Poésie en musique - chapitre 4
Chapitre 4
Le « Dolce Stil Nuovo »
Ainsi fut appelé par Dante lui-même (Purgatoire, XXIV, vv.40-57) le nouveau mouvement poétique qui commence avec le poète de Bologne Guido Guinizzelli
entre 1280 et 1310, créant aussi une autre forme de pensée à travers une langue vulgaire différente, plus raffinée que le vulgaire parlé en Toscane et qui
deviendra une base de la langue italienne. Guido Guinizelli s’inspire de la poésie sicilienne antérieure, mais il s’en distingue profondément, il écrit dans un « stil
nuovo », un style nouveau.
La poésie n’est plus centrée sur la souffrance de l’amant, mais sur la vertu de la femme. Pour qu’elle ne soit pas seulement une femme (souvenez-vous qu’au
Moyen-Âge il y a un mépris chrétien de la femme comme figure de la tentation et source du péché originel), il est nécessaire que la femme devienne une
« femme-ange », intermédiaire entre l’homme et Dieu, qui soit capable de surmonter le désir de l’homme, si celui-ci possède un cœur « gentile », c’est-à-dire
noble, de façon que l’amour et le cœur noble finissent par s’identifier.
La femme-ange devient celle qui oriente l’esprit de l’homme vers l’amour absolu et pur, celui de Dieu, celui qui attire toujours l’homme vers le haut plutôt que vers
la conquête physique de la femme. Qu’est-ce qui inspire directement le chant sinon l’amour ?
Les principaux auteurs sont Guido Guinizzelli (1230-1276), Dante Alighieri (1265-1321), Guido Cavalcanti (1255-1300), Lapo Gianni ( ? - ? ), Cino da
Pistoia (1270-1336), Dino Frescobaldi (1270-1316)… Ils formèrent un cercle restreint d’intellectuels (et non une « école »), une aristocratie culturelle et
spirituelle dans laquelle ne comptait pas tant la noblesse de sang que la noblesse de l’esprit. Ils allèrent même au-delà de l’amour « courtois » en ce sens qu’ils
unirent poésie et philosophie, théologie et sciences, nécessaires au public limité qui les suivait. Là commencent vraiment la langue et la poésie italiennes.
Le DSN fut aussi à l’origine de formes poétiques nouvelles, toujours liées à la musique, le sonnet (sonetto, du verbe suonare = jouer de la musique), la chanson
(canzone, du verbe cantare = chanter), la ballade (ballata, du verbe ballare = danser), toujours mises en musique.
1) La ballade : c’est un genre littéraire plus populaire par lequel on chantait les thèmes les plus graves et philosophiques ; ainsi Dante écrit Donne ch’avete
intelletto d’amore (Femmes qui avez l’intelligence de l’amour) sous forme de chanson et Tanto gentile e tanto onesta pare (Si noble et si honnête semble) sous
forme de sonnet, deux formes qui se détachent peu à peu de la musique. Au contraire la ballade était faite pour être chantée et dansée, d’où son nom.
La ballade se compose normalement d’un ripresa (refrain) et d’une stanza (strophe) qui se divise en une première et une seconde mutazione (changement) et en
une volta (retour) qui reprend le schéma de la ripresa ; le dernier vers de la volta rime avec le dernier de la ripresa. Une ballade peut avoir une ou plusieurs
strophes, dont chacune se termine par la rime de la ripresa. Elle était entonnée par une voix qui chantait seule les strophes. Elle était accompagnée par le chœur
qui dansait en cercle autour du soliste et reprenait la ripresa à la fin de chaque strophe. Celle de Cavalcanti est un « ballata stravagante » (ballade
extravagante) qui a un nombre de vers différent de la ballata minima, de la ballata piccola, de la ballata minore, de la ballata mezzana et de la ballata grande.
La Ballatetta fait : ripresa = Vxxyyz ; piedi = ABAB ; volta = Bccddz, avec ripresa de 6 vers septenaires à l’exception de l’hendécasyllabe initial ; la stanza
(piedi) est composée de deux distiques d’hendécasyllabes avec reprise de rimes et volta qui reprend la ripresa (onore / dolore). Selon la tradition de langue d’oïl
du « congedo » (envoi), le locuteur annonce l’abandon du chant et de la vie elle-même dans les deux derniers vers. Au début, le poète s’adresse à la sua ballata,
puis dans la dernière strophe, il change d’interlocuteur et s’adresse à sa propria voce pour s’adresser à la fin à sa propre anima.
