Quelques auteurs compositeurs interprètes avant les cantautori
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Quelques auteurs-compositeurs-interprètes avant les « cantautori »
Armando Gill, Rodolfo De Angelis, E.A. Mario, Oscar Spadaro...
Au début des années 1960, Enrico De Angelis invente le mot de « cantautore » pour désigner les chanteurs qui écrivent eux-mêmes texte et partition des
chansons qu'ils interprètent (Voir nos ouvrages La chanson en Italie, des origines aux lendemains de 1968, Presses Universitaires de Provence, 2019, et La
chanson dans la culture italienne, Champion, 1999). Mais bien avant, dès la fin du XIXe siècle, naquirent des chanteurs compositeurs, auteurs et
interprètes de leurs propres chansons, par amour de la chansons et de la poésie, et pour mieux chanter la beauté et la grandeur de leur ville (la beauté de
Naples) ou de leur région, ou tout simplement le goût d'une meilleure forme de chanson.
1. -Armando Gill (1877-1945)
C'est un des premiers et des plus importants. Il était né dans une famille aristocratique de Naples le 23 juillet 1877, sous le nom de
Michele Testa, troisième de six enfants de Pasquale Testa Piccolomini et Concetta Saracino. Son père disait descendre de la grande
famille siennoise Piccolomini mais était propriétaire d'une petite distillerie. Dès l'âge de 9 ans, il fut envoyé au Collège (l'istituto
Chierchia) dans le but de faire de grandes études d'avocat, qui était le rêve des grandes familles bourgeoises et aristocratiques.
Michele fait de bonnes études et étonne aussitôt ses professeurs par son habileté poétique d'improvisateur. Après avoir passé son
baccalauréat, il s'inscrit à la Faculté de Droit de Naples, mais abandonne ses examens avant même d'avoir passé sa licence, il sait que
sa vocation est ailleurs, mais surtout, dit-on, pour suivre une séduisante actrice d'un des cafés-chantants qu'il affectionnait. Son père est
furieux, et pour ne pas l'embarrasser, Michele prend le nom de scène de Armando Gill, emprunté à celui du spadassin Martino Gill, héros
populaire des fascicules hebdomadaires de l'éditeur Sonzogno, spadassin au service du roi Philippe II.
Ainsi il manifeste son intention de créer un personnage qui n'a plus rien à voir avec la réalité sociale de Michele Testa, et en ce sens il
est loin des « cantautori » qui voulaient au contraire exprimer leur propre réalité humaine (Voir sur ce point la
Tesi di Laurea de Fabio Strazzer, La canzone d'autore in Italia, il testo tra musica e poesia, Università Ca' Foscari, 2015 -Accessible
sur Internet) : c'est un personnage de viveur de la bourgeoisie napolitaine, tombeur de femmes, séducteur, élégant, vêtu d'un frac,
avec un nœud papillon blanc, un monocle pour cacher qu'il louchait ; il avait toujours un gardénia ou un camélia à la boutonnière, et
sa mèche de cheveux noirs qu'il repoussait sur sa tête d'un geste élégant ; même sa voix assez aiguë de fausset, qui fut la base de
nombreuses caricatures, faisait partie de ce personnage d'acteur, que le public du Salon Marguerite puis du Théâtre du Trianon
adorait et redemandait toujours. Un personnage d'acteur de théâtre ! Il présentait parfois ses chansons dans un concert en disant :
« Vers d'Armando, musique de Gill, interprété par Armando Gill » ! Ou il se faisait présenter avant d'entrer en scène par un : «
Armando simple poète, Gill le musicien, Armando Gill, l'artiste ».
Très suivi en Italie, à Rome en particulier, il a aussi parcouru de nombreuses villes d'Europe, mais il n'aime pas le bateau et refusa
toujours d'aller chanter aux États-Unis où il avait été invité. Il avait un grand art de séduire le public, et pouvait même improviser une chanson sur scène à la
demande du public ; il avait déjà 53 ans quand il vit de la scène une jeune spectatrice qui lui plut, et à qui il chanta une déclaration d'amour : c'est ainsi
qu'en 1925, il épousa la jeune Assunta Irma Fricchione.
Il fut aussi le premier à avoir créé le marketing commercial de ses chansons en 1918 : pour Come pioveva, Naples apparaît un matin couverte d'affiches
qui représentaient un parapluie, était-ce une nouvelle marque de parapluie ? Mais une semaine après, apparaissent les affiches avec le parapluie et le titre
de la chanson, puis encore une semaine plus tard une dernière affiche avec tout le programme de la chanson et le nom de l'auteur. En 2008 est institué un
nouveau prix de la chanson dédié à Armando Gill.
En 1943, il cède son catalogue aux éditions Bideri, et se retire dans son palais, où il meurt dans la nuit du 31 décembre 1944 au 1er janvier 1945, entouré
de sa jeune épouse, de ses chats, de ses chiens et de ses petits oiseaux ; on dit même qu'il avait appris à un de ses canaris le refrain de Come pioveva.
