Poésie en musique - chapitre 39 - suite
LE RAGAZZE DI IERI
Les jeunes filles d’hier
(Testo, musica e voce : Isa
L’arte dell’insonnia, 2008)
Le femmine sanno il lunario,
Les femmes connaissent le calendrier lunaire
Se lo accordano segretamente
elles s’y accordent en secret
Si conta sulle dita,
on compte sur ses doigts
Si tengono vicino e distante
on se tient proche ou distante
Altare alzato dal desiderio
autel érigé par le désir
Sale santo e casa ovunque
sel sacré et maison partout
Un’arpa arrugginita
une harpe rouillée
Severa quieta agile e ardente
sévère, tranquille, agile et ardente
La sera soltanto ad occhi chiusi
Le soir seulement les yeux clos
Si cede a malincuore
on cède de mauvais gré
Alla ricognizione del dolore
à la reconnaissance de la douleur
Molecole di scheletro da conciliare
molécules de squelette à concilier
Con gli obblighi sospesi e poi delusi
les obligations en suspens et puis déçues
E muscoli allungati, memorie come cani
et les muscles tendus, mémoires comme des chiens
A rincorrere l’ombra del treno sul terreno
qui poursuivent l’ombre du train sur le terrain.
Le ragazze di ieri ora stanno lottando
Les jeunes filles d’hier sont maintenant en lutte
per non trasformarsi in carriole
pour ne pas se transformer en brouettes
Però, eventualmente, anche se,
pourtant éventuellement, et même si
un po’ di olio di gomito e se la spingon da sole
un peu d’huile de coude elles se poussent toutes seules
Se nei balli di ieri c’eran grandi misteri
si dans les bals d’hier, il y avait de grands mystères
mischiati di sabbia e di vento
mêlés de sable et de vent
Per oggi ballando sarebbe già tanto
Aujourd’hui en dansant ce serait déjà bien
riuscire a volare restando
d’arriver à voler en gardant
Coi piedi sul pavimento
les pieds au sol.
Le femmine assolvono il diario
Les femmes accomplissent leur devoir quotidien
Mano leggera e borsa pesante
la main légère et le sac lourd
Che non è mai finita
et ça n’en finit jamais
Si vestono d’acqua e d’ombra lucente
elles s’habillent d’eau et d’ombre brillante
Domande arrese che non è serio
questions abandonnées car ce n’est pas sérieux
Sale santo e sapere comunque
sel sacré et savoir de toute façon
Con l’anima in salita
avec l’âme qui s’élève
Severa quieta agile e ardente
sévère tranquille agile et ardente.
La sera soltanto ad occhi chiusi
Si cede a malincuore
Alla ricognizione del dolore
Molecole di scheletro da conciliare
Con gli obblighi sospesi e poi delusi
E muscoli allungati, memorie come cani
A rincorrere l’ombra del treno sul terreno
Le ragazze di ieri ora stanno imparando a gestirsi Les jeunes filles d’hier apprennent aujourd’hui à se gérer
anche in fondo a un burrone
même au fond d’un gouffre
Perché, eventualmente, anche se
parce qu’éventuellement, même si
non si riesce a uscirne
on n’arrive pas à en sortir
non è utile farne questione
il n’est pas utile d’en faire un problème
Se nei balli di ieri si diceva che c’eri
Même si dans les bals d’hier on disait qu’il y avait
e con te c’era amore e sgomento
et qu’avec toi il y avait l’amour et le trouble
Per oggi ballando potrebbe soltanto
aujourd’hui en dansant on pourrait seulement
lavarci il sudore lasciando
laver notre sueur en laissant
una macchia sul pavimento
une tache sur le sol
Ignorando la grazia distratta
en ignorant la grâce distraite
Di un bacio nella fretta
d’un baiser donné en vitesse
Lanciato al firmamento
lancé au firmament
Lamentando la grazia distratta
en regrettant la grâce distraite
Di un bacio nella fretta
d’un baiser donné en vitesse
Smarrito in un momento
égaré en un instant
Adorando la grazia distratta
en adorant la grâce distraite
Di un bacio nella fretta
d’un baiser donné en vitesse
Bevuto fuori tempo
bu hors du temps.