2) Le sonnet : dans le De vulgari eloquentia, Dante le relègue à la dernière place après la chanson de goût aristocratique et après la ballade de goût
populaire. Et pourtant, cette forme devient essentielle dans la poésie italienne, pour certains critiques, elle est d’invention sicilienne (peut-être Jacopo da
Lentini), imitation du strambotto populaire, pour d’autres c’est une reproduction de la chanson ; plus probablement les premiers ont autant raison que les
seconds : l’origine est composite, entre poésie populaire et poésie savante. Pour cela, le sonnet plut beaucoup au public, et au XIIIe siècle, les poètes
s’échangeaient des sonnets sur l’amour, et sur des questions littéraires et politiques (par exemple sur Guelfes et Gibelins entre Bonagiunta (1220-1290) et
Guinizzelli) ou sur des arguments de la vie quotidienne (Cecco Angiolieri).
Le sonnet cité de Dante est de schéma ABBA, ABBA, CDE, EDC. Notez la reprise de Mostrare (fin du vers 8) en Mostrasi (début du vers 9) qui réunit le second
quatrain au premier tercet.
3) La chanson (canzone) pour Dante est le chant par excellence, composition individuelle sans la ripresa faite pour être dansée en chœur. L’essentiel de la
chanson est la stanza (la strophe) dont la première est imitée par les suivantes. La chanson citée est faite de 5 strophes dont Palladini ne chante que la première
; chacune a 14 vers hendécasyllabes ; le rythme est ABBC, ABBC, CDD, CEE. La louange de la femme aimée n’est plus directe, mais elle est adressée à «
donne gentili » (des femmes nobles).
Il « Dolce Stil Nuovo »
Così fu chiamato da Dante stesso (Purgatorio, XXIV, vv. 40-57) il nuovo movimento poetico iniziato dal poeta bolognese Guido Guinizzelli, tra il 1280 e il 1310,
creando anche un’altra forma di pensiero, attraverso una lingua volgare diversa, più raffinata del volgare parlato in Toscana e diventerà una base della lingua
italiana. Si ispira all’anteriore poesia siciliana, ma se ne distingue profondamente, è « stil nuovo ».
La poesia non è più centrata sulla sofferenza dell’amante, ma sulla virtù della donna. Per non essere soltanto una femmina (ricordate che al medioevo c’è un
disprezzo cristiano della donna come figura della tentarice e fonte del peccato originale), è necessario che la donna diventi una « donna-angelo », intermediaria
tra l’uomo e Dio, che sia capace di sormontare il desiderio dell’uomo, se questo possiede un cuore « gentile », cioè nobile, in modo che l’amore e il cuor gentile
finiscono con l’identificarsi.
La donna-angelo diventa quella che indirizza lo spirito dell’uomo verso l’Amore assoluto e puro, quello di Dio, attrae sempre l’uomo più in alto perché lei è
irraggiungibile. Lei detta le parole al poeta la cui poesia diventa ascesa verso l’alto piuttosto che conquista fisica della donna. Che cosa ispira direttamente il canto
se non l’amore ?
I principali autori sono Guido Guinizzelli (1230-1276), Dante Alighieri (1265-1321), Guido Cavalcanti (1255-1300), Lapo Gianni ( ? - ? ), Cino da Pistoia
(1270-1336), Dino Frescobaldi (1271-1316). Formarono una cerchia ristretta di intellettuali (e non una «scuola »), un’aristocrazia culturale e spirituale in cui era
importante non tanto la nobiltà di sangue quanto la nobiltà dell’animo. Andarono anche oltre all’amore « cortese » nel senso che unirono poesia e filosofia, teologia
e scienze, necessarie al pubblico ristretto che li seguiva. Qui comincia veramente la lingua e la poesia italiane.
Il DSN fu anche all’origine di forme poetiche nuove, sempre legate alla musica, i sonetti ((verbo suonare = jouer de la musique), le canzoni (verbo cantare), la
ballata (verbo ballare) e sempre musicate.
1) La Ballata : è un genere letterario più popolare a cui non si affidavano i temi più gravi e filosofici ; così Dante scrive Donne ch’avete intelletto d’amore sotto
forma di canzone e Tanto gentile e tanto onesta pare sotto forma di sonetto, due forme che si svincolarono a poco a poco dalla musica. Invece la ballata era fatta
per essere cantata e danzata, di qui il suo nome.