Mais c'était le temps de la libération de Naples (à partir des 4 journées de lutte du 27 au 30 septembre 1943, et les troupes américaines sont dans la ville),
et sa mort passa un peu inaperçue.
Stornelli del cuore (1912)
Un premier filon d'Armando Gill est celui de la chanson populaire. Il avait commencé à fréquenter les « periodiche », ces rencontres dans les salons des
grands appartements bourgeois où on invitait les chanteurs en laissant les fenêtres ouvertes pour être entendu du peuple de la rue ; il était aussi invité
dans les cafés-chantants et les premiers théâtres de variété. C'était le temps d'après l'Unité, où on pensait que la culture populaire disparaîtrait au profit de
la « modernité » de la révolution industrielle, et qu'il fallait donc archiver les chansons populaires pour être sûrs de les conserver, ce que commencèrent à
faire Camillo Cavour et son secrétaire Costantino Nigra pour les chants populaires du Piémont (1888). Les chanteurs reprennent également volontiers les
formes et les rythmes de ces chants, c'est ce que fit Armando Gill dans ses débuts, peut-être aussi parce qu'il n'avait pas de formation musicale, mais
connaissait bien depuis son enfance la vie des quartiers populaires de Naples, où se trouvait la palais de ses parents. Plus tard, il écrivit même Stornelli
neri,une chanson profasciste favorable à la conquête de l'Éthiopie.
Le mot « stornello » vient du provençal « estorn » = débat, dispute poétique, en italien le verbe « stornare » = tourner, poésie populaire de l'Italie
centrale et méridionale à partir du XIIe siècle, qui constituait un échange de vers entre deux poètes concurrents (d'où l'autre étymologie possible, le toscan
« disturna », même sens de débat poétique) composée de trois vers, un vers de 5 syllabes évoquant généralement une fleur, et deux hendécasyllabes
dont le deuxième rime avec le premier pentasyllabe. Dans d'autres régions il s'appelle aussi « fioretto » (Sicile), « fiore » (Marches), « strunello »
(Ligurie) ; avec Pietro Mascagni dans Cavalleria rusticana (1890), le stornello entre dans la musique classique.
Stornelli del cuore
(Vers et Musique d’Armando Gill
1912 - Interprète : Olimpia d’Avigny)
Fior di Gaggia ...
Fleur de cassier
Io nell’amar non ci ha creduto mai :
moi je n’ai jamais cru à l’amour
il credere alla donna è una follia ;
croire en la femme est une folie ;
fior di Gaggia.
Fleur de cassier.
Ma quando, un giorno, a caso, l’incontrai
Mais quand un jour par hasard je la rencontrai
con gli occhi belli di malinconia
avec ses beaux yeux pleins de mélancolie
subitamente me ne innamorai.
aussitôt j’en tombai amoureux.
Fior di Gaggia ...
Fleur de cassier ..
Gioca l’amore, gioca e si trastulla ...
L’amour joue, il joue et il s’amuse
La vita senza amor non vale nulla.
La vie sans amour ne vaut rien.
Fior di Mughetto ...
Fleur de muguet
La bella per la quale io vado matto
La belle dont je suis fou
E’ tutta grazia e non tiene difetto,
est toute de grâce et n’a point de défaut
Fior di Mughetto
Fleur de muguet
Tiene un visino che è così perfetto
elle a un petit visage qui est si parfait
Un corpicino che è così ben fatto
elle a un petit corps qui est si bien fait
Che una madonna par del Tintoretto,
qu’on dirait une Vierge du Tintoret,
Fior di Mughetto.
Fleur de muguet.
Gioca l’amore gioca e si trastulla ...
L’amour joue, il joue et il s’amuse...
La vita senza amar non vale nulla.
La vie sans amour ne vaut rien.
Fior d’Amaranto ...
Fleur d’amarante...
Negli occhi tuoi v’è tanto sentimento
dans tes yeux il y a tant de sentiment
Per carità non mi guardare tanto
par charité, ne me regarde pas tant
Fior d’Amaranto ...
Fleur d’amarante...
Starei tutta la vita a te d’accanto
Je resterais toute ma vie à côté de toi
Per dare sfogo a questo mio tormento
pour épancher mon tourment
Per dare tregua al mio perenne pianto
pour donner trêve à mes pleurs éternels
Fior d’Amaranto ...
Fleur d’amarante...
Gioca l’amore, gioca e si trastulla ...
L’amour joue, il joue et il s’amuse...
La vita senza amar non vale nulla.
La vie sans amour ne vaut rien.
Fiorin di Noce ...
Petite fleur de noyer...
La bella mia quando ricama o cuce
ma belle quand elle brode ou coud
Canta uno stornellino a mezza voce,
chante à mi-voix une petit stornello,
Fiorin di Noce ...
Petite fleur de noyer...
