Suite page 4
Toute reproduction (papier ou numérique) est interdite sans une autorisation écrite du propriétaire du site.
Una furtiva canzone est un chant de Gaetano Donizetti dans l’Elisir d’amore (1832) ; Una voce poco fa est de Rossini dans Le barbier de Séville (1816). Donizetti a écrit dans Lucia
di Lammermoor (1835) une réplique d’Edoardo, Chi me frena in tal momento ?. L’auteur de la chanson a mal cité. Ce qui est sûr, c’est que les Thermes de Caracalla sont toujours un
des lieux où l’Opéra de Rome donne des représentations splendides.
Les jeux étaient enfin une des attractions principales de la vie populaire romaine ; c’était pour les empereurs et les patriciens un moyen de distraire le peuple par des divertissements
généralement cruels, combats de gladiateurs qui se terminaient souvent par la mort de l’un des deux, assassinats de condamnés (chrétiens ou autres) par des bêtes féroces
affamées préalablement, chasses dans les amphithéâtres, etc. Capossela en fait une description ironique atroce, mais il pense aussi aux jeux d’aujourd’hui, la « legge della curva »
dans les matchs de football : « panem et circenses » hier et aujourd’hui ; l’accompagnement ne s’appuie que sur les cors et les timbales. Le père de Capossela était un passionné du
film Quo Vadis. L’expression « Hoc habet hoc » (il l’a eu) était le cri de la foule avant que l’empereur ne décide du sort du gladiateur battu pour savoir si l’autre devait l’achever (pouce
vers le bas) ou le gracier (pouce vers le haut).
AL COLOSSEO
Au Colisée
(Vinicio Capossela
Ovunque proteggi
2008)
Sia sbranato al colosseo
Qu’il soit mis en pièces au Colisée
Sia spellato al colosseo
qu’il soit écorché au Colisée
Sia scannato al colosseo
qu’il soit égorgé au Colisée
Sia squartato al colosseo
qu’il soit massacré au Colisée
Sia incornato al colosseo
qu’il soit encorné au Colisée
Sia sbudellato al colosseo
qu’il soit étripé au Colisée
Sia disossato al colosseo
qu’il soit désossé au Colisée
In fricassea
en fricassée
Sia servito in fricassea
qu’il soit servi en fricassée
Riceva il ferro al colosseo
qu’il reçoive le fer au Colisée
Hoc habet hoc habet hoc
Hoc habet Hoc habet hoc
Hoc habet hoc habet hoc
Hoc habet Hoc habet hoc
La legge della curva... La loi de la courbe…
la legge della curvaaa.. la loi de la courbe
Two Rome are fallen
Si assassinin gli assassini al colosseo
Que soient assassinés les assassins au Colisée
Sian sventrati gli innocenti al colosseo
que soient éventrés les innocents au Colisée
I neonati sian soldati al colosseo
que les nouveaux-nés soient soldats au Colisée
Il Senato sia scuoiato al colosseo
que le Sénat soit écorché au Colisée
Si divorino le fiere al colosseo
que l’on dévore les bêtes au Colisée
Chi ha predicato sia impalato al colosseo
que ceui qui a prêché soit empalé au Colisée
Al colosseo
au Colisée
Chi ha taciuto
Que celui qui s’est tu
Sia mietuto
soit moissonné
Al colosseo
au Colisée
Sia bevuto
qu’il soit bu
Dalla rena al colosseo
par le sable du Colisée
Sia crocifisso
qu’il soit crucifié
Al colosseo
au Colisée
Sia disunghiato al colosseo
Qu’on lui arrache les ongles au Colisée
In naumachia sia affogato in naumachia
dans une naumachie, qu’il soit noyé, dans une naumachie
In allegria
dans la joie
Riceva il ferro al colosseo
qu’il reçoive le fer au Colisée
Hoc habet hoc habet hoc
Hoc habet Hoc habet hoc
Sia fracassato al colosseo
Qu’il soit fracassé au Colisée
Lo si bruci al colosseo
qu’on le brûle au Colisée
Hoc habet hoc habet hoc
Hoc habet Hoc habet hoc
A gran spadate al colosseo
À grands coups d’épée au Colisée
Sia fatto a brani al colosseo
qu’il soit mis en morceaux au Colisée
La folla salti in aria al colosseo
que la foule saute en l’air au Colisée
A brano a brano al colosseo
morceau par morceau au Colisée
Hoc habet hoc
Hoc habet Hoc
Finchè non arrivino i barbari
Jusqu’à ce qu’arrivent les barbares
Finchè non arrivino i barbari
jusqu’à ce qu’arrivent les barbares
Hoc habet hoc
Hoc habet Hoc
La legge della curvaa... la legge della curvaaa
La loi de la courbe… la loi de la courbe
Finchè non arrivino i tartari
Jusqu’à ce qu’arrivent les barbares
Finchè non arrivino i tartari
Jusqu’à ce qu’arrivent les barbares
Al colosseo !
au Colisée
Antonello Venditti intitule une chanson Giulio Cesare (disque Venditti e segreti, 1986), mais en réalité ne dit rien de l’empereur, il parle de son Lycée, le très chic Liceo Giulio Cesare
de la Via Trieste où il faisait ses études en cette année 1966, où Pelé était le meilleur joueur mondial de football, souhaitant une meilleure atmosphère aux jeunes de 1986, vingt ans
après, où le meilleur est maintenant Maradona.
Deux autres empereurs romains sont évoqués dans la chanson d’auteur, Néron et Héliogabal. Néron figure dans la chanson d’Edoardo Bennato (Naples, 1946 - ), Meno male che
adesso non c’è Nerone, dans son disque de 1975, Io che non sono l’imperatore. C’est un souvenir de ce qu’on enseignait alors à l’école primaire ou au collège, un empereur cruel,
incendiaire de Rome, organisateur de jeux et tyran pesant par les impôts qu’il faisait payer au peuple romain. C’est une image dont on sait aujourd’hui qu’elle n’était fondée que sur
les biographies de Suétone, Tacite et Dion Cassius, tous trois appartenant à la classe sénatoriale hostile à l’action de Néron. Mais Bennato ne va guère au-delà de ses souvenirs
d’école. Sa chanson est surtout une satire superficielle de notre temps : Néron n’est plus là, mais ses jeux du cirque et ses impôts sont toujours existants.