3) Alda Merini (Milan, 1931-2009)
Alda Giuseppina Angela Merini naît à Milan le 21 mars 1931, et meurt dans la même ville le 1er
novembre 2009. Son père est le premier né d’un comte de la province de Côme, déshérité parce
qu’il avait épousé une paysanne, il est employé dans une compagnie d’assurances, sa mère est
femme au foyer, et s’occupe de ses trois enfants, Anna (1926), Alda (1931) et Ezio (1943). Son
père est cultivé, affectueux, et il lui offre à 5 ans son premier vocabulaire dont il lui explique les mots
; sa mère au contraire est plus hautaine et interdit à ses filles de lire les livres de la bibliothèque
paternelle, elle veut en faire seulement de bonnes épouses et mères. Quand Alda, à l’école
primaire, a une crise de mysticisme, sa mère se propose de porter un cilice et de rentrer au
couvent, et elle veut la retirer de l’école : Alda se venge en se faisant passer pour une pauvre
orpheline et en allant mendier ! Puis son père lui fait suivre trois ans d’Institut Professionnel.
Alda avec quelques-unes de ses filles.
En 1943, leur maison est détruite par un bombardement et Alda part avec sa mère et son petit frère vivre chez une tante dans une
ferme près de Vercelli. Revenue à Milan, Alda échoue à l’examen d’entrée au Lycée à cause de l’épreuve d’italien, apprend le piano
et commence à écrire des poésies dès l’âge de 15 ans, aidée par le critique, écrivain et enseignant Giacinto Spagnoletti (1920-
2003). Pourtant très ému, son père déchire sa première poésie en lui disant que cela ne la fera
pas vivre. En 1947, affectée d’une affection bipolaire, elle est internée dans un institut
psychiatrique de Milan et suivie par deux grands psychanalystes, Franco Fornari (1921-1985) et
Cesare Musatti (1897-1989).
Alda Merini sera citée pour la première fois dans l’Anthologie de la poésie italienne contemporaine publiée par Giorgio
Spagnoletti en 1950. Elle épouse en 1953 un ouvrier boulanger et syndicaliste devenu propriétaire de plusieurs
boulangeries, Ettore Carniti. Elle publie ses premiers volumes de vers, La Presenza di Orfeo en 1953, Paura di Dio en 1955,
puis Nozze romane. Elle a quatre filles, fait de nouveaux séjours en hôpital psychiatrique.
Alda, Giovanni Nuti et au fond la basse Lorenzo Passoni
Elle recommence à écrire en 1979, publiant en 1984 son chef-d’œuvre, La Terra Santa, qui obtient un Prix Montale en 1993.
Son mari meurt en 1983, elle reste seule et ignorée du monde littéraire, elle épouse alors un médecin poète, Michele Pierri,
en 1984, et va vivre avec lui à Tarente, où elle est à nouveau soignée pour ses troubles mentaux, et où elle écrit plusieurs
poésies. Revenue à Milan, elle fréquente le Café-librairie Chimera, et paraissent alors Delirio amoroso en 1989 et Il tormento
delle figure en 1990. Elle est enfin reconnue comme une des grandes poétesses contemporaines, ses poésies sont mises en
musique et illustrées par plusieurs artistes.
Alda et Milva en 2004 au Théâtre Strehler de Milan.
Elle entre dans une autre grande période créatrice, publiant Aforismi e magie en 1999, Superba è la notte en 2000 et de
nombreux autres volumes souvent illustrés, et dont plusieurs reflètent une grande crise mystique. En 2004, Milva enregistre un
CD de plusieurs de ses poésies sur une musique du pianiste et cantautore Giovanni Nuti. Roberto Vecchioni lui consacre
une chanson en 1999, Canzone per Alda Merini, dans son disque Sogna, ragazzo, sogna ; il y évoque aussi Dino Campana.
