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Storia dei popoli d’Italia e canzone (suite 3)
3) De l’Atlantide à Vénus et Ajax et à Alexandre le Grand (Dall’Atlantide a Venere e Aiace e ad Alessandro Magno) Commençons par l’Atlantide de Franco Battiato, de 1993. Platon (428-348 av.J.C.) est le premier auteur connu à raconter ce mythe dans son Timée et son Critias. L’Atlantide aurait été une île située devant les Colonnes d’Hercule, environ 10.000 ans av.J.C. dont le roi Atlas aurait été le fils de Poséidon (Neptune), dieu des mers depuis le partage de l’univers par les occupants de l’Olympe, Zeus (Jupiter) ayant la Terre et Hadès (Pluton) les Enfers ; l’île, plus grande que la Lybie chez Platon, aurait contrôlé une grande partie de l’Afrique jusqu’à l’Égypte et l’Europe jusqu’à l’Italie, mais au moment d’une guerre contre son adversaire principal, Athènes, un cataclysme l’aurait engloutie. Poséidon serait tombé amoureux d’une jeune fille mortelle de l’île alors inaccessible, et ils auraient eu dix enfants dont le premier aurait été Atlas, gouverneur d’un territoire divisé en dix îles, monarchie puissante abondamment riche et dotée de connaissances scientifiques et alchimiques, ayant en son centre un sanctuaire à Poséidon d’argent et d’orischalque, métal mystérieux, et une statue d’or du dieu. Puis après des années de bonheur, le côté humain des habitants l’emporta sur leur nature divine, suscitant la colère de Zeus qui la fit engloutir. Était-ce pour Platon le modèle utopique de la cité parfaite qu’il dessine dans plusieurs de ses œuvres, à l’opposé de la situation grecque entre 360 et 350 av.J.C. ? Il a en tout cas inspiré nombre d’utopies modernes à partir de la Renaissance, de Francis Bacon  (1561-1526) au Marquis de Sade (1740-1814). On continue aujourd’hui à discuter de son emplacement, la Crète, l’île grecque de Santorin, la Sardaigne, la Sicile, le Mont Argentario (Toscane) … ?, et de nombreux écrivains la visitent ou en décrivent les descendants, à partir de Jules Verne (1828-1905) dans Vingt mille lieues sous les mers (1870) ; on fait sur le même thème beaucoup de films, émissions vidéo, mangas … et chansons, dont celle de Franco Battiato (1945- ) en Italie, peut-être inspirée par celle de Donovan (1946- ) en 1968, et en tout cas par les textes de Platon, et par les théories philosophiques du philosophe George Ivanovitch Gurdjieff  (1866-1949) qui travaillait souvent au « café de la Paix ». Une autre île utopique, Thulé, est chantée entre autres par Francesco Guccini. L’Atlantide (Franco Battiato Caffé de la Paix 1993) E gli dei tirarono a sorte. Et les dieux tirèrent au sort. Si divisero il mondo : Ils se partagèrent le monde : Zeus la Terra, Zeus la Terre, Ade gli Inferi, Hadès les Enfers Poseidon il continente sommerso. Poséidon le continent submergé. Apparve Atlantide. Apparut l’Atlantide. Immenso, isole e montagne, Immense, îles et montagnes, Canali simili ad orbite celesti. des canaux semblables à des orbites célests. Il suo re Atlante         Son roi Atlas Conosceva la dottrina della sfera connaissait la doctrine de la sphère Gli astri la geometria, les astres, la géométrie, La cabala e l'alchimia. la cabbale et l’alchimie. In alto il tempio.         En haut le Temple. Sei cavalli alati,         Six chevaux ailés, Le statue d'oro, d'avorio e oricalco. des statues d’or, d’ivoire et d’oriscalque. Per generazioni la legge dimorò Pendant des générations la loi demeura Nei principi divini, conforme aux principes divins, I re mai ebbri delle immense ricchezze les rois jamais ivres de leurs immenses richesses E il carattere umano s'insinuò et le caractère humain s’insinua E non sopportarono la felicità, et ils ne supportèrent pas le bonheur, Neppure le felicità, même pas les bonheurs, Neppure la felicità. même pas le boneur. In un giorno e una notte En un jour et une nuit La distruzione avvenne. advintg la destruction. Tornò nell'acqua. Elle retourna dans l’eau. Sparì Atlantide.          