L’autre empereur est Héliogabale (203-218-222 apr. J.C.), le jeune empereur syrien, successeur de Macrin et de Caracalla, et qui tenta d’introduire à Rome un nouveau culte
solaire, un « Sol invictus » qui aurait remplacé le culte de Jupiter, et finalement assassiné par sa garde prétorienne, pour son hostilité au conservatisme romain et pour ses excès
sexuels (il eut, dit-on, cinq épouses et deux maris !), et remplacé par son cousin Alexandre Sévère. Il semble avoir laissé les Chrétiens en paix, ils étaient nombreux en Syrie. Il est
chanté en 1977 par un disque d’Emilio Locurcio (Turin, 1953 - ) qui lui est consacré, premier et unique disque de l’auteur, passionné par Léo Ferré et Giovanna Marini. Il rencontre
à Rome Ernesto Bassignano, Lucio Dalla, Rosalino Cellamare (qui deviendra Ron), Claudio Lolli, et son disque finira par être publié par la RCA. Il s’inspire (de loin) du livre
d’Antonin Artaud, Héliogabale ou l‘anarchiste couronné (1934) ; la couverture du disque dit que c’est « un’o L'Eliogabalo - Operetta Irrealista: 1. Monologo d'apertura : Tutto Quello
Che Mi E Stato Tolto lo Rivoglio 2. La veglia : Autoritratto Dentro Stanze Elettroniche - Giovanna Labbromorto 3. Il viaggio : A Scaldarci Al Vino Dolce Dei Chilometri - Dal Finestrino
del Treno - La Ferrovia Celeste 4. La visione : La Primavera Feroce - La Scelta de Essere Veramente Liberi - Eliogabalo Imperatore - La Gente in Strada 5. L'attesa : La Morte di
Eliogabalo - Avvertenze - Finalino Per Altri Inizi.
Au-delà d’Artaud, la référence est aussi faite à Pier Paolo Pasolini, qui vient d’être assassiné. Le disque est pratiquement introuvable, mais vous pouvez l’écouter sur Internet et lire
ses textes. Un des dessins de la couverture représente une dernière Cène avec Berlinguer en saint Jean, Andreotti en Jésus-Christ qui embrasse Gianni Agnelli tandis qur sous la
table on voit le cadavre de Pasolini.
Telle qu’elle est, l’œuvre de Locurcio n’est pas un travail historique qui nous informe sur Héliogabale, mais c’est sans doute un des disques les plus significatifs de la contestation
étudiante, antibourgeoise, antimilitariste, anticléricale, anti rationaliste que vient représenter pour Locurcio cet empereur énigmatique que fut Héliogabale pour célébrer « l’imagination
au pouvoir » :
« Sul più bello, si fa per dire, Qualcuno (forse
Au plus beau moment, peut-on dire. Quelqu’un (peut-être
ecclesiastici, fascisti, imboscati ministeriali,
des ecclésiastiques, des fascistes, des embusqués ministériels
talpe di Questura, cioè tutti i protettori
des taupes de préfecture, c’est-à-dire tpus les protecteurs
della Norma) fa fuori Eliogabalo.
de la norme) descend Héliogabale.
I funerali di Eliogabalo divengono quelli di Pasolini.
Les funérailles d’Héliogabale deviennent celles de Pasolini.
E’ morto l’imperatore lavato con funerali atroci
Il est mort l’empereur lavé avec des funérailles atroces
gli hanno spento intorno le luci e interrotto le voci
On a éteint les lumières autour de lui et interrompu les voix
ma in quel silenzio improvviso fu chiaro per tutti
mais dans ce silence soudain il fut clair pour tout le monde
che quel pazzo al potere lasciava i suoi dolci frutti
que ce fou au pouvoir laissait ses doux fruits
nel cuore caldo di quanti sentivano il bisogno
dans le cœur chaud de tous ceux qui sentaient le besoin
di illudersi che la vita è appena l’inizio di un sogno »
d’avoir l’illusion que la vie n’est que le début d’un rêve.
(La morte di Eliogabalo).
L’ère romaine s’achève en 476 après J.C., avec la mort du dernier empereur romain d’Occident, Romulus Augustulus. Selon la tradition, elle avait commencé en 753 (754 ?) av.J.G.
avec le règne de sept rois (mais de 753 à 509, en presque 250 ans, ils ont obligatoirement été plus nombreux) : la République remplace la Monarchie en 509 av.J.C., pour laisser
place à l’Empire avec Jules César (100-44 av.J.C.) et Octave Auguste (63 av.J.C.- 14 apr.J.C.), de 27 av.J.C. à 476 apr.J.C. (la destitution de Romulus Augustulus par Odoacre),
puis jusqu’en 1453 pour l’empire romain d’Orient à Constantinople (2)
L’Ancien testament et l’histoire de Jésus dans la chanson
L’histoire à partir de la vie du Christ est évidemment le sujet privilégié de la chanson chrétienne et de la liturgie catholique. La chanson populaire est surtout fascinée par la vie de la
Vierge et du Christ, par la Passion de ce dernier et par la vie des saints, nous y reviendrons plus loin.
La chanson liturgique populaire a moins souvent pris l’Ancien Testament pour thème. Par contre il y a quelques textes de « cantautori », comme la Genesi de Francesco Guccini.
Genesi
(Francesco Guccini
Opera buffa
1973, et jusqu’en 2008)
Una canzone molto più... più seria e più impegnata,
Une chanson beaucoup plus… plus sérieuse et plus engagée
oserei dire impegnatissima, una canzone che mi è stata
j’oserais dire très engagée, une chanson qui m’a été
ispirata, a me succede poche volte, però questa
inspirée, à moi cela n’arrive pas souvent, pourtant cette
canzone mi è stata ispirata direttamente dall'alto.
chanson m’a été inspirée directement d’en-haut.
Ero lì, nel mio candido lettino... e ho sentito una
J’étais là dans mon petit lit blanc… et j’ai entendu une
voce che diceva « Francesco », dico « socc..., chi è ? »... voix qui disait « Francesco », je dis « socc…qui c’est ? »
dico « eh ? », diceeeeee « svegliati sono il tuo Dio ».
je dis « eh ? », elle dit-iii « Réveille-toi, je suis ton Dieu ».