Sa poésie, très abondante et très profonde, est une belle expression d’une vie riche et tourmentée. Elle a eu des funérailles
d’État dans le Dôme de Milan, célébrées par le vicaire épiscopal du diocèse, en présence de nombreuses personnalités
littéraires et intellectuelles.
Alda Giuseppina Angela Merini nasce a Milano il 21 marzo 1931, e muore nella stessa città il 1°
novembre 2009. Suo padre è il primo nato d’un conte della provincia di Como, diseredato perché
aveva sposato una contadina, è impiegato in una compagnia di assicurazioni, sua madre è
casalinga, e si occupa dei suoi tre figli, Anna (1926), Alda (1931) e Ezio (1943). Suo padre è colto,
affettuoso, e le offre a 5 anni il suo primo vocabolario del quale le spiega le parole ; invece, sua
madre è più altiera e proibisce alle figlie di leggere i libri della biblioteca paterna, vuole farne soltanto
buone spose e madri. Quando Alda, alla scuola elementare, fa una crisi di misticismo, sua madre si
propone di portare un cilicio e di entrare al convento, e la vuole ritirare dalla scuola : Alda si
vendica facendosi passare per una povera orfana e andando a chiedere l’elemosina ! Poi suo
padre le fa seguire tre anni d’Istituto professionale.
Nel 1943, la loro casa è distrutta da un bombardamento e Alda parte con la madre e col fratellino a
vivere da una zia in una fattoria vicino a Vercelli. Tornata a Milano, Alda non riesce l’esame d’entrata al Liceo per la prova d’italiano, impara il
pianoforte e comincia a scrivere poesie dal suo quindicesimo anno di età, aiutata dal critico, scrittore e insegnante Giacinto Spagnoletti
(1920-2003). Benché molto commosso suo padre straccia la sua prima poesia dicendole che questa non la farà vivere. Nel 1947, presa da un’affezione bipolare, è
ricoverata in un istituto psichiatrico di Milano e seguita da due grandi psicanalisti, Franco Fornari (1921-1985) e Cesare Musatti (1897-1989).
Alda Merini sarà citata per la prima volta nell’Antologia della poesia italiana vontemporanea pubblicata da Giacinto Spagnoletti nel 1950. Nel 1953 sposa un
operaio panettiere e sindacalista diventato proprietario di parecchi panifici, Ettore Carniti. Pubblica i primi volumi di versi, La Presenza di Orfeo
nel 1953, Paura di Dio nel 1955, poi Nozze romane. Ha quattro figlie, fa nuovi soggiorni in un ospedale psichiatrico.
Ricomincia a scrivere nel 1979, pubblicando nel 1984 il suo capolavoro, La Terra Santa, che ottiene un Premio Montale nel 1993. Suo marito
muore nel 1983, resta sola e ignorata dal mondo letterario, sposa allora un medico poeta, Michele Pierri, nel 1984, e va a vivere con lui a
Taranto, dove è di nuovo curata per i suoi disturbi mentali, e dove scrive parecchie poesie. Tornata di nuovo a Milano, frequenta il Caffè-libreria
Chimera, e appaiono allora Deserto amoroso nel 1989 e Il tormento delle figure nel 1990. Finalmente è riconosciuta come una delle grandi
poetesse contemporanee, le sue poesie sono musicate e illustrate da parecchi artisti.
Entra in un altro grande periodo creativo, pubblicando Aforismi e magie nel 1999, Superba è la notte nel 2000 e numerosi altri volumi spesso
illustrati, e tra i quali parecchi manifestano una grande crisi mistica. Nel 2004, Milva (1939- ) registra un CD di parecchie poesie sue su una
musica del pianista e cantautore Giovanni Nuti (1964- ). Roberto Vecchioni le ha dedicato una canzone nel 1999, Canzone per Alda Merini,
nel suo disco Sogna, ragazzo, sogna ; ci evoca anche Dino Campana.