L’Atlantide disparut. Et voilà une autre belle chanson de Roberto Vecchioni sur Alexandre le Grand (356-323 av. J.C.), roi de Macédoine. Roberto Vecchioni fut, parallèlement à sa carrière de cantautore, professeur de grec et de latin dans un Lycée de Milan, et il connaissait bien l’histoire de la Grèce. On constate pourtant que plutôt qu’à la réalité de la Grèce qu’il connaît bien, il préfère se référer à des auteurs modernes comme José Luis Borges (1899-1986). Il choisit de déformer l’histoire réelle d’Alexandre, le grand héros du monde grec, pour en faire un petit garçon, qui choisit de mourir pour atteindre son dernier grand rêve, la conquête définitive de la mer et de son au-delà, ou la reconquête de son enfance perdue. Alexandre ne meurt pas d’une fièvre, comme dans la réalité, mais il se noie volontairement avec toute son armée pour franchir la mer, dont Arrien Xénophon (85-146 ap.J.C. - Voir son livre sur les guerres d’Alexandre, VI, 18-22, à la fin de son expédition indienne) a dit quelle fascination elle exerçait sur l’empereur ; à partir de ce fait réel, Vecchioni fait d’Alexandre un être mythique, qui ignore encore l’hostilité de ses soldats fatigués, qui n’a pas encore réprimé cruellement les complots et les oppositions, qui est encore un pur héros légendaire, éternel enfant à la poursuite d’un bel idéal : depuis sa petite enfance, il aurait désiré jouer dans l’eau de la fontaine, mais sa mère ne le lui permettait pas, et maintenant, après avoir tout conquis, avant de perdre son innocence, il se plonge dans la mer où tous meurent tandis que lui redevient l’enfant qu’il rêvait. Vecchioni reprendra cette image dans son récit Ongam Ordnassela (anagramme d’Alexandre le Grand, Alessandro Magno) dans Viaggi del tempo immobile, Einaudi, 2004. Alessandro e il mare                   Alexandre et la mer (Roberto Vecchioni Milady, 1989) Il tramonto era pieno di soldati ubriachi di futuro Le couchant était plein de soldats ivres de futur Fra i dadi le bestemiee il sogno di un letto più sicuro parmi les dés les jurons et le rêve d’un lit plus sûr Ma quando lui usciva dalla tenda non osavano mais quand il sortait de sa tente ils n’osaient nemmeno guardare                            même pas regarder sapevano che c’era la sua ombra sola davanti al mare.        Ils savaient qu’il y avait son ombre seule devant la mer. Poi l’alba era tutta un fumo di cavalli,           Puis l’aube était toute une fumée de chevaux, gridi e risate nuove ;                    de cris animaux et de rires nouveaux  : dove si va, passato il Gange,             passé le Gange, où va-t-on Generale, parla, dicci solo dove :                     Général, parle, dis-nous seulement où on va : e lui usciva dalla tenda                                                   et lui sortait de sa tente bello come la mattina il sole :                                         beau comme le soleil du matin ; come in una lontana leggenda,                                       comme dans une ancienne légende,      perduta chissà dove...                                                     perdue qui sait où … E tornava bambino,                                                       Et il redevenait enfant e tornava bambino,                                                       et il redevenait enfant quando stava da solo a giocare nei viali                        quand il était tout seul à jouer dans les allées di un immenso giardino ;                                               d’un immense jardin  ;       la fontana coi pesci                                                       la fontaine avec des poissons dai riflessi d’argento,                                                    aux reflets d’argent, che poteva soltanto guardarla,                                     il pouvait seulement la regarder, mai buttarcisi dentro.                                                    jamais se jeter dedans. Non un capello fuori posto                                          Pas un cheveu déplacé mentre entrava a cavallo nel mare,                             tandis qu’il entrait dans la mer, e il cuore, il cuore gli batteva addosso                        et son cœur, son cœur battait en lui come a una donna che si va a sposare ;                    comme celui d’une femme qui va se marier  ; e tutti lo seguirono cantando                                      tous le suivirent en chantant senza nemmeno sospettare,                                      sans même avoir un soupçon, e gli andarono dietro contenti                                     ils allèrent derrière lui contents di dover annegare.                                                     