E allora così, in questo modo sollecitato, ho pensato di,
Et alors, comme ça, sollicité de cette façon, j’ai pensé à,
di... fare un'opera musicale colossale e mettere in musica à faire un opéra colossal et à mettre en musique
l'Antico Testamento. Per ora sono riuscito a fare soltanto
l’Ancien testament. Pour le moment je ne suis arrivé qu’à faire
la Genesi ... che è la vera storia della creazione del mondo...
la Genèse…qui est la véritable histoire de la création du monde...
Per capire la nostra storia
Pour comprendre notre histoire
bisogna farsi ad un tempo remoto :
il faut revenir à un temps lointain :
c'era un vecchio con la barba bianca,
il y avait un vieux à barbe blanche
lui, la sua barba, ed il resto era vuoto.
,
lui, sa barbe et le reste était vide.
Voi capirete che in tale frangente
-
Vous comprenez que dans une telle situation
quel vecchio solo lassù si annoiava,
ce vieux tout seul là-haut s’ennuyait,
si aggiunga a questo che,
inspiegabilmente,
ajoutons à cela que, inexplicablement
nessuno aveva la T.V. inventata ...
personne n’avait inventé la télé… Beuh
Beh, poco male, pensò il vecchio un giorno,
Beuh, C’est pas grave, pensa un jour le vieux,
a questo affare ci penserò io :
à cette affaire j’y penserai moi-même :
sembra impossibile, ma in roba del genere,
ça semble impossible n mais dans un truc comme ça,
modestia a parte, ci so far da Dio ! »
modestie à part, je sais faire comme un Dieu ! »
« Dixit », ma poi
toccò un filo scoperto,
« Dixit » mais ensuite il toucha un fil dénudé,
prese la scossa, ci fu un gran boato :
prit une secousse, il y eut un grand grondement :
come T.V. non valeva un bel niente,
comme télé, ça ne valait pas grand-chose,
ma l'Universo era stato creato ...
mais l’univers avait été créé …
« Come son bravo che, a tempo perso,
Comme je suis bon, à temps perdu,
ti ho creato l'Universo !
j’ai créé l’univers !
Non mi sembra per niente male,
ça me semble vraiment pas mal,
sono davvero un tipo geniale !
je suis vraiment un type génial !
Zitto, Lucifero, non disturbare
« Silence, Lucifer, ne me dérange pas,
non stare sempre qui a criticare !
ne reste pas toujours là à critiquer!
Beh sì, lo ammetto, sarà un po' buio,
Ben, oui, je l’admets, c’est un peu sombre
ma non dir più che non si vede un tubo ! ».
mais ne dis plus qu’on n’y voit goutte ! ».
[parlato]
(parlé)
« Che sono parolacce che non sopporto ! »,
« Ce sont des gros mots que je ne supporte pas ! »,
disse il vecchio a Lucifero. « E poi se c'è una cosa
dit le vieux à Lucifer. « Et puis il y a une chose
e un'altra che non posso sopportare sono i criticoni : et une autre que je ne peux pas supporter, ce sont les grosses critiques :
fattelo te l' Universo se sei capace ! Che me at dig un quel... fais-le toi-même l’Univers si tu en es capable ! Je te le dis, moi,
disse il ve... » Era d' antica origine modenese da parte
dit le vioc… ». Il était de vieille ascendance modénaise du côté
di madre il ve... « Io parlo chiaro: pane al pane,
de sa mère le vioc… « Je parle clair : il faut appeler un chat
vino al vino, anzi vin santo al vin santo. Sono buono
un chat, mieux le vin santo le vin santo. Je suis bon
e bravo, ma se mi prendono i cinque secoli
et brave, mais si on me colle cinq siècles
me at sbat a l' inferen, com'è vero Dio ! »
je t’envoie en enfer, aussi vrai qu’est Dieu ».
Ma poi volando sull' acqua stagnante
Mais ensuite survolant l’eau stagnante
e sopra i mari di quell' Universo,
et les mers de cet Univers,
mentre pensava se stesso pensanten.
tandis qu’il pensait à lui-même pensant
in mezzo a quel buio si sentì un po' perso.
au milieu de ce noir il se sentit un peu perdu.
Sbattè le gambe su un mucchio di ghiaia
il se tapa les jambes sur un tas de graviers
dopo una tragica caduta in mare,
après un chute tragique dans la mer,
il colpo gli fece persino un po' male ...
le coup lui fit aussi un peu mal …
quando andò a sbattere sull'Himalaya
quand il alla taper sur l’Himalaya
Fece crollare anche un gran continente
Il fit aussi crouler un grand continent
soltanto urtandolo un poco col piede :
rien qu’en le heurtant un peu avec son pied :
si consolò che non c'era ancor gente
il se consola du fait qu’il n’y ait encore personne
e che non gli era venuto poi bene.
pour lui dire que ça n’avait pas été bien fait.
Ma quando il buio gli fece impressione,
Mais quand le noir lui fit impression,
disse, facendosi in viso un po' truce :
il dit, en prenant un visage un peu farouche :
« diavol d' un angelo, avevi ragione !
« Diable d’ange, tu avais raison !
Si chiami l'Enel, sia fatta la luce ! » ;
Qu’on appelle l’Enel, qu’on fasse la lumière ! »
Commutatori, trasformatori,
commutateurs, transformateurs
dighe idroelettriche e isolatori,
barrages hydro-électriques et isolateurs,
turbine, dinamo e transistori,
turbines, dynamos transistors
per mille impianti di riflettori
pour mille installations de projecteurs,
albe ed aurore fin boreali,
Aubes et aurores même boréales,
giorni e tramonti fin tropicali
jours et crépuscules même tropicaux.
« Fate mo' bene che non bado a spese,
Faites ça bien, je ne regarde pas à la dépense,
tanto ho lo sconto alla fine del mese... ».
de toute façon, j’ai une réduction à la fin du mois… ».
[parlato]
(parlé)
« Te Lucifero non ti devi interessare come faccio ad avere
« Toi Lucifer, tu ne dois pas savoir comment je fais pour avoir
io lo sconto alla fine del mese. Ma cosa vuol dire corruzione,
une réduction à la fin du mois. Mais ça veut dire quoi
corruption
una mano lava l'altra, come si dice ; vuoi che uno
une main lave l’autre, comme on dit ; veux-tu que quelqu’un
nella mia posizione non conosca nessuno ? Però intanto, dans ma situation ne connaisse personne ? Pourtant entre
temps,
ragazzi, andateci piano perché la bolletta
les enfants, allez-y doucement parce que la facture
la portano a me.
c’est à moi qu’on l’apporte.