La sua poesia, abbondantissima e profondissima, è una bella espressione d’une vita ricca e tormentata. Ebbe funerali di stato nel Duomo di
Milano, celenbrati dal vicario episcopale della diocesi, in presenza di numerose personalità letterarie e intellettuali.
Sono nata il ventuno a primavera
Alda Merini era nata un 21 marzo, ora giorno della Festa Mondiale della Poesia e dell’inizio della Primavera ; ha fatto un
riavvicinamento di quel giorno anche con la follìa perché, diceva Lei, « Primavera è folle perché è scriteriata, perché è generosa. Però
incontra anche il demonio. E io l’ho incontrato il demonio. Era il manicomio » (intervista a cura di Luciano Minerva). Qui, poesia, follia
e primavera costituiscono una realtà unica. E si sa che, nella mitologia popolare italiana, marzo era considerato come mese diabolico ;
negli ospedali psichiatrici, i medici sapevano anche che marzo era un mese di crisi per i pazienti. Ma la poetessa dice anche di non
essere responsabile della sua « pazzia », dice « non sapevo », rimane innocente dei suoi atti che sono « tempesta » soltanto per gli
altri ; Proserpina piange su una tempesta che non capisce, e il suo pianto sarà fonte di rinascita della vita.
La follia è « aprire le zolle », cioè uscire dai criteri dominanti, morali, religiosi, ecc. di vita quotidiana, ma è anche aprire la terra
coll’aratro perché ne possa nascere una vita nuova, più bella, e dalla follia Lei è stata portata a scrivere poesie. Allora, perché quella
nuova creatività è stata considerata come una cosa pericolosa, una « tempesta », uno scandalo ?
Alda Merini esprime la sua domanda riferendosi al mito di Proserpina (Persefone nella mitologia greca, unica figlia di Zeus e Demetra
(Cerere), dea della fertilità e delle messe. Ma è rapita dal dio degli Inferi, Ade, innamoratosi della sua bellezza. Quando lo seppe, sua
Madre si arrabbiò tanto da far scomparire tutte le piante della terra, col rischio di far morire tutti gli esseri vivi. Zeus intervenne allora e ottenne finalmente che
Proserpina potesse uscire dagli Inferi per sei mesi nell’anno, primavera ed estate. Proserpina piange dunque in autunno ed inverno, e quel pianto è la pioggia che
nutrirà le « erbe » e i « grani », sarà la sua « preghiera » nel senso forte di entrare in contatto con la divinità. Così Alda Merini dice che il manicomio in cui si
racchiudono i « pazzi » nella sofferenza, è anche un luogo in cui possono rinascere potenze e creazioni nuove, forze di gioia e di speranza.
La metrica suit le rythme ABBC DEFAA, comincia con due endecasilabi e continua con una diversità di metri, novenari, ottonari, settenari, con due ottonari in
chiusura : il poema è dunque in forma di circolo, riprendendo nei versi 8 e 9 la rima A del verso 1. Notare anche le assonanze dei versi 3 a 7 : lieve / erbe,
scatenar / tempesta, grossi / frumenti / gentili.
Alda Merini était née un 21 mars, maintenant jour de la Fête Mondiale de la Poésie et du début du printemps ; elle a fait aussi un rapprochement de ce jour avec
sa folie parce que, disait-elle, « le printemps est fou parce qu’il est insensé, parce qu’il est généreux. Pourtant il rencontre aussi le démon. Et moi je l’ai rencontré
le démon. C’était l’asile » (Interview assuré par Luciano Minerva). Ici, poésie, folie et printemps constituent une réalité unique. Et on sait que dans la mythologie
populaire italienne mars était considéré comme un mois diabolique ; dans les hôpitaux psychiatriques, les médecins savaient aussi que mars était un mois de
crise pour les patients. Mais la poétesse dit aussi qu’elle n’est pas responsable de sa « folie », elle dit « je ne savais pas », elle reste innocente de ses actes qui
ne sont une « tempête » que pour les autres ; Proserpine pleure sur une tempête qu’elle ne comprend pas, et ses pleurs seront la source de renaissance de la
vie.