de devoir se noyer. E tornava bambino,                                                  Et il redevenait enfant e tornava bambino,                                                   et il redevenait enfant quando stava da solo a giocare nei viali                   quand il était tout seul à jouer dans les allées di un immenso giardino ;                                           d’un immense jardin  ; la fontana coi pesci                                                   la fontaine avec des poissons dai riflessi d’argento,                                                aux reflets d’argent, che poteva soltanto guardarla,                                  ll pouvait seulement la regarder, mai buttarcisi dentro.                                                jamais se jeter dedans. E mentre si voltava indietro                                       Et tandis qu’il se retournait non aveva niente da vedere ;                                    il n’avait rien à voir  ; e mentre si guardava avanti                                      et tandis qu’il regardait devant lui niente da voler sapere ;                                            rien qu’il voulût savoir  ; ma il tempo di tutta una vita                                      mais le temps de toute une vie non valeva quel solo momento :                               ne valait pas ce seul moment  : Alessandro, così grande fuori, così piccolo dentro      Alexandre, si grand dehors, si petit dedans. Et Vecchioni avait déjà évoqué Alexandre dans une précédente chanson de 1977, Stranamore, où il chantait  : Ed il più grande conquistò nazione dopo nazione  Et le plus grand conquit nation après nation e quando fu di fronte al mare si sentì un coglione     et quand il se trouva face à la mer, il se sentit un couillon perché più in là non si poteva conquistare niente ;    parce qu’au-delà on ne pouvait rien conquérir e tanta strada per vedere un sole disperato    et tant de route pour voir un soleil désespéré e sempre uguale e sempre come quando era partito.    Et toujours égal et toujours comme quand on est parti. Roberto Vecchioni a consacré aussi en 1972 une chanson au héros grec Ajax, Aiace, dans le disque Saldi di fine stagione ; il la reprend dans un album de 1997, puis dans son ouvrage de 2014, Il mercante di luce. C’est le héros chanté par Homère, le combattant sans peur à qui auraient dû revenir les armes d’Achille tué par Hector sous les murs de Troie ; mais en raison de calculs politiques des chefs dominants, les armes vont au rusé Ulysse ; il ne reste à Ajax qu’une grande colère de voir qu’il n’y a pas de justice en ce monde, et il va se  venger, mais au lieu de tuer ses adversaires, trompé par un sortilège d’Athena, il n’abat que des moutons croyant tuer Agamemnon et Ménélas ; réveillé il se suicide : cela ne vaut sans doute pas la peine de vivre et de mourir pour ce monde trompeur. Sauf que Vecchioni ne parle pas du responsable du drame, Ulysse, qui reste dans la tradition un héros bon et pur, alors que c’est en permanence un traître, dans la condamnation de son ami Palamède qui l’avait contraint à se rendre à la guerre de Troie, dans la mort de Philoctète dont il veut prendre l’arc, dans le délire d’Ajax qui aurait dû obtenir les armes de son ami Achille, sans parler de la tromperie qu’est l’invention du « cheval de Troie ». En somme Vecchioni reprend la tradition qui ne dit jamais de mal d’Ulysse l’incorruptible, alors que d’autres cantaurori avaient critiqué Ulysse de façon contraire à la légende. Ugo Foscolo (1778-1827) a écrit une tragédie, Aiace, vers 1795 : il reconnaît chez lui l’idéal de la lutte contre les tyrans. Les « porte Scee », les portes Scées (= occidentales ?), sont la double porte légendaire des murs de Troie, qui permettaient d’accéder au camp grec et par où entra le cheval de Troie, permettant aux guerriers d’aller ensuite ouvrir les portes de l’intérieur. Aiace Ajax (Roberto Vecchioni, Saldi di fine stagione, 1972) E non sembravi Et tu ne semblais nemmeno più quello même plus celui che dalle porte Scee qui des portes Scées guardando il cielo en regardant le ciel gridava a Dio criait vers Dieu con tutta la sua voce de toute ta voix – Sterminaci se vuoi ma nella luce – – Extermine-nous si tu veux mais dans la lumière – E il mare è grande Et la mer est grande quando vien la sera quand vient le soir e Dio è lontano et Dieu est loin per la tua preghiera pour ta prière qui c’è chi parla troppo Ici il y a ceux qui parlent trop e c’è chi tace et ceux qui se taisent, tu sei ti questi tu es de ceux-là e al popolo non piace et cela