M' avete lasciato accesa la luce al polo sei mesi, sei mesi,
Vous avez laissé la lumière allumée au pôle pendant six mois,
no, sei mesi ! Grazie, c'era freddo, i surgelati
non, six mois ! Merci, il y avait du froid, les surgelés
li debbo pur tenere da qualche parte !
je dois bien les mettre quelque part !
Adesso la tenete spenta sei mesi come ...
Maintenant vous la gardez éteinte six mois comme …
e poi quei ragazzi lì, come si chiamano quei ragazzini
et puis ces gars-là, comment on les appelle ces gamins
che vanno in giro con quella cosa ? Aureola si chiama ?
qui tournent avec cette chose ? ça s‘appelle une auréole ?
No no, am pies menga, no no no, ragazzi quelle cose li,
Non, non non, ça ne me plaît du tout, mes enfants, ces choses-là
io vi invento il peccato di superbia e vi frego tutti eh, je vais vous inventer le péché d’orgueil, et je vous coince tous, eh,
adesso ve lo dico, bisogna guadagnarsele...
maintenant je vous le dis, il faut se les gagner …
a parte il fatto che non mi adorate abbastanza...
à part le fait que vous ne m’adorez pas assez …
no no no Lucifero, è inutile che tu mi chiedi scusa :
Non, non, Lucifer, il est inutile que tu me présentes des excuses
adorare significa non dovere mai dire mi dispiace !
adorer signifie ne jamais devoir dire je regrette !
Tientelo in mente... Voi, ecco, io vi do ogni dieci atti Tiens-le toi pour dit … Vous, voilà, je vous donne tous les dix actes
di adorazione vi do un buono, ogni dieci buoni
d’adoration je vous donne un bon, tous les dix bons
voi mandate la cartolina che il 6 gennaio ...
vous envoyez une carte postale comme le 6 janvier …
che poi ci ho tutta un'altra idea in testa per la...
Et puis j’ai une autre idée en tête pour la …
facciamo Aureolissima che è una festa
faisons l’Auréolissime qui est une fête
che mi sembra molto bella. Piuttosto Lucifero,
qui me semble très belle. Plutôt, Lucifer,
non sgamare, vieni qua ragazzo ... Com' è,
ne fais pas le malin, viens ici, mon garçon … Comment est-il ?,
mi hanno detto che hai stampato un libro...
on m’a dit que tu as imprimé un livre …
Il Libretto Rosso dei Pensieri di ... oh, bella roba
Le Petit Livre Rouge des Pensées de … Oh, c’est chouette
il libretto rosso dei pensieri di Lucifero !
le petit livre rouge des pensées de Lucifer !
Ragazzi mi spiace... ma cosa vuol dire di sinistra,
Les enfants, ça me déplaît … mais qu’est-ce que ça veut dire de gauche
di sinistra... non sono un socialdemocratico anch' io ?
de gauche … Est-ce que je ne suis pas social-démocrate, moi aussi ?
avanti al centro contro gli opposti estremismi ! ...
En avant au centre contre les extrémismes opposés ! …
eh ma, ...no no no, non ci siamo mica qua :
Ah mais, non non non, nous n’y sommes pas du tout :
se c' è uno che può pensare anzitutto sono io ...
s’il y en a un qui peut penser ici, avant tout c’est moi …
e non tirare mica in ballo mio figlio, quel capellone,
et ne tirez pas dans la course mon fils, ce hippie,
con tutti i sacrifici che ho fatto ... per me
avec tous les sacrifices que j’ai faits … pour moi
lui lì finisce male... ah me, me a tal deg ...
lui il les achève mal … Ah moi à un tel deg …
finisce male. E attento che te e lui, io ho
ça va mal finir. Et attention que toi et lui, moi j’ai
delle soluzioni per voi che non vi piaceranno, per Dio !
pour vous des solutions que vous n’aimerez pas, par Dieu !
E non guardarmi male che qui dentro « per Dio »
Et ne me regarde pas de travers, car ici « par Dieu »
lo dico come e quando mi pare ! »
je parle comme je veux et quand ça me semble bon ! »
Ma fatta la luce ci vide più chiaro :
Mais quand la lumière fut il y vit plus clair :
là nello spazio girava una palla.
là dans l’espace tournait une boule.
Restò pensoso e gli parve un po' strano,
Il resta pensif et ça lui parut un peu étrange,
ma scosse il capo : chi non fa non falla.
mais il secoua la tête : qui ne fait rien ne se trompe pas.
Rise Lucifero stringendo l' occhio
Lucifer rit en clignant de l’œil
quando lui e gli angeli furon da soli :
quand lui et les anges furent seuls :
« Guarda che roba ! Si vede che è vecchio :
« Regarde quel truc ! On voit qu’il est vieux :
l'ha fatto tutto schiacciato sui poli ! »
il l’a fait tout écrasé sur les pôles ! ».
« Per riempire 'sto bell'ambiente
Pour remplir ce beau décor,
voglio metterci tante piante.
je veux y mettre des tas de plantes.
Forza, Lucifero, datti da fare,
Allez, Lucifer, mets-toi au boulot,
ordina semi, concime e trattore,
commande des semis, de l’engrais et un tracteur,
voglio un giardino senza uguali,
je veux un jardin sans égal,
voglio riempirlo con degli animali !
je veux le remplir d’animaux !
Ma cosa fa 'sto cane che ho appena creato ?
Mais que fait ce chien que je viens de créer ?
Boia d'un Giuda, m' ha morsicato ! »
Traître de chien, il m’a mordillé!
[parlato]
(parlé)
« Piuttosto fallo vedere da un veterinario, che non vorrei
« Fais-le plutôt voir par un vétérinaire, je ne voudrais pas
aver creato anche la rabbia, già così ...
avoir créé aussi la rage, déjà comme ça …
cos'è che non ho creato ? Lo sapevo :
Qu’est-ce que je n’ai pas encore créé ?
l'uomo non ho creato !
je le savais : c’est l’homme que je n’ai pas créé !