La piccola manina va veloce,
La petite main va vite
Scintilla l’ago, il filo si riduce,
l’aiguille scintille, le fil se réduit
E il nome mio col suo rimane in croce,
et mon nom reste en croix avec le sien,
Fiorin di Noce ...
Petite fleur de noyer...
Gioca l’amore, gioca e si trastulla ...
L’amour joue, il joue et il s’amuse...
La vita senza amar non vale nulla.
La vie sans amour ne vaut rien.
Déjà en 1909, Armando Gill avait composé ce stornello moins régulier :
Stornelli montagnoli e campagnoli Comptine de la montagne et de la campagne
(Testo : Armando Gill
Musica : Alfredo Mazzucchi, (1878-1972) 1909)
Del mio paesello
De mon petit village
dei miei prati e la campagna
de mes prés et de ma campagne
della montagna - canto gli amor.
de ma montagne je chante les amours.
Cinta di rami - V'è una bella fattoria
Enveloppée de branches – Il y a une belle ferme
La vita mia - Ivi passo notte e dì
ma vie – je passe ici nuit et jour
Là tra il canto d'un uccello
Là dans le chant d'un oiseau
mormora il ruscello
murmure le ruisseau
sempre chiaro e bello.
Toujours clair et beau.
Quant'armonia. Quanta poesia.
Que d'harmonie. Que de poésie.
Una bella contadina
Une belle paysanne
che sera e mattina
qui le soir et le matin
sempre m'è vicina.
Est toujours à côté de moi.
Così in montagna - l'amore si fa.
C'est comme ça dans la montagne – qu'on fait l'amour.
Quando di maggio - le ciliege sono nere
Quand en mai – les cerises sont noires
con che piacere si fa l'amor.
Avec quel plaisir on fait l'amour.`
Lei sulla scala - Io di sotto che la reggo
Elle sur l'échelle – Moi dessous qui la soutient
E tutto veggo - Foglie, frutti e cielo ancor.
et je vois tout – Feuilles, fruits et aussi le ciel
Quando il cesto è pieno io godo
Quand le panier est plein je jouis
Lei discende a modo
Elle descend comme elle peut
Ma un cattivo chiodo
mais un vilain clou
la veste impiglia – Lei si scompiglia
accroche sa robe – Elle se trouble
Scende ancora ma si straccia
elle descend encore mais elle se déchire
si fa rossa in faccia
son visage devient rouge
poi mi cade in braccia
et puis elle me tombe dans les bras.
sotto al ciliegio l'amore si fa.
Sous le cerisier on fait l'amour.
Quando di luglio – il bel grano è maturato
Quand en juillet - le beau blé a mûri
Rosina al prato – Cantando va
Rosina au pré – va en chantant
Con la sua falce – Ella miete tratto tratto
avec sa faux - elle moissonne
Mentr'ioi soppiatto – Sto a mirar le sue beltà Moi je regarde furtivement – Je regarde ses beautés
quelle sue movenze franche
ses mouvements gracieux et francs
quelle braccia bianche,
ses bras blancs,
quell'andar dell'anche
ce mouvement des hanches
mi dan tormento - Mio Dio che sento me tourmentent – Mon Dieu, qu'est-ce que je sens.
Corro a darle un bel bacione
Je cours lui donner un gros baiser
lei mi dà un ceffone
elle me donne une claque
si fa un ruzzolone
on fait une dégringolade
così nel grano l'amor si fa !
C'est comme ça qu'on fait l'amour dans le blé !
Dalle casette sparse intorno per le vall i Depuis les petites maisons éparse dans les vallées
cantano i galli prima del mattin.
Les coqs chantent avant le matin.
È l'alba : il sole – bacia i monti e le colline
C'est l'aube : le soleil -embrasse les montagnes et les collines
e per le chine – vanno i greggi e i pastor.
Et sur les pentes - passent les troupeaux et les bergers.
Per la strada polverosa
Sur la route poussiéreuse
Quando incontro Rosa
Quand je rencontre Rose
che fa la ritrosa
qui fait sa timide
ma poi pian piano ci diam la mano
mais peu à peu nous nous donnons la main
ed al lavoro andiam giulivi
et nous allons joyeusement au travail
mentre tra gli ulivi
tandis que sous les oliviers
ci baciam furtivi
nous nous embrassons furtivement
Così in montagna l'amor si fa.
C'est ainsi qu'à la montagne on fait l'amour.
Quando in ottobre la vendemmia a far sen viene
Quand en octobre on vient faire les vendanges
come sa bene - l'uva pigiar
comme elle sait bien fouler le raisin
Tinello nuovo – Gambe bianche, vino d'oro
Cuve nouvelle – Jambes blanches, vin d'or
O che tesoro – che guadagnerà il padron
O quel trésor – gagnera le patron
se mi porge d'uva un poco.
S'il me tend un peu de raisin.
