-elle pour finir, nous n’avons pas besoin de connaître les difficultés éprouvées par les légions romaines dans leur travail de conquête pour comprendre les raisons de l’échec de nos interventions au Proche-Orient, et on ne pourrait pas appliquer les recettes de la «  République  » romaine (ou de la grecque) pour réaliser la nôtre  ; mais nous avons beaucoup de choses à apprendre sur nous-mêmes et sur notre passé en apprenant à connaître l’histoire romaine. En effet, «  depuis la Renaissance au moins, nombre de nos conceptions du pouvoir, de la citoyenneté, de la responsabilité, de la violence politique, de l’empire du luxe et de la beauté, ont été formées et éprouvées  dans un dialogue avec les Romains et leurs écrits  » (p. 543). Ce livre est donc important, souvent nouveau (même si l’on peut trouver que dans la première partie, sur l’origine de Rome, elle ne tient pas assez clairement compte des découvertes archéologiques des années 1980) et d’une ampleur exceptionnelle dans le récit de ces mille ans d’histoire, dans ce dialogue avec le Sénat et le peuple, «  Senatus PopulusQue Romanus  ». Le texte est complété de notes, d’une longue bibliographie et d’une centaine d’illustrations dont quelques-unes en couleurs (Ci-contre la colonne de Marc-Aurèle). Lisez-le, non seulement il vous apprendra des quantités de choses mais il vous rendra meilleurs, plus intelligents et capables d’esprit critique dans notre monde débile. * Et puisqu’il s’agit de lectures, nous vous recommandons à nouveau de vous abonner à la revue RADICI, toujours bien faite avec plein d’articles intéressants, faciles à lire, avec des notes de vocabulaire quand ils sont en italien, et souvent amusants (sur l’origine des mots par exemple). Dans le numéro d’avril/mai, un article sur les marches, un sur le  «  culatello  » (il y a toujours un bon article de gastronomie), un texte de Roberto Saviano, une information et une histoire des 60 ans de Comunauté Européenne, l’article sur les aumôniers militaires italiens, un texte sur Primo Levi, une interview du musicien Nicola Piovani, etc. Ceci n’est pas une publicité, mais le conseil amical d’un italianiste. Bonnes lectures et à bientôt. Jean Guichard, 15 juin 2017