Grazie, mi fate sempre fare tutto a me,
Merci, vous me faites toujours tout faire à moi
mi tocca sempre fare ! Qua se non ci sono io
il me faut toujours faire ! Ici si je ne suis pas là
che penso a tutto ... va beh, nessuno è perfetto...
pour penser à tout … Bon, personne n’est parfait …
sì, lo so che sono l'Essere Perfettissimo
Oui, je sais que je suis l’Être très Parfait
Creatore e Signore. Grazie ! Adesso
Créateur et Seigneur. Merci ! Maintenant
ti trasformo in serpente così impari, striscia mo' lì !
je te transforme en serpent comme ça tu apprends, maintenant glisse !
Viuscia via ! » E portarono al vecchio
allez, ouste ! ». Et ils apportèrent au vieux
quello che c' era rimasto ...
ce qui était resté …
c'era un po' di formaggio e due scatolette di Simmenthal, Il y avait un peu de fromage et deux petites boîtes de Simmental
cioè lui li mise assieme e poi…
lui il les assembla et puis …
Prese un poco di argilla rossa,
il prit un peu d’argile rouge,
fece la carne, fece le ossa,
fit la chair, fit les os,
ci sputò sopra, ci fu un gran tuono
cracha dessus, il y eut un grand coup de tonnerre
ed è in quel modo che è nato l'uomo...
et c’est de cette façon qu’est né l’homme …
[parlato]
(parlé)
Era un venerdì 13 dell'anno zero del Paradiso !
C’était un vendredi 13 de l’année zéro du Paradis !
Guccini s’est toujours déclaré agnostique, mais très intéressé par le texte de la Bible. Il écrit ici une chanson humoristique sur la création du monde par « Dieu », un Dieu qui a la
forme d’un vieux paysan à barbe blanche de la région de Modène qui parle de temps en temps en dialecte et qui voudrait faire aussi de la télévision. C’est évidemment aussi une
allusion à la vie contemporaine, de l’ENEL (Ente Nazionale Energia Elettrica, Société Nationale de l’Énergie Électrique), qui avait été créée en 1962, à la corruption, qui est déjà un
sujet de débat politique ; ce Dieu est aussi l’inventeur pour les anges du concours télévisé Aureolissima, qui rappelle la création démocrate-chrétienne de Canzonissima en 1958.
Dieu dialogue avec son assistant, Lucifer, qui le critique et se moque de lui, jusqu’à ce qu’il le transforme en serpent, n’est-il pas aussi l’auteur du Petit Livre Rouge, comme celui de
Mao Tse-Toung paru en 1964 ? ; et il dit que son Fils, un autre « révolutionnaire », que la gauche préférait au Père, n’est qu’un hippie qui finira mal, et lui évidemment est
politiquement « au centre », entre les deux « extrémismes », comme le fut la démocratie-Chrétienne pour tenter de conserver son pouvoir en 1968 … Et l’homme est créé un vendredi
13 !
Il existe bien un CD de 7 chansons qui racontent aux enfant l’histoire de la création du monde selon la Genèse (Daniela Cologgi e Domenico Amicozzi, In principio Dio creò, CD),
édité par les Sœurs Paoline, chanté par trois enfants qui veulent montrer la grandeur et la bonté de Dieu. Mais à part quelques textes religieux de ce type, il n’existe guère de
chansons sur l’Ancien Testament, à l’exception de celle d’Elio e le Storie Tese, Sveliatevi (sic) - Born to be Abramo, censurée après une plainte des Témoins de Jéhovah, un mois
après la publication en 1990 : c’est aujourd’hui un disque difficile à trouver.
Sveliatevi - Born to be Abramo
Réveillez-vous - Né pour être Abraham
Abramo non andare, non partire,
Abraham, ne t’en va pas, ne pars pas
non lasciare la tua casa.
ne quitte pas ta maison.
Cosa speri di trovar ?
Qu’est-ce que tu espères trouver ?
La strada è sempre quella,
La route est toujours la même,
ma la gente è differente,
mais les gens sont différents
ti è nemica,
ils te sont hostiles,
Dove credi di arrivar ?
où crois-tu arriver ?
Born, born, born to be Abramo,
Born, born,born to be Abraham.
born to be Abramo.
Born to be Abraham
Andate e predicate il mio Vangelo :
Allez et prêchez mon Évangile :
parola di Jahvé.
Parole de Yahwé.
Esci dalla tua terra,
Sors de ta terre
vai dove ti mostrerò.
Va où je te montrerai
Parola di Jahvé.
Parole de Yahwé.
Esci dalla tua terra
Sors de ta terre
e vai dove ti mostrerò.
et va où je te montrerai
Le reti sulla spiaggia abbandonate
Les filets sur la plage, les pêcheurs
le han lasciate i pescatori.
les ont abandonnés.
Son partiti con Gesù.
Ils sont partis avec Jésus.
La folla che osannava se n'è andata,
La foule qui chantait ses louanges est partie
ma il silenzio a una domanda
mais c’est le silence qui semble répondre
sembra ai dodici portar.
à une question des douze.
Born, born, born to be Abramo,
born to be Abramo.
Quello che lasci tu lo conosci :
Ce que tu quittes tu le connais :
il tuo Signore cosa ti dà ?
ton Seigneur qu’est-ce qu’il te donne ?
Un popolo, la terra e la promessa :
Un peuple, la terre et la promesse :
parola di Jahvé.
Parole de Yahwé.
Esci dalla tua terra,
vai dove ti mostrerò.
Parola di Jahvé.
Esci dalla tua terra
e vai dove ti mostrerò.
Parola di Jahvé, parola di Jahvé,
Parole de Yahwé, Parole de Yahwé,
parola di Jahvé, parola di Jahvé.
,
parole de Yahwé, parole de Yahwé.
La parola di Jahvé
La parole de Yahwé
è la parola di Jahvé.
est la parole de Yahwé.
Abramo non andare, non partire,
Abraham ne t’en va pas, ne pars pas
non sono mica Bhagwan,
je ne suis pas Bhagwan
che è appena morto.
qui vient de mourir.
Io sono Jahvé.
Je suis Yahwé.
Bhagwan était le maître spirituel hindou Bhagwan Shree Rajneesh, mort en janvier 1990, peu de temps avant la publication du disque.