Mi combina un gioco
Elle me combine un jeu
che mi mette il foco
qui me met en feu
Grappol maturo -Ma cuore duro
Grappe mure – Mais cœur dur
e io le fo : vienmo vicino
Et moi je lui fais : viens près de moi
se no sporco il vino,
sinon je souille le vin
Ti rovescio il tino
Je renverse ta cuve
Così in vendemmia – L'amore si fa.
C'est comme ça que pendant les vendanges – on fait l'amour.
Quando al tramonto, noi sentiam della campana Quand au coucher du soleil, nous entendons l'écho
l'eco lontana, pei campi andar lointain de la cloche, nous allons dans les champs
l'erba raccolta carichiam sull'asinella nous chargeons l'herbe récoltée sur la petite ânesse
lei monta in sella, mentre ch'io la seguo a piè ;
elle monte en selle, tandis que je la suis à pied ;
Lieti nel tramonto d'oro,
heureux dans ce couchant doré
lasciano il lavoro
les paysans quittent leur travail
i contadini e in coro
et en chœur
cantan per via. Quanta poesia.
Ils chantent sur la route. Que de poésie.
Mentre ch'io le fo coraggio
Tandis que moi je lui donne courage
lungo il nostro viaggio
le long de notre voyage
che sposiamo a maggio.
Car nous nous marions au mois de Mai.
Così al tramonto l'amor si fa.
C'est ainsi qu' au couchant on fait l'amour.
Incertitude : autrefois on disait « fare all'amore » = fréquenter, et le « moroso » était le fiancé. Aujourd'hui, « fare l'amore » (ou « fare sesso » indique
l'acte sexuel. Qu'en est-il pour cette chanson de Gill ? L’ambiguïté est grande !
Gill a utilisé aussi d'autres rythmes populaires, comme le « rispetto ». C'était une forme de poésie lyrique populaire monostrophique en hendécasyllabes,
sur le schéma ABABCCDD, quatre vers à rimes alternées suivis de quatre autres à rimes plates. Le « rispetto » = respect » est une forme élégante
destinée à rendre hommage à la personne aimée ; on lui opposait le « dispetto » = le dépit, la méchanceté. Il a évolué, selon les époques et les régions
d'Italie, jusqu'à se confondre quelquefois avec le stornello. Ici il s'agit plutôt, sous l'ironie, d'un « dispetto » qui suit un « rispetto »:
Rispetti all'antica
Couplets à l'ancienne
(Testo e musica : Armando Gill
Interprète : Roberto Ciaramella, 1887-1961, 1922)
Prima di lasciar voi, mio dolce amore
Avant de vous quitter, mon doux amour
dovrei vedere i monti camminare
je devrais voir marcher les montagnes
che il giorno fosse di quarantottore
que le jour fût de quarante huit heures
e che di pietra diventasse il mare
et que la mer devienne de pierre
Se tutto questo non potrà accadere
Si tout cela ne peut pas arriver
sempre nel cor vi vo' tenere
je vous garderai toujours dans mon cœur
se tutto ciò giammai potrà avvenire
Si tout cela ne peut jamais se passer
prima di lasciar voi dovrei morire !
Avant de vous quitter je devrais mourir.
Così l'amore
Ainsi l'amour
che viene e va
qui vient et va
gioia e dolore
joie et douleur
sempre ci dà !
nous donne toujours !
La casa benedico ove sei nata
Je bénis la maison où tu es née
la casa patria che ti diè la vita ;
la maison paternelle qui te donna la vie ;
la cara fonte che ti ha battezzata,
la chère fontaine qui t'a baptisée,
le fresche valli che t'hanno fiorita
les fraîches vallées qui t'ont vue fleurir
e gli occhi benedico e i tuoi capelli
et je bénis tes yeux et tes cheveux
che mai non ne ho veduti così belli...
je n'en ai jamais vu de plus beaux...
le grazie benedico del tuo viso
je bénis les grâces de ton visage
che m'hanno dato in terra il Paradiso.
Qui m'ont donné le Paradis sur terre.
Per quante gocce d'acqua conta il mare
Pour toutes les gouttes d'eau que compte la mer
per quante stelle conta il ciel sereno
pour toutes les étoiles que compte le ciel serein
per tante ne ho fatt'io lagrime amare
pour toutes j'ai versé des larmes amères
per fare intenerir quel duro seno
pour attendrir ton sein dur
e quando alfin credevo esser amato
et quand je croyais enfin être aimé
lei per un altro amore m'ha lasciato
pour un autre amour, elle, elle m'a quitté
e quando alfin credevo fosse mia
et quand je pensais qu'elle allait enfin être à moi
uno più bello me la portò via !
Un homme plus beau me l'a emportée !