ne plaît pas au peuple. Chi ha vinto è là Celui qui a vaincu est là che vomita il suo vino qui vomit son vin e quel che conta et ce qui compte in fondo è l’intestino au fond c’est l’intestin. la la la la la la Aiace la la la la la la la la la la la la Aiace la la la la la la la la la la la la Aiace la la la la la la la la la la la la Aiace la la la la la la È il coro degli Achei C’est le chœur des Achéens che si diletta qui se réjouit hai perso e questo tu as perdu et cela è il meno che ti aspetta est le moins de ce qui t’attend ti stanno canzonando Il se moquent de toi mica male          pas mal va’ un po’ a spiegare va un peu expliquer quando un uomo vale quand un homme a de la valeur. Dovevi vincer tu C’est toi qui devais vaincre lo sanno tutti tous le savent tu andavi per nemici tu allais au milieu des ennemis e lui per gatti et lui au milieu des chats ma il popolo è mais le peuple est una pecora che bela une brebis qui bêle gli fai passar tu lui fais prendre per fragola una mela une pomme pour une fraise. Chi ha vinto è là che vomita il suo vino e quel che conta in fondo è l’intestino la la la la la la Aiace la la la la la la la la la la la la Aiace la la la la la la la la la la la la Aiace la la la la la la la la la la la la Aiace la la la la la la E tu fai fuori et tu abas mezzo accampamento la moitié du campement ne volano di teste il en vole des têtes cento e cento cent et cent salvo far l’inventario e à moins que faisant l’inventaire veder poi che non sono tu ne voies ensuite que ce ne sont pas i tuoi giudici son buoi tes juges, ce sont des boeufs Allora per un mondo Alors pour un monde che è un porcile qui est une porcherie ti val bene la pena di morire pour toi, vaut-il bien la peine de mourir ? dimmi cosa si prova Dis-moi ce que l’on éprouve in quel momento dans ce moment con la spada sul cuore l’’épée sur le coeur e intorno il vento et le vent tout autour. Fa grande sulla tenda Le feu sur la tente le ombre il fuoco fait de grandes ombres ma dai che è stato mais allez, ce n’a été solamente un gioco qu’un jeu. la la la la la la Aiace la la la la la la la la la la la la Aiace la la la la la la la la la la la la Aiace la la la la la la lla la la la la Aiace la la la la la la”. Vecchioni écrira plusieurs autres chansons sur l’antiquité grecque, en particulier sa très belle chanson, Il cielo capovolto (l’ultimo canto di Saffo), en mémoire de la poétesse grecque et peut-être avec quelque souvenir du poème de Giacomo Leopardi : Il cielo capovolto Le ciel renversé (ultimo canto di Saffo) (dernier chant de Sapho) (Roberto Vecchioni Il cielo capovolto, 1995) Che ne sarà di me e di te, Qu’en sera-t-il de moi et de toi, che ne sarà di noi ? qu’en sera-t-il de nous ? L'orlo del tuo vestito, Le bord de ton vêtement, un'unghia di un tuo dito, l’ongle d’un de tes doigts, l'ora che te ne vai... l’heure où tu t’en vas … Che ne sarà domani, dopodomani Qu’en sera-t-il demain, après-demain e poi per sempre ? et puis pour toujours ? Mi tremerà la mano Ma main tremblera passandola sul seno quand je la passe sur mon sein cifra degli anni miei...         chiffre de mes années … A chi darai la bocca, il fiato, À qui donneras-tu ta bouche, ton souffle, le piccole ferite, tes petites blessures, gli occhi che fanno festa, les yeux qui te font fête, la musica che resta la musique qui reste e che non canterai ? et que tu ne chanteras pas ? E dove guarderò la notte, Et où regarderai-je la nuit, seppellita nel mare ? ensevelie dans la mer ? Mi sentirò morire Je me sentirai mourir dovendo immaginare quand je devrai imaginer con chi sei... avec qui tu es … Gli uomini son come il mare : Les hommes sont comme la mer : l'azzurro capovolto l’azur renversé che riflette il cielo ; qui reflète le ciel ; sognano di navigare, ils rêvent de naviguer, ma non è vero.         mais ce n’est pas vrai. Scrivimi da un altro amore, Écris-moi depuis un autre amour, e per le lacrime         et à travers les larmes che avrai negli occhi chiusi, qui seront dans tes yeux fermés, guardami : ti lascio un fiore regarde-moi : je te laisse une fleur d'immaginari sorrisi. de sourires imaginaires. Che ne sarà di me e di te, Qu’en sera-t-il de moi et de toi, che ne sarà di noi ? qu’en sera-t-il de nous ? Vorrei essere l'ombra, Je voudrais être l’ombre, l'ombra di chi ti guarda l’ombre de qui te ragarde e si addormenta in te ; et s’endort en toi ; da piccola ho sognato un uomo étant