Citons encore La torre di Babele, d’Edoardo Bennato, dans son disque de 1976. C’est une simple lecture littérale superficielle de l’histoire biblique, qui ne vise qu’à montrer
l’impensable orgueil humain prêt à toutes les guerres pour montrer qu’il est supérieur aux autres animaux :
La torre di Babele
La Tour de Babel
(Edoardo Bennato
La torre di Babele
1976)
Non vi fermate
Ne vous arrêtez pas
dovete costruire la vostra torre
vous devez construire votre tour
la Torre di Babele
la Tour de Babel
sempre più grande
toujours plus grande
sempre più alta e bella
toujours plus haute et belle
... Siete o non siete i padroni della terra ?
Etes-vous ou n'êtes-vous pas les maîtres de la terre ?
Strappate tutti i segreti alla natura
Arrachez tous ses secrets à la nature
e non ci sarà più niente
et il n'y aura plus rien
che vi farà paura
qui vous fera peur
e sarete voi a far girare la terra
et c'est vous qui ferez tourner la terre
con un filo, come una trottola
avec un fil, comme une toupie
dall'alto di una stella.
du haut d'une étoile.
E quella stella sarà il quartier generale
Et cette étoile sera le quartier général
per conquistare
pour conquérir
quello che c'è ancora da conquistare
ce qu'il y a encore à conquérir
e da quella stella
et de cette étoile
per tutto l'universo
dans tout l'univers
l'uomo si spazia, per superare se stesso.
l'homme plane pour se dépasser lui-même.
Non vi fermate
Ne vous arrêtez pas
dovete costruire la vostra torre
vous devez construire votre tour
la torre di Babele
la Tour de Babel
costi quel che costi
coûte que coûte
anche guerra dopo guerra
même guerre après guerre
siete o non siete i padroni della terra ?
Etes-vous ou n'êtes-vous pas les maîtres de la terre ?
Non vi fermate
Ne vous arrêtez pas
dovete costruire la vostra torre
vous devez construire votre tour
la torre di Babele
la Tour de Babel
si deve fare e serve a dimostrare
il faut la faire, elle sert à démontrer
che l'uomo è superiore
que l'homme est supérieur
a ogni altro animale !...
à tous les autres animaux ! ...
C’est surtout à l’histoire de Jésus que s’intéressent les « cantautori ». Un des premiers fut Fabrizio De André (Gênes, 1940-1999) qui écrivit avec Gianpiero Reverberi (Gênes, 1939
- ) en 1967 Si chiamava Gesù, dans le disque Volume 1. Pour l’anarchiste et anticlérical De André, Jésus ne fut qu’un homme, un pauvre, mais un héros fragile qui voulut
révolutionner le monde en répondant à la violence par le pardon, dans un amour qui le « divinise », car un tel amour est au-dessus de la nature de l’être humain. De André est plein
de respect et d’admiration pour Jésus, même s’il n’a pas servi à grand-chose car le monde est aussi cruel après lui qu’avant, son hostilité ne va qu’à l’institution ecclésiastique, organe
politique de pouvoir et souvent d’oppression de ceux qui le désapprouvent.
Si chiamava Gesù
(Testo e musica : Fabrizio De Andrè
e Gianfranco Reverberi
Volume 1, 1967)
Venuto da molto lontano
Venu de très loin
a convertire bestie e gente
pour convertir bêtes et gens
non si può dire non sia servito a niente on ne peut pas dire qu’il n’ait servi à rien
perché prese la terra per mano
parce qu’il prit la terre par la main
vestito di sabbia e di bianco
vêtu de sable et de blanc
alcuni lo dissero santo
quelques-uns dirent qu’il était saint
per altri ebbe meno virtú
pour d’autres il eut moins de vertus
si faceva chiamare Gesú.
il se faisait appeler Jésus.
Non intendo cantare la gloria
Je ne veux pas chanter la gloire
né invocare la grazia o il perdono
ni invoquer la grâce et le pardon
di chi penso non fu altri che un uomo
de celui dont je pense qu’il ne fut qu’un homme
come Dio passato alla storia.
passé à l’histoire comme Dieu.
Ma inumano è pur sempre l'amore
Mais toujours inhumain est l’amour
di chi rantola senza rancore
de celui qui agonise sans rancoeur
perdonando con l'ultima voce
en pardonnant dans ses derniers mots
chi lo uccide fra le braccia di una croce.
celui qui le tue dans les bras d’une croix.
E per quelli che l'ebbero odiato
Et pour ceux qui le haïrent
nel Getsemani pianse l'addio,
à Gethsémani il pleura son adieu
come per chi lo adorò come Dio
comme pour ceux qui l’adorèrent comme Dieu
che gli disse « Sii sempre lodato »,
qui lui dirent : « Sois loué pour toujours »,
per chi gli portò in dono alla fine
pour ceux qui à la fin lui portèrent en cadeau
una lacrima o una treccia di spine,
une larme ou une couronne d’épines,
accettando ad estremo saluto
acceptant comme dernier salut
la preghiera e l'insulto e lo sputo.
la prière et l’insulte et le crachat.
E morí come tutti si muore
Et il mourut comme nous mourons tous
Come tutti cambiando colore.
comme tous en changeant de couleur.
Non si può dire che sia servito a molto
On ne peut pas dire qu’il ait servi à grand-chose
perché il male dalla terra non fu tolto.
parce que le mal n’a pas été supprimé de la terre.
Ebbe forse un po' troppe virtú,
Il eut peut-être un peu trop de vertus,
ebbe un volto ed un nome : Gesú.
Il eut un visage et un nom : Jésus.
Di Maria dicono fosse il figlio
De Marie on dit qu’il fut le fils
sulla croce sbiancò come un giglio.
sur la croix, il devint blanc comme un lys.
De André reviendra plus tard sur l’histoire de Marie. Francesco De Gregori (Rome, 1951 - ) sera un autre « cantautore » à parler du personnage de Jésus dans son disque de 1979,
Viva l’Italia qui contient la chanson Gesù bambino. C’est une prière ironique à l’enfant Jésus (sans doute les enfants comprennent-ils mieux beaucoup de choses ?) pour qu’il hâte la
prochaine guerre, qu’elle soit propre, que les gens n’y participent pas et qu’elle ne laisse pas de souvenir : intéressante chanson contre la guerre sous le couvert d’une prière à Jésus,
un Jésus malgré tout « acheté à crédit » et « à la dérive » !