Lei mi giurava amore e non m'amava,
Elle me jurait son amour et elle ne m'aimait pas
lei mi giurava fede e non ne aveva
elle me jurait sa foi et n'en avait pas
con ogni giovanotto che incontrava
Avec chaque jeune homme qu'elle rencontrait
faceva la civetta e ci rideva
elle faisait la coquette et s'en riait
ed io che per amarla l'ho stimata
et moi qui parce que je l'aimais l'ai estimée
lei mi lasciò così falsa ed ingrata
elle m'a quittée dans le mensonge et l'ingratitude
egli non la voleva l'ha ottenuta
Il ne voulait pas d'elle, il l'a obtenue
e Lei senza coscienza s'è perduta.
Et elle sans s'en rendre compte elle s'est perdue.
Gina mia
Ma Gina
(Versi e Musica di Armando Gill
1911
Interprete : Nina De Charny)
Conoscete voi la mia Gina? (ripete)
Se non la conoscete, allor si sa,
Voi non sapete cosa sia beltà.
lo la vedo sera e mattina, (ripete)
Quando dal suo lavoro viene e va,
Gentile e bella che incantar mi fa!
Ed è alla grazia delle sue bellezze
Che mi porta amore,
Ed è all'incanto delle sue fattezze
Che si ferma il cor !
Ma se domando a Gina
Perchè il mio core non mi ridà,
Risponde, biricchina,
Che non m'ha visto, che non mi sa!
La boccuccia della mia Gina (ripete)
E' il più grazioso incastro natural,
Coralli e perle, che non v'ha l'egual
Lei sorride sera e mattina, (ripete)
E quando mi sorride mi viene mal,
E se mi parla un fremito m'assaI!
Ed è al sorriso della bella bocca
Che mi porta amore,
Ed è all'incanto che così mi tocca
Che vi resta il cor !
Gli occhi belli della mia Gina (ripete)
Sono profondi e azzurri come il mar,
Quanti misteri lasciano sognar!
Lei mi guarda sera e mattina (ripete):
lo penso che, se il mare sa ingannar,
Di quei begli occhi non ti puoi fidar
!
Ed è nel mare di quegli occhi belli
Che mi porta amore,
Ed è nel fondo di quei due gioielli
Che ci perdo il cor
I capelli della mia Gina (ripete)
Son lunghi e biondi come fili d'or ;
Hanno il valore del più gran tesoro
Lei li intreccia sera e mattina (ripete)
E li dispone così ben tra lor,
Che l'arte non farìa miglior lavor!
Ed è nei nodi delle treccie bionde
Che mi porta amore,
Ed è in quei nodi ch'ella mi nasconde
m'imprigiona il cor
Gina était un prénom féminin souvent utilisé, mais il n'est que la modification phonétique de prénoms comme Regina, Giorgina, Luigina, Virginia, Eugenia...
car il n'y a pas de « santa Gina », et on la fête le 17 octobre pour la sainte Luigia, dont on considère que c'est le diminutif. Il a été relancé par Gina
Lollobrigida (1927- ).
Nina de Charny (1889-??), de son vrai nom Giovanna Cardinin, était une « sciantosa », figure des cafés-chantants et des théâtres de Variétés, avec
lesquels travaillait beaucoup Armando Gill ; elle commence en 1906 au Théâtre Mercadante où elle a beaucoup de succès avec ses chansons
napolitaines, mais elle s'arrête en 1913, et on n'a plus de nouvelles d'elle.
Une autre chanson de 1911 est intéressante ; Gill n'était pas un chanteur politique, mais un auteur satirique très habile. Il a écrit aussi en 1912 Dirimpetto
al mio quartiere, une chanson qui est une négation de l'esprit militariste : un soldat en sentinelle n'a en réalité d'attention que pour sa belle Béatrice, dans
une ignorance des choses de la guerre, une sorte de pacifisme naïf. Ici on est en pleine guerre de Libye : les Italiens
reprennent l'offensive pour se constituer un empire colonial, et ils conquièrent les deux parties de la Libye, Tripolitaine et
Cyrénaïque, possessions de l'empire ottoman qui se rapprochait alors de l'empire austro-hongrois, à une époque où
l'Angleterre contrôlait déjà l'Égypte, la France la Tunisie, ne laissant disponible en Afrique du Nord que la Libye. Les plans
d'invasion, préparés dès 1885, devaient racheter l'Italie de ses défaites en Abyssinie (Adoua 1896) ; on pensait aussi faciliter
la solution des problèmes d'émigration. Tripoli fut occupée en octobre 1911, puis Benghasi, capitale de la Cyrénaïque. On crut
la victoire assurée, sous-estimant les capacités de résistance des Jeunes Turcs au pouvoir depuis 1908, et la lutte fut dure
dans les oasis jusqu'à l'annexion de 1912 ; confirmée par le Traité de Lausanne. Mais ce fut une déception, par rapport aux
grandes espérances antérieures de l'Italie. Et Gill se moque un peu de tout cela dans sa lettre d'un soldat (Pasquale) à un
ami, lui aussi militaire.