La ballata si compone normalmente di una ripresa (ritornello) e di una stanza che si divide in una prima e una seconda mutazione e in una volta che riprende lo
schema della ripresa ; l’ultimo verso della volta rima con l’ultimo della ripresa. Una ballata può avere una o più stanze, ognuna delle quali si chiude sempre con la
rima della ripresa. Era intonata da una voce sola, che sola cantava le stanze, era accompagnata dal coro che danzava in cerchia intorno al solista e ripeteva alla
fine di ogni stanza la ripresa. Quella di Cavalcanti è una « ballata stravagante », che ha un numero di versi diverso dalla ballata minima,dalla ballata piccola,
dalla ballata minore, dalla ballata mezzana e dalla ballata grande.
La Ballatetta fa : ripresa = Vxxyyz ; piedi = ABAB ; volta =Bccddz, con ripresa di sei versi settenari, a eccezione dell’endecasillabo iniziale ; la stanza (piedi) è
composta da due dìstici d’endecasìllabi con rime replicate e volta che riprende la ripresa (onore/dolore). Secondo la tradizione d’oïl del « congedo », il locutore
annuncia l’abbandono del canto e della stessa vita nei due ultimi versi. All’inizio il poeta si rivolge alla sua ballata, poi nell’ ultima stanza, cambia interlocutore e si
rivolge alla propria voce, per rivolgersi alla fine all’ « anima » propria.
2) Il sonetto : Nel De vulgari eloquentia, Dante lo relega all’ultimo posto dopo la canzone di gusto aristocràtico, e dopo la ballata, di gusto popolare. Eppure,
questa forma diventa essenziale nella poesia italiana, per alcuni critici era di invenzione siciliana (forse Jacopo da Lentini), imitazione dello strambotto
popolare, per altri una riproduzione della canzone ; più probabilmente hanno ragione i primi come i secondi: l’origine è compòsita, tra poesia popolare e poesia
d’arte. Per questo piacque moltissimo al pubblico, e nel Duecento, i poeti si scambiavano dei sonetti sull’amore, e su questioni letterarie e politiche (per esempio
su Guelfi e Ghibellini tra Bonagiunta e Guinizelli) o su argomenti della vita quotidiana (Cecco Angiolieri).
Il sonetto citato di Dante è di schema ABBA, ABBA,CDE, EDC.
Notate la ripresa di Mostrare (fine verso 8) in Mostrasi (inizio verso 9) che unisce la seconda quartina alla prima terzina.
3) La canzone : per Dante è il canto per eccellenza, componimente individuale senza la ripresa fatta per essere danzata in coro. L’essenziale della canzone
è la stanza, essendo la prima imitata dalle seguenti. La canzone citata è fatta di cinque stanze di cui Palladini canta la prima ; ognuna ha 14 versi endecasìllabi ; il
ritmo è ABBC, ABBC, CDD, CEE. La lode dell’amata non è più diretta a lei ma a donne « gentili ».
Ballatetta
(Guido Cavalcanti,
Rime, vers 1300)
Musique : Palladini e Gargano
Poesia in musica, BMG Ariola, 1994)
Perch'i' no spero di tornar giammai,
Puisque m’a fui l’espoir de revenir jamais,
ballatetta, in Toscana,
petite ballade, en Toscane,
va ttu, leggera e piana,
va-t’en à ma place, légère et affable,
dritt' a la donna mia,
tout droit chez ma dame
che per sua cortesia
qui, dans sa courtoisie,
ti farà molto onore.
te fera beaucoup d’honneur.
Tu porterai novelle di sospiri
Tu porteras des nouvelles pleines
pien' e di doglie e di molta paura ;
de soupirs, de douleur et de grande crainte ;
ma guarda che persona non ti miri
mais veille à ce que personne ne te voie
che sia nemica di gentil natura :
qui soit ennemi de la noble nature :`
che certo per la mia disaventura
car certainement à cause de ma condition malheureuse
tu saresti contesa,
tu serais repoussée,
tanto da llei ripresa
et par elle si blâmée
che mi sarebbe angoscia,
que j’en aurais de l’angoisse,
dopo la morte, poscia,
et même après ma mort
pianto e novel dolore.
chagrin et nouvelle douleur.
Tu senti, ballatetta, che la morte
Tu sens, petite ballade, que la mort
mi stringe sì, che vita m'abbandona ;
m’étreint déjà tant que la vie m’abandonne ;
e senti come ‘l cor si sbatte forte
et tu sens que mon cœur bat très fort
per quel che ciascun spirito ragiona.
parce que chacun de mes esprits de vie veut parler.
Tanto è distrutta già la mia persona,
Si détruite est déjà ma personne
ch'i' non posso soffrire.
que je ne parviens plus à résister.