La folie, c’est aussi « ouvrir les mottes de terre », c’est-à-dire sortir des critères dominants, moraux, religieux, etc. de la vie quotidienne, mais c’est ouvrir la terre
par la charrue pour que puisse en sortir une vie nouvelle, plus belle, et c’est par la folie qu’elle est amenée à écrire de la poésie. Alors,
pourquoi cette nouvelle créativité a-t-elle été considérée comme une chose dangereuse, une « tempête », un scandale ?
Alda Merini exprime sa question en se référant au mythe de Proserpine (Perséphone dans la mythologie grecque, fille unique de Zeus et
de Déméter (Cérès), déesse de la fertilité et des moissons. Mais elle est enlevée par Hadès, le dieu des Enfers, qui est tombé amoureux de
sa beauté. Quand elle l’apprit, sa mère se mit très en colère au point de faire disparaître toutes les plantes de la terre, avec le risque de
faire mourir tous les êtres vivants. Alors Zeus intervint et obtint finalement que Proserpine puisse sortir des Enfers pendant six mois de
l’année, printemps et été. Proserpine pleure donc à l’automne et en hiver, et ces pleurs sont la pluie qui nourrira les « herbes » et les «
blés », elles seront sa « prière », au sens fort du mot d’entrer en contact avec la divinité. Ainsi Alda Merini dit que l’asile où l’on enferme
les « fous » dans la souffrance, est aussi un lieu où peuvent renaître des puissances et créations nouvelles, forces de joie et d’espérance.
Gian Lorenzo Bernini, Enlèvement de Proserpine, 1621-22, Galerie Borghese
La métrique suit le rythme ABBC DEFAA, elle commence par deux hendécasyllabes et continue par une diversité de mètres de 9, 8, ou 7
pieds, avec deux octosyllabes en conclusion : le poèmes est donc en forme de cercle, reprenant dans les vers 8 et 9 la rime A du vers 1.
Notez aussi les assonances des vers 3 à 7 : lieve / erbe,scatenar / tempesta, grossi / frumenti / gentili.
Sono nata il ventuno a primavera
(Testo : Alda Merini
Vuoto d’amore, 1991
Musique : voce di Milva su musica di Giovanni Nuti, 2007)
Sono nata il ventuno a primavera
Je suis née le vingt-et-un au printemps
ma non sapevo che nascere folle,
mais je ne savais pas que naître folle,
aprire le zolle
qu’ouvrir les mottes de terre
potesse scatenar tempesta.
pouvait déchaîner la tempête
potesse scatenar tempesta.
pouvait déchaîner la tempête
Sono nata il ventuno a primavera
Je suis née le vingt-et-un au printemps
ma non sapevo che nascere folle,
mais je ne savais pas qu’être née folle,
aprire le zolle
qu’ouvrir les mottes de terre
potesse scatenar tempesta.
pouvait déchaîner la tempête
potesse scatenar tempesta.
pouvait déchaîner la tempête
Così Proserpina lieve
Ainsi la légère Proserpine
vede piovere sulle erbe,
voit pleuvoir sur les herbes
sui grossi frumenti gentili
sur les grands et nobles blés
e piange sempre la sera.
et elle pleure toujours le soir.
Forse è la sua preghiera.
Peut-être est-ce sa prière.
Forse è la sua preghiera.
Peut-être est-ce sa prière.
Sono nata il ventuno a primavera
Je suis née le vingt-et-un au printemps
ma non sapevo che nascere folle,
mais je ne savais pas que naître folle,
aprire le zolle
qu’ouvrir les mottes de terre
potesse scatenar tempesta
pouvait déchaîner la tempête
potesse scatenar tempesta.
pouvait déchaîner la tempête
Così Proserpina lieve
Ainsi la légère Proserpine
vede piovere sulle erbe,
voit pleuvoir sur les herbes
sui grossi frumenti gentili
sur les gros et nobles blés
e piange sempre la sera.
et elle pleure toujours le soir.
Forse è la sua preghiera.
Peut-être est-ce sa prière.
Forse è la sua preghiera.
Peut-être est-ce sa prière.
Sono nata il ventuno a primavera
Je suis née le vingt-et-un au printemps
ma non sapevo che nascere folle,
mais je ne savais pas que naître folle,
aprire le zolle
qu’ouvrir les mottes de terre
potesse scatenar tempesta
pouvait déchaîner la tempête
potesse scatenar tempesta.
pouvait déchaîner la tempête.
Sono nata il ventuno a primavera
Je suis née le vingt-et-un au printemps
ma non sapevo che nascere folle
mais je ne savais pas que naître folle,
potesse scatenar tempesta
pouvait déchaîner la tempête
aprire le zolle
qu’ouvrir les mottes de terre
potesse scatenar tempesta
pouvait déchaîner la tempête.
potesse scatenar tempesta
pouvait déchaîner la tempête
sono nata il ventuno a primavera
Je suis née le vingt-et-un au printemps
potesse scatenar tempesta.
pouvait déchaîner la tempête.
Terra santa (1984)
Ce texte d’Alda Merini exprime un univers que la société bien-pensante ne connaît pas, l’enfermement dans un asile où les « fous » sont
privés de toute humanité. Rappelons que les asiles italiens n’ont été fermés qu’en 1978, suite à la loi 180 de Franco Basaglia, (1924-
1980), le psychiatre critique des asiles, et c’est en 1972 qu’Alda était sortie de l’asile Paolo Pini où elle était enfermée depuis 1965. Son
premier retour à l’écriture est La Terra Santa, quarante poèmes publiés en 1984. « Je l’ai appelé Terra Santa car aucun péché n’y était
commis : c’était le paradis promis où l’esprit malade ne souffrait plus. Le martyre était intense au point de frôler l’extase », écrit-elle dans
L’Altra verità. Diario di una diversa, BUR, 2007, p. 106. Tous les poèmes de ce livre décrivent en détail l’horreur de cet enfermement pour
ceux qui y sont enfermés dans des conditions insoutenables, presque identiques à celles des camps de concentration nazis que décrit
Primo Levi. Pourtant dans cette damnation de l’enfer, va se forger un paradis, où les fous deviennent des anges.
Comme elle le fait souvent, Alda Merini utilise une métaphore biblique, les murs de l’asile sont les murs de Jéricho, la ville abandonnée par
Dieu, maudite par les Hébreux pour qui Josué l’avait conquise et rasée ; elle les compare aussi à un Mont SinaÏ où les malades recevaient
des Tables de la Loi incompréhensibles, on est dans la déraison, l’absurde, l’irrationnel, et seul l’amour, que l’on refuse aux fous (on leur
faisait des électrochocs s’ils s’aimaient), peut permettre de sortir de cet enfer, de briser toutes ses chaînes, un amour charnel et spirituel en
même temps, un amour « fou ». Et le Messie est un fou qui crie son amour de Dieu.
La poésie est alors l’instrument privilégié de cette libération de l’enfer de l’asile qui révèle la nature réelle de l’homme, la méchanceté, le
goût du sang, triste découverte ! Elle fait aussi référence à Orphée venant retirer Eurydice des Enfers, mais on sait qu’il va échouer s’il se retourne ! Son Orphée
le fera-t-il ?
Questo testo d’Alda Merini esprime un universo sconosciuto dalla società benpensante, l’esser chiusa in un manicomio dove i « pazzi sono privati di ogni
umanità. Ricordiamo che i manicomi italiani sono stati chiusi soltanto nel 1978, in seguito alla legge 180 di Franco Basaglia (1924-1980), lo psichiatra critico dei
manicomi, mentre Alda Merini era uscita nel 1972 dal manicomio Paolo Pini dove era rinchiusa dal 1965. Il suo primo ritorno alla scrittura è La Terra Santa,
quaranta poesie pubblicate nel 1984. « L’ho chiamata Terra Santa perché nessun peccato ci era commesso : era il paradiso promesso dove lo spirito malato non
soffriva più. Il martirio vie ra tanto intenso da stiorare l’estasi », scrive in L’altra verità. Diario di una diversa, BUR, 2007, p. 106. Tutte le poesie di quel libro
descrivono dettagliatamente l’orrore di quella chiusura per quelli che ci sono racchiusi in condizioni insostenibili, quasi identiche a quelli dei campi di
concentramento nazisti descritte da Primo Levi. Eppure in quella dannazione dell’inferno, si produrrà un paradiso, dove i « pazzi » diventano degli angeli.
Come lo fa spesso, Alda Merini usa una metafora bibblica, le mura del manicomio sono le mura di Gerico, la città abbandonata da Dio, maledetta dagli Ebrei per i
quali Josuè l’aveva conquistata e rasa ; le paragona anche ad un Monte Sinaï dove i malati ricevevano delle Tavole della Legge incomprensibili, si è
nell’insensatezza, l’assurdo, l’irrazionale, e soltanto l’amore, rifiutato ai pazzi (gli facevano degli eletrochoc se si amavano), può permettere di uscire da
quell’inferno, di rompere ogni catena, un amore carnale e spirituale nello stesso tempo, un amore « pazzesco ». E il Messia è un pazzo che grida il suo amore
per Dio.
La poesia diventa allora lo strumento privilegiato di quella liberazione dall’inferno del manicomio, che rivela la vera natura dell’uomo, la cattiveria, il gusto del
sangue, triste scoperta ! Alda fa anche riferimento ad Orfeo che viene a liberare Euridice dagli Inferi, ma si sa che non riuscirà se si rivolgerà verso lei ! Lo farà il
suo Orfeo ?
La Terra Santa
(Texte : Alda Merini
La terra Santa, 1984 et 1996 pour le texte amplifié ;
Musique : lecture par Alda Merini et musique de Giovanni Nuti (www.antiwarsongs.org/commentocat.php?id=45514&cat=43&lang=it)
Ho conosciuto Gerico,
J’ai connu Jéricho
ho avuto anch’io la mia Palestina,
J’ai eu moi aussi ma Palestine
le mura del manicomio
Les murs de l’asile
erano le mura di Gerico
étaient les murs de Jéricho
e una pozza di acqua infettata
et une mare d’eau infectée
ci ha battezzati tutti.
Nous a tous baptisés.
Lì dentro eravamo ebrei
Là-dedans nous étions juifs
e i Farisei erano in alto
et les Pharisiens étaient en-haut
e c’era anche il Messia
et il y avait aussi le Messie
confuso tra la folla :
perdu dans la foule :
un pazzo che urlava al Cielo
un fou qui hurlait au Ciel
tutto il suo amore in Dio.
Tout son amour pour Dieu.
Noi tutti, branco di asceti
Nous tous, troupeau d’ascètes
eravamo come gli uccelli
nous étions comme les oiseaux
e ogni tanto una rete
et de temps en temps un filet
oscura ci imprigionava
sombre nous emprisonnait
ma andavamo verso le messe,
mais nous allions vers les messes,
le messe di nostro Signore
les messes de Notre Seigneur
e Cristo il Salvatore.
Et du Christ notre Sauveur.
Fummo lavati e sepolti,
Nous fûmes lavés et enterrés