Le langage est inspiré du parler populaire d'alors, avec la création de jeu de mots comme le verbe « bengasiare », ou la
référence à la peur par l'allusion au buste doré de San Gennaro à la cathédrale de Naples (avere la faccia gialla), ou la
reprise d'un usage populaire de maturation des pommes que l'on enterrait dans des trous creusés dans la terre, qu'on
recouvrait de sciure et de terre, et que des femmes venaient chaque jour retourner pour qu'elles mûrissent régulièrement (le
mele annurche).
Pasquale va a Tripoli Pascal va à Tripoli
(Testo e musica : Armando Gill
1911)
Già tutto è pronto e all'ordine Tout est déjà prêt et en ordre
lo zaino e la gavetta, le sac et la gamelle
fucili, baionetta fusil et baïonnette
la carne e il tascapan la viande et la musette,
fatte curaggio pensame si aie courage et pense à moi
no m"a fai verè cchiù nera a cosa, autrement tu me fais voir les choses encore plus noires
io me ne vado Je m'en vais
a Tripoli per i fratelli nostri à Tripoli pour nos frères
e il nostro onor, et pour notre honneur
fatte curaggio e pensame Prends courage et pense à moi
perché dei Turchi io torno parce que je reviendrai vainqueur
il vincitor ! Rosina mia des Turcs ! Ma Rosine
noi abbiamo fatto un'avanzata, nous avons fait une avancée
noi stiamo avanzando, nous sommes en train d'avancer
noi avanzammo l'anima nous avons avancé en esprit
de' danari avanzammo, nous avons avancé de l’artgent
abbiamo fatto un avanzamento nous avons fait un avancement
con un movimento di accerchiamento par un mouvement d'encerclement
di coordinamento, de coordination
rapidamente, come il vento in un momento, rapidement, comme le vent en un moment
che i Turchi hanno avuto un imbiscottimento, où les Turcs ont eu un embiscottement,
se ne sono scappati, siamo andati a Tripoli ils se sont échappés, nous sommes allés à Tripoli
e li abbiamo messi in trappola ; a Bengasi et nous leur avons tendu un piège ; à Bengasi
loro si credevano che stavano. bene di casa ils croyaient être bien chez eux
ma noi abbiamo detto qua bengasiate voi, mais nous avons dit : si vous êtes à Bengasi
bengasiamo 'anche noi, stevano i bengasiani nous sommes aussi à Bengasi, les bergasiens y étaient
ma chelli nunn"o tenevano cchi・chillo territorio mais le territoire ne leur appartenait plus
Chill'e Turche ce credevano Ces Turcs nous croyaient
senza curaggio e vile, sans courage et lâches,
ca nuje nave nun ne tenevamo que nous n'avions aucun navire
né palle e né fucile, ni balles et ni fusils
mo invece se ne scappano Au contraire maintenant ils se sont enfuis
e fanno e facce gialle et ils ont la face jaune de peur
e per dietro alluccano « all'anema d"e palle ! » et par derrière ils hurlent : « quelles belles balles (couilles) ils avaient ces canons »
Rusina mia nun chiagnere Ma Rosine, ne pleure pas
nun me te fa verè accussi ’ncucciosa Ne te montre pas si obstinée
fatte curaggio pensame Prends courage et pense à moi
ca quanno torno io te farraggio sposa car quand je rentrerai je t'épouserai
io me ne vado a Tripoli Je m'en vais à Tripoli
con la medaglia io tornerò al valor Je reviendrai avec une médaille de la valeur
fatte curaggio e pensame Aie courage et pense à moi
perché dei turchi io torno il vincitor ! Parce que des Turcs je reviendrai vainqueur !
Rusina mia quanno andaramo nella Ma Rosine quand nous sommes allés en Cyrénaïque
Cirenaica appicciaimente tutte 'e fabbriche dei cerini, nous avons mis le feu à toutes les usine d’allumettes
ma 'e risate furono a Caricarè, mais c'est à Caricarè qu'on a rigolé,
quelli i Turchi avevano les Turcs avaient
visto gli italiani à Caricalà dice chisti nun veneno vu les Italiens à Caracalà et ils se sont dit qu'ils ne viendraient pas
sulle montagne di Caricarè e se andarono là sopra, sur les montagnes de Caricarè et ils s'en sont allés là haut
gli italiani arrivaieno e allora les Italiens sont arrivés
il loro spavento fu quando et alors ils furent pris d'épouvante
noi arrivaiemo a Viggili tutti a Viggili, dice nous sommes arrivés à Viggili, tous à Viggili
forse non è la città di come ti vuoi levà, disse Ce n’est peut-être la pas la ville où tu voudrais vivre
e questi ci arrovinano pure a noi, et ceux-là nous démolissent aussi,
intanto ti vorrei en attendant je voudrais
far sentire quello che mi scrive te faire écouter ce que m'écrit
un amico mio da Tripoli, un de mes amis de Tripoli
qualche cosa di effervescente : quelque chose d'effervescent :
Al mio amico Pasquale
A mon ami Pascal
Tutt'e surdate partono, Tous les soldats partent
Pasquale parte pure Pascal part aussi
si corre alla vittoria On court à la victoire
Rosi puo sta sicura. Rosine, tu peux en être sûre
Rusina mia nun chiagnere Ma Rosine ne pleure pas
nun me te fa verè Ne te montre pas
accussi ‘ncucciosa si inflexible
Al mio amico Pasquale À mon ami Pascal
soldato militare nell'esercito della fanteria di terra, soldat militaire dans l'armée d'infanterie de terre
a piedi d'Italia, il 22 reggimento, nella sesta compagnia, italien à pied, 22e régiment, sixième compagnie
e da cunsegnarsi nelle sue proprie mani à remettre à lui en mains propres personnelles
nelle sue proprie mani personali di lui à lui en mains propres personnelles
Al mio amico Pasquale À mon ami Pascal
soldat o militare nell'esercito della fanteria soldat militaire dans l'armée d'infanterie
di terra, a piedi d'Italian il 22 reggimento de terre, le 22 régiment
nella sesta commpagnia, da cunsegnarsi dans la sixième compagnie, à remettre
nelle sue proprie mani personali di lui à lui en mains propres personnelles
Se non lo si trova, la danno al caporale Si on ne le trouve pas, on la donne au caporal,
che quando lui si arrritira qui quand il se retire
sape a chi la deve dare. Il sait à qui il doit la donner.