Gesù bambino
(Francesco De Gregori,
Viva l’Italia, 1979)
Gesù piccino picciò Gesù bambino
Petit Jésus, petit enfant Jésus
fa' che venga la guerra prima che si può
fais que que la guerre vienne dès que possible
fa' che sia pulita come una ferita piccina picciò
fais qu’elle soit propre comme une toute petite blessure
fa' che sia breve come un fiocco di neve
fais qu’elle soit courte comme un feu de neige
e fa' che si porti via la mala morte e la malattia
et fais qu’elle emporte la mauvaise mort et la maladie
fa' che duri poco e che sia come un gioco.
fais qu’elle dure peu et qu’elle soit comme un jeu.
Tu che conosci la stazione e tutti quelli
Toi qui connais la gare et tous ceux
che ci vanno a dormire
qui vont y dormir
fagli avere un giorno l'occasione
fais-leur avoir un jour l’occasion
di potere anche loro partire
de pouvoir eux aussi partir
partire senza biglietto, senza biglietto volare via
partir sans billet, s’envoler sans billet
per essere davvero liberi non occorre la ferrovia
pour être vraiment libres il n’y a pas besoin de chemin de fer
e fa' che piova un po' di meno
Et fais qu’il pleuve un peu moins
sopra quelli che non hanno l'ombrello
sur ceux qui n’ont pas de parapluie
e fa' che dopo questa guerra il tempo sia più bello.
et fais qu’après cette guerre le temps soit meilleur.
Gesù piccino picciò
Petit enfant Jésus
Gesù bambino comprato a rate
Enfant Jésus acheté à crédit
chissà se questa guerra potrà finire prima dell'estate
qui sait si cette guerre finira avant l’été
perché sarebbe bello spogliarci tutti
parce qu’il serait beau de se déshabiller tous
e andare al mare
et d’aller à la mer
e avere sotto agli occhi, dentro al cuore
et d’avoir sous les yeux, dans le coeur
tanti giorni ancora da passare
encore tant de jours à passer
e ad ogni compleanno guardare il cielo
et regarder le ciel à chaque anniversaire
ed essere d'accordo
et être d’accord
e non avere più paura, la paura
et n’avoir plus peur, la peur
soltanto un ricordo.
ne serait qu’un souvenir.
Gesù piccino picciò
Petit enfant Jésus
Gesù bambino alla deriva
enfant Jésus à la dérive
se questa guerra deve proprio farsi
si cette guerre doit vraiment se faire
fa' che non sia cattiva
fais qu’elle ne soit pas méchante
tu che le hai viste tutte e sai che tutto
toi qui les as toutes vues et qui sais que tout
non è ancora niente
n’est encore rien
se questa guerra deve proprio farsi
si cette guerre doit vraiment se faire
fa' che non la faccia la gente
fais que les gens ne la fassent pas
e poi perdona tutti quanti tranne qualcuno
et puis pardonne-leur tous, sauf quelques-uns
e quando poi sarà finita
et puis quand ce sera fini
fa' che non la ricordi nessuno ...
fais que personne ne s’en souvienne.
Antonello Venditti (Rome, 1949 - ) écrit en 1974 une chanson intitulée A’Cristo (dans son disque Quando verrà Natale). Elle est en « romanesco », en dialecte de Rome, c’est un
dialogue avec Jésus auquel il dit de ne pas rester à Rome parce que c’est trop dangereux et de retourner en Galilée. En réalité, plus qu’à Jésus, Venditti s’intéresse à Rome et à
l’actualité de son temps (allusion à Moshé Dayan, 1915-1981, le militaire israélien de plusieurs guerres dont celle du Kippour en 1973, puis aux militaires américains, puis aux
travailleurs de tous les jours). Jésus n’est qu’un prétexte pour parler de tout cela, et malgré la condamnation de la chanson pour son langage considéré comme hostile à la religion,
Venditti se révélera bientôt comme un admirateur, de Rome bien sûr (il parlera de « la sainteté de la Grande Coupole »), mais aussi du pape Benoît XVI et de Padre Pio.
Fabrizio De André reprend l’histoire de Jésus, de Marie et de Joseph dans son disque de 1970, La buona novella. Il s’inspire non des évangiles canoniques (c’est-à-dire conformes
aux « canons », aux règles de l’Église catholique et reconnus par la hiérarchie de cette Église) fixés par les conciles ecclésiastiques qui figent des personnages mi-humains mi-
divins, mais sur les évangiles apocryphes (c’est-à-dire secrets, considérés comme non authentiques par la hiérarchie catholique, mais souvent aussi instructifs que le vie de Jésus et
de Marie, et qui ont inspiré une quantité de peintres du Moyen-Âge et de la Renaissance). Après le film de Pier Paolo Pasolini de 1964, L’Évangile selon saint Matthieu, De André
cherche à chanter Jésus, Marie, Joseph, le voleur crucifié sous leur aspect humain, prenant au sérieux les textes « apocryphes », que Marcello Craveri venait de publier chez
Einaudi en 1969, mais qui étaient connus depuis le Moyen-Âge. Pourtant il choisit ce qui lui convient dans ces textes pendant ce long travail d’un an qui aboutit au disque. Travail
courageux en cette année1970, où le mouvement de révolte étudiante et ouvrière, auquel De André participait, critiqua son intérêt pour la passion de Jésus plutôt que pour les
problèmes politiques contemporains. De André dira dans une interview de 1998 : « Non avevano capito – almeno la parte meno attenta di loro, la maggioranza – che La Buona
Novella è un’allegoria. Paragonavo le istanze migliori e più ragionevoli del movimento sessantottino, cui io stesso ho partecipato, con quelle, molto più vaste spiritualmente, di un
uomo di 1968 anni prima, che proprio per contrastare gli abusi del potere, i soprusi dell’autorità si era fatto inchiodare su una croce, in nome di una fratellanza e di un egualitarismo
universali. Si chiamava Gesù di Nazaret e secondo me è stato ed è rimasto il più grande rivoluzionario di tutti i tempi. Non ho voluto inoltrarmi in percorsi, in sentieri, per me
difficilmente percorribili, come la metafisica o addirittura la teologia, prima di tutto perché non ci capisco niente ; in secondo luogo perché ho sempre pensato che se Dio non esistesse