Se tu mi vuoi servire,
Si tu veux me servir,
mena l'anima teco
prends mon âme avec toi
- molto di ciò ti preco -,
- je t’en prie ardemment -
quando uscirà del core.
quand elle sortira de mon corps.
Dè, ballatetta, a la tu'amistate
Oh, petite ballade, à ton amitié
quest'anima che trema raccomando :
je recommande cette âme qui tremble :
menala teco, nella tua pietate,
conduis-la avec toi dans ta grande pitié,
a quella bella donna a cu' ti mando.
vers cette belle dame à qui je t’envoie.
Dè, ballatetta, dille sospirando,
Oh, petite ballade, dis-lui en soupirant
quando le se' presente :
lorsque tu seras près d’elle :
.
«Questa vostra servente
« Voici votre servante
vien pe’ ristar con voi ;
qui vient pour rester avec vous ;
partit'è da colui s,
ayant quitté celui
che fu servo d’Amore.
qui fut un serviteur d’amour ».
Tu, voce sbigottita e deboletta
Toi, voix timide et toute faible
ch'esci piangendo de lo cor dolente,
qui sors en pleurant de mon cœur souffrant,
coll' anima e con questa ballatetta
avec mon âme et ma petite ballade
va' ragionando della strutta mente.
parle d’un esprit que la mort a détruit.
Voi troverete una donna piacente,
Vous trouverez une femme plaisante,
di sì dolce intelletto
d’une si douce intelligence
ch' e' vi sarà diletto
que vous aurez plaisir
davanti starle ognora.
à demeurer près d’elle.
Anima, e tu l'adora
Et toi, mon âme, adore-la
sempre, nel su' valore.
toujours, comme elle le mérite.
Dante Alighieri (1265 - 1321)
(Sonnet : Testo, Dante Alighieri,
Vita Nuova, XXVI)
Tanto gentile e tanto onesta pare
la donna mia quand’ella altrui saluta
ch’ogne lingua deven tremando muta
e li occhi no l’ardiscon di guardare.
Ella si va sentendosi laudare
benignament d’umiltà vestuta ;
e par che sia una cosa venuta
da cielo in terra a miracol mostrare.
Mostrasi sì piacente a chi la mira,
che dà per li occhi una dolcezza al core
ch’intender no la può chi no la prova ;
e par che de la sua labbia si mova
un spirito soave pien d’amore,
che va dicendo a l’anima : « Sospira ».
(Vita Nova, XXVI, 1293-5)
.
Donne ch’avete intelletto d’amore
Dames qui avez l’intelligence de l’amour
(Testo : Dante Alighieri, Vita Nuova, XIX
Canzone, 1a strofa
Musique : Stefano Palladini e Nazario Gargano
Disque : « ...L’anima sarà semplice com’era... », CNI, 2001)
Donne ch’avete intelletto d’amore
Dames qui avez l’intelligence de l’amour
i’ vo’ con voi della mia donna dire,
c’est à vous que je veux parler de ma dame,
non perch’io creda sia laude finire,
non parce que je crois épuiser sa louange,
ma ragionar per isfogar la mente.
mais discourir pour délivrer mon âme
Io dico che pensando il suo valore,
Je dis qu’en pensant à sa valeur
amor sì dolce mi si fa sentire,
l’amour se fait sentir à moi si doucement
che s’io allora non perdessi ardire,
que si, alors, je ne perdais l’audace,
farei parlando innamorar la gente.
je ferais en parlant enamourer les gens.
Ed io non vo’ parlar sì altamente,
Et je ne veux pas parler dans un si haut style,
ch’io divenisse per temenza vile ;
que , par peur, je devienne lâche ;
ma tratterò del suo stato gentile
mais je traiterai de sa nature noble
a respetto di lei leggeramente,
en termes bien faibles par rapport à elle,
donne e donzelle amorose, con vui,
dames et demoiselles amoureuses, avec vous,
che non è cosa da parlarne altrui.
car ce n’est quelque chose dont on peut parler à d’autres
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Si noble et si honnête paraît
ma dame quand elle salue quelqu’un
que toute langue en tremblant devient muette
et que les yeux ne l’osent regarder.
Elle va, en s’entendant louer
vêtue d’une humilité bienfaisante ;
et elle semble être quelque chose venue
du ciel sur la terre pour montrer un miracle.
Elle se montre si plaisante à qui la regarde
qu’elle donne par les yeux une douceur au cœur
que ne peut pas comprendre qui ne l’éprouve pas
Et il semble que de son visage se dégage
un doux esprit plein d’amour
qui va disant à l’âme : « Soupire »