Questo viene a me Rusì : Voilà ce qui m'arrive, Rusì :
Carissimo Pasquale Très cher Pascal
noi abbiamo fatto un atto grande Nous avons fait un acte important
nell'oasi di Tripoli dans l'oasis de Tripoli
come tu avrai potuto immaginare comme tu auras pu l'imaginer
e ascuserai se io approfittando dell'amicizia et tu m'excuseras si je profite de ton amitié
te lo faccio in carta questo sfogo dell'animo mio en t'écrivant sur papier cet épanchement de mon esprit
perché me lo sono trattenuto per parecchi giorni. parce que je l'ai retenu pendant plusieurs jours.
I Turchi non appena noi siamo andati alle oàsi, Les Turcs, à peine sommes-nous arrivés à l'Oasis
che loro tenevano occupati, hanno avuto in paura qu’ils occupaient, ont eu une grande émotion de peur
una grande commozione e noi abbiamo detto : et nous avons dit :
appulizzateci l'Oàsi e fate il vostro dovere ! Nettoyez l'Oasis et faites votre devoir !
Essi se ne sono andati alla ritirata, ma lì Eux ils sont allés en retraite, mais là
sono stati inseguiti dalle nostre mitragliatrici ils ont été poursuivis par nos mitrailleuses
è avvenuto uno scioglimento generale di tutto il est arrivé un dégagement général de tout
il corpo dell'esercito, tanto. che essi si sono trovati le corps de l'armée, si bien qu'ils se sont trouvés
lo stesso per i loro bisogni di andare a l'aria aperta ! Comme pour leurs besoins devoir aller en plein air !
Chillo, Rusipa mia, hai veré che è succiesso là iTurchi ! Ma Rosine, si tu voyais ce qui est arrivé aux turcs !
Là ogni giorno è.una vittoria, Là chaque jour est une victoire
poi registrerà la storia et puis l'histoire enregistrera
come sacra memoria ogni nostra gloria ! Chacune de nos gloires comme une mémoire sacrée !
lo non veco l'ora 'e correre Je ne vois pas l'heure de courir
pe m'encuntrà co 'e Turche pour rencontrer les Turcs
aggia fa' cierte brognole Je dois en faire du jus de fruits
a usanz"e mele annurche comme on fait avec les pommes qui mûrissent
'e piglie a ponie a cauce a morse je les prends à coups de poings, à coups de pieds, je les mords
a vota vracce apprimma 'e sfonno è stommaco parfois je les gifle d'abord et je leur défonce l'estomac
a schiaffi. Prima sfondero’ loro lo stomaco
je les claque. D'abord je leur défonce l'estomac,
addoppo ... 'e svito 'a faccia et après je leur dévisse la tête
Rusina mia nun chiagnere Ma Rosine, ne pleure pas
nun me te fa veré accussì 'ncucciosa ne te montre pas si inflexible
fatte curaggio, pensame aie courage et pense à moi
ca quanno torno io te farraggio sposa car quand je reviendrai, je t'épouserai
io me ne vado a Tripoli Je m'en vais à Tripoli
con la medaglia io tornerò al valor, Je reviendrai avec la médaille de la valeur
fatte curaggio e pensame Aie courage et pense à moi
perché dei turchi io torno il vincitor ! Parce que des Turcs je reviendrai vainqueur !
(Traduction revue par la Professeure Giusy Aliperta)
Armando Gill produisit ensuite un second filon de belles chansons lyriques en langue napolitaine, comme celles-ci :
Bella, ca bella si
Belle, que tu es belle
(testo e musica : Armando Gill
1919)
Mme so' scetato a ll'alba stammatina
Je me suis réveillé à l'aube ce matin
e aggiu menato 'a rezza 'mmiez'ô mare.
Et j'ai jeté mon filet dans la mer
A 'na fenesta steva Carulina
À une fenêtre se tenait Caroline
e mme guardava cu chill'uocchie chiare.
Et elle me regardait avec ses yeux clairs
'Ncantato pe' guardá chella sirena
Fasciné à regarder cette sirène
aggiu perduto a mare 'a rezza chiena.
J'ai perdu en mer tout le contenu de mon filet.
Bella, ca bella sî,
Belle, que tu es belle
chi te po' maje scurdá.
Qui peut jamais t'oublier
Si 'st'uocchie doce mme fanno murí,
Si tes yeux doux me font mourir
so' pure 'a luce ca mme fa campá.
Ils sont aussi la lumière qui me fait vivre.
'A cchiù 'e 'nu mese tengo, 'int'a stu core,
Depuis plus d'un mois, sont cloués dans mon cœur
'nchiuvate ll'uocchie suoje turchine e doce.
tes yeux bleus et doux
E i' ca nun aggio maje saputo 'ammore
Et moi qui n'ai jamais connu l'amour
mo sto' perdenno 'a pace, 'o suonno e 'a voce. J'en perds la paix, mon sommeil et ma voix.
E mme ne fa jettá lácreme amare,
et cela me fait verser des larmes amères
pe' quanta stelle 'ncielo e 'a rena a mare. De voir toutes les étoiles dans le ciel et le sable dans la mer.
Bella, ca bella sî...
Belle que tu es belle...
Mm'ha ditto mamma : “Abbada, statte attiento Maman m'a dit : “Fais bien attention
e nun te ce 'ncaná, ch'è senza core.
Ne t'entête pas ; car elle est sans cœur
Chell'è 'na vela, avota comm'ô viento.
C'est une voile qui tourne comme le vent
Nce sta chiagnenno cchiù 'e 'nu piscatore”.
Elle a fait pleurer plus d'un pêcheur”.
Ma senza ll'uocchie belle 'e Carulina,
Mais sans les beaux yeux de Caroline
i' che nce campo a fá pe' 'sta marina ?
Qu'ai-je à faire de vivre pour ce port ?
Bella, ca bella sî...
Belle, que tu es belle...
On y retrouve les thèmes et les images de la poésie traditionnelle napolitaines, la présence de Caroline, qui apparaît comme séduisante mais source de
malheur, théme qui deviendra dominant dans les oeuvres de Gill postérieures aux années 1920.
VARCA D'AMMORE
Barque d'amour
(Testo e musica : Armando Gill
1919)
I
Quanno la sera stévamo
Quand le soir nous étions
vicino a 'sta marina,
près du bord de la mer
quanno pe' me lucevano
quand brillaient pour moi
chill'uocchie 'e Carulina...
les yeux de Caroline...
Dint'a na varca a cònnola
Dans une barque en forme de gondole
nuje jévamo a sunná
nous étions en train de rêver
e 'a vocca soja cchiù tènnera
et d'une voix toujours plus tendre
sentevo 'e suspirá :
j'entendais soupirer
Voca luntano,
Rame loin
pòrtame ammore...
apporte-moi l'amour
pòrtame 'mmiez'ô mare...
emporte-moi sur la mer...
Damme 'sta mana,
Donne-moi ta main
pígliate 'o core...
prends mon cœur...
quanto te voglio amá !...
Combien je veux t'aimer !
II
Li ccase s'addurmevano
Les maisons s'endormaient
vicino a 'sta banchina...
près de ce quai
e nuje ce alluntanávamo
et nous nous somme éloignés
p''o mare 'e Margellina
sur la mer de Mergellina.
si 'e bbracce meje, stancánnose,
Si mes bras, parce qu'ils se fatiguaient,
lassavano 'e vucá...
cessaient de ramer...
'a voce soja, cchiù tènnera,
sa voix, plus tendrement,
turnava a suspirá :
recommençait à soupirer
Voca luntano...
Rame loin...
III
Li vvarchetèlle tornano
Les petites barques reviennent
p''o mare senza viento
de la mer sans vent
e 'e marenare cantano
et les marins chantent
sott'a na luna 'argiento...
sous une lune d'argent...
sola e malata, st'anema,
Seule et malade, cette âme
dint'a na varca va...
s'en va dans une barque...
penzanno a chella femmena
en pensant à cette femme
ca cchiù nun turnarrá !...
qui ne reviendra pas !...
Voca luntano,
Rame loin,
varca d'ammore,
barque d'amour,
pe' dó' cchiù futo è 'o mare...
là où la mer est plus profonde
ca 'mmiez'ô mare,
parce qu'au milieu de la mer,
perdette 'o core...
j'ai perdu mon cœur...
vide 'e mm''o fá truvá !...
Tâche de me le faire retrouver !...
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