bisognerebbe inventarselo. Il che è esattamente quello che ha fatto l'uomo da quando ha messo i piedi sulla terra. Ho quindi preso spunto dagli evangelisti cosiddetti apocrifi. Apocrifo
vuol dire falso, in effetti era gente vissuta : era viva, in carne ed ossa. Solo che la Chiesa mal sopportava, fino a qualche secolo fa, che fossero altre persone non di confessione
cristiana ad occuparsi, appunto, di Gesù. Si tratta di scrittori, di storici, arabi, armeni, bizantini, greci, che nell'accostarsi all'argomento, nel parlare della figura di Gesù di Nazaret, lo
hanno fatto direi addirittura con deferenza, con grande rispetto. Tant'è vero che ancora oggi proprio il mondo dell'Islam continua a considerare, subito dopo Maometto, e prima ancora
di Abramo, Gesù di Nazaret il più grande profeta mai esistito. Laddove invece il mondo cattolico continua a considerare Maometto qualcosa di meno di un cialtrone. E questo direi che
è un punto che va a favore dell'Islam. L'Islam quello serio, non facciamoci delle idee sbagliate. » » (Ils n’avaient pas compris – du moins la partie la moins attentive d’entre eux,
la majorité – que La Bonne nouvelle est une allégorie. Je comparais les instances les meilleures et les plus raisonnables du mouvement de 1968, auquel j’ai moi-même
participé, à celles beaucoup plus amples spirituellement d’un homme d’il y a 1968 ans, qui, précisément pour s’opposer aux abus du pouvoir, aux abus de pouvoir de
l’autorité s’était fait clouer sur une croix, au nom d’une fraternité et d’un égalitarisme universels. Il s’appelait Jésus de Nazareth et selon moi il a été et il est resté le plus
grand révolutionnaire de tous les temps. Je n’ai pas voulu m’avancer sur des parcours, des sentiers que je ne pourrais parcourir qu’avec difficulté, comme la
métaphysique ou justement la théologie, avant tout parce que je n’y comprends rien ; en second lieu parce que j’ai toujours pensé que si Dieu n’existait pas il faudrait
l’inventer. Exactement ce qu’a fait l’homme depuis qu’il a mis pied sur terre. Je suis donc parti des évangiles dits apocryphes. Apocryphe veut dire faux, en effet c’étaient
des gens ayant vécu : ils étaient vivants en chair et en os. Seulement l’Église supportait mal, jusqu’à il y a quelques siècles, que d’autres personnes qui n’étaient pas de
confession chrétienne, s’occupent précisément de Jésus. Il s’agit d’écrivains, d’historiens, arabes, arméniens, byzantins, grecs qui, en s’approchant de la question, en
parlant de la figure de Jésus de Nazareth, l’ont fait, je dirais avec déférence, avec grand respect. Tant et si bien qu’encore aujourd’hui c’est précisément le monde de
l’Islam qui continue à considérer, toute de suite après Mahomet et encore avant Abraham, Jésus de Nazareth comme le plus grand prophète qui ait jamais existé. Là où
au contraire le monde catholique continue à considérer Mahomet comme quelque chose de moins qu’un goujat. Et je dirais que c’est quelque chose qui parle en faveur
de l’Islam. De l’Islam sérieux, n’ayons pas des idées fausses).
En réalité Jésus n’est presque jamais nommé dans ces dix chansons, il est l’arrière-fond de toutes ; Pilate est nommé une fois, les voleurs crucifiés dans deux chansons, et les
autres textes parlent de Marie et de Joseph ; seuls les septième et huitième chansons évoquent Jésus et sa crucifixion. Le disque commence par un bref Laudate Dominum de 22
secondes pour se terminer par un Laudate hominem de trois minutes vingt-six, de la louange de Dieu à la louange de l’homme, c’est le sens général du disque de De André ; et le «
dominum » peut être interprété de diverses façons, comme « Seigneur » au sens religieux, ou comme « maître, pouvoir » , c’est probablement ce que veut dire De André :
Laudate hominem
Louez l’homme
No, non devo pensarti figlio di Dio
Non je ne dois pas te penser fils de Dieu
ma figlio dell'uomo, fratello anche mio.
mais fils de l’homme, et aussi mon frère.
Ma figlio dell'uomo, fratello anche mio.
Laudate hominem.
Car la seconde chanson, L’infanzia di Maria, empruntée au Proto évangile de Jacques, qui raconte la naissance et la jeunesse de Marie, ainsi que celle d’Élisabeth et Zacharie, les
parents de Jean-Baptiste, jusqu’à l’assassinat de Zacharie par les soldats d’Hérode (3) , est aussi l’histoire de la première victime du pouvoir, Marie, expulsée du Temple à 12 ans
lorsqu’elle devient impure, c’est-à-dire quand elle a ses premières règles, et mariée contre son gré à un vieillard qui ne la désire pas, Joseph. Puis après Il ritorno di Giuseppe,
stupéfait de retrouver Marie enceinte alors qu’il l’a quittée vierge, vient l’explication de Marie dans Il sogno di Maria. Joseph revient dans un décor de désert, une « étendue de sciure
», évocation du métier de Joseph, mais aussi « prison sans frontières », symbole de la société injuste dans laquelle vivra Jésus (et dans laquelle nous vivons encore) et contre
laquelle il va lutter ; et sa conception symbolise probablement aussi la naissance de la révolte contre cette société : la prière de l’ange annonciateur est aussi la prédiction de la
naissance d’une espérance de libération. mais ce n’est pour le moment qu’un beau rêve :
le mie braccia divennero ali,
Mes bras devinrent des ailes
corsi a vedere il colore del vento,
je courus voir la couleur du vent
volammo davvero sopra le case
Nous avons vraiment volé au-dessus des maisons
scendemmo là, dove il giorno si perde
nous sommes descendus là où le jour se perd
a cercarsi da solo, nascosto fra il verde.
en se cherchant seul, caché dans le vert.
Et Joseph ne répond que par un geste humain affectueux, ses doigts posés légèrement sur le front de Marie. La première partie du disque se termine par l’Ave Maria, hymne à toutes
les femmes et à toutes les mères, « femmes un jour et puis mères pour toujours ».