petite j’ai rêvé d’un homme che mi portava via, qui m’emportait, e in quest'isola stretta et dans cette île étroite lo sognai così in fretta je rêvai avec tant de hâte che era passato già ! qu’il était déjà passé ! Avrei voluto avere grandi mani, J’aurais voulu avoir  de grandes mains, mani da soldato : des mains de soldat : stringerti così forte te serrer assez fort da sfiorare la morte pour effleurer la mort e poi tornare qui ; et puis revenir là ; avrei voluto far l'amore j’aurais voulu faire l’amour come farebbe un uomo, comme le ferait un homme, ma con la tenerezza, mais avec la tendresse, l'incerta timidezza la timidité incertaine che abbiamo solo noi... que nous sommes seules à avoir … Gli uomini, continua attesa, Les hommes, attente continuelle, e disperata rabbia et rage désespérée di copiare il cielo ; de copier le ciel ; rompere qualunque cosa, briser toute chose, se non è loro ! s’il ne s’agit pas d’eux ! Scrivimi da un altro amore : Écris-moi depuis un autre amour: le tue parole tes mots sembreranno nella sera sembleront dans le soir come l'ultimo bacio comme le dernier baiser della tua bocca leggera. de ta bouche légère. Sapho n’est pas un mythe, mais un personnage historique devenu mythique, poétesse grecque entre 640 et 570 av.J.C. qui devint le symbole de l’homosexualité féminine, d’où le terme « saphique », tandis que le mot « lesbienne » vient de l’île de Lesbos d’où Sapho était originaire. Cette homosesxualité était courante et acceptée dans les mœurs de l’époque. Sapho éduquait des jeunes filles à la musique, à la danse, à la poésie, à la vie sociale, et elle était amoureuse de ses élèves, les initiait à l’érotisme en vue de leur mariage, c’était alors une pratique d’initiation entre adultes et adolescents qui était normale, à partir d’un certain âge : la  pédophilie était interdite ! Sapho aurait été mariée et aurait eu une fille. Il ne nous reste que des fragments de son œuvre considérée dans l’Antiquité comme une des plus élaborées dans le domaine lyrique (la poésie accompagnée d’un instrument à cordes, lire ou cithare), et on la considérait parfois comme une dixième Muse. Vecchioni connaissait bien ces textes, et il en tire sa chanson : les hommes sont comme la mer, et ils ne doivent leur couleur bleue qu’au ciel, les femmes sont comme le ciel. Il se met dans l’image de Sapho qui souffre parce qu’elle est amoureuse d’une de ses élèves qui va se marier. Vecchioni s’inspire peut-être aussi du texte écrit par Giacomo Leopardi (1798-1837) en 1822, L’ultimo canto di Saffo, où elle finit par se suicider de désespoir. Carmen Consoli écrit encore une chanson intitulée Venere, Vénus (dans Confusa e felice, 1997), mais ce n’est qu’une description de femme séduisante d’aujourd’hui, la référence à Vénus se résume en la citation de son nom. Dans un disque suivant (Stato di necessità, 2000), elle écrit Parole di burro où elle cite Narcisse, mais ce n’est qu’un mot destiné à évoquer un personnage contemporain de séducteur qu’appelle de ses vœux la chanteuse. Les noms mythologiques ne sont qu’un prétexte pour raconter des personnages contemporains, sans plus aucune évocation de leur histoire mythologique, ou pour parler de la vie personnelle du compositeur. Toute dimension sociale et politique a disparu de ces textes, toute allusion à l’histoire de l’Italie. C’est le même phénomène que l’on constate dans la chanson de Vinicio Capossela, Medusa cha cha cha (dans Ovunque proteggi, 2008), où la Méduse n’est plus qu’un nom sans aucun contenu mythologique. L’Antiquité a cessé d’être un miroir permettant de parler de notre époque et des problèmes sociaux et politiques qui furent une référence de la plupart des cantautori contemporains ; elle ne disparaît pas de la chanson mais elle ne subsiste que comme référence extérieure à des noms antiques. À l’opposé de cet abandon de référence mythologique, Eugenio Finardi (1952, Milan) traduit une chanson du brésilien Chico Buarque de Hollanda, Le donne di Atene. C’est, dit le site , « une chanson ironique et provocatrice qui est une acte d’accusation très fort non seulement contre le machisme mais surtout contre l’ostentation et l’apothéose que du machisme, toujours rampant dans beaucoup de sociétés humaines, arrive toujours à faire tout régime militaire et dictatorial, avec ses rappels obsessifs à des concepts comme Patrie, Drapeau, Honneur, Orgueil, Race, etc. Et où évidemment la femme n’occupe qu’une place résiduelle et toujours douleureuse, comme ventre qui donne des enfants à la nation, ou comme épouse qui attend le retour de l’aimé des champs de bataille, ou comme veuve inconsolabble condamnée à la solitude et au silence, ou comme butin de guerre ou putain pour apaiser les désirs de ces impavides guerriers ». Là encore, le recours à l’Antiquité grecque n’est qu’une façon de dénoncer le fonctionnement de la société d’aujourd’hui. Le donne di Atene Les femmes d’Athènes ( Chico Buarque de Hollanda  e Augusto Boal traduzione di Eugenio Finardi e Alberto Camerini Acustica 1993) Dovreste prendere esempio da quelle mogli di Atene Vous devriez prendre exemple sur ces femmes d’Athènes Che vivon per i loro mariti, orgoglio e razza di Atene    qui vivent pour leurs maris, fierté et race d’Athènes. Tutto il giorno si son profumate toute la journée, elles se sont parfumées Lavate nel latte e pettinate per lavées dans le lait et peignées pour Esser amate         être aimées. Se fustigate non piangeranno si elles sont battues, elles ne pleureront pas Ma anzi proprio loro imploreranno Mais au contraire ce sont elles  qui imploreront Più dure pene         de plus dures peines : Catene         des chaînes.         Cercate di prendere esempio da quelle mogli di Atene        Cherchez à prendre exemple sur ces femmes d’Athènes         Che soffron per i loro mariti, potere e forza di Atene                 Qui souffrent pour leurs maris, pouvoir et force d’Athènes,          Quando essi partono soldati  Quand ils partent à l’armée,        Intessono lunghi teli ricamati  elles tissent de longues toiles brodées        Per settimane           pendant des semaines,       E quando tornano affamati  et quand ils reviennent affamés       Di baci con violenza strappati e  de baisers arrachés violemment et       Carezze piene           de caresses pleines       Oscene           d’obscénités. Dovreste prendere esempio da quelle mogli di Atene         Vous devriez prende exemple sur ces femmes d’Athènes Che perdonano ai loro mariti, i bravi guerrieri di Atene        qui pardonnent à leurs maris, les braves guerriers d’Athènes Quando si ingozzano di vino per        quand ils se gorgent de vin pour Trovare il coraggio di aver vicino        trouver le courage d’avoir à côté d’eux Altre falene                         d’autres papillons, Ma poi alla fine della notte, spossati                 mais qui à la fin de la nuit, épuisés, Son quasi sempre ritornati dalle        sont presque toujours revenus chez loro piccine Elene                         leurs petites héllènes.        Cercate di prendere esempio da quelle mogli di Atene           Cherchez à prendre exemple sur ces femmes d’Athènes        che generano ai loro mariti i nuovi figli di Atene                      qui engendrent pour leurs maris de nouveaux fils d’Athènes  ;        Non hanno alcun gusto ne volontà                            elles n’ont aucun goût ni aucune volonté        Non han difetti ne qualità               elles n’ont ni défauts ni qualités        Lo sanno bene                       elles le savent bien,        Non hanno sogni ma solo presagi      elles n’ont pas de rêves mais que des présages        Per i loro uomini e il mare e i naufragi e      pour leurs hommes et la mer et les naufrages        Belle sirene                       et les belles sirènes        Morene                       mauresques. Dovreste prendere esempio da quelle mogli di Atene            Vous devriez prendre exemple sur ces femmes d’Athènes Che temon per i moro mariti, gli eroi e gli amanti di Atene      qui craignent pour leurs maris, les héros et les amants d’Athènes Dalle giovani vedove segnate    aux jeunes veuves marquées E dalle gestanti abbandonate che            et aux femmes enceintes abandonnées qui Non fanno scene    ne font pas de scènes Vestite del nero di chi é rassegnato    vêtues du noir de qui est résigné Di chi ha oramai già accettato il Fato    de qui a désormais déjà accepté le Destin Senza più pene    sans plus de peines, Sono serene.            elles sont sereines. Cercate di prendere esempio da quelle mogli di Atene      Cherchez à prendre exemple sur ces femmes d’Athènes Che vivono per i loro mariti, orgoglio e razza di Atene       qui vivent pour leurs maris, fierté et race d’Athènes. RETOUR A LA TABLE DES MATIERES                                 SUITE 4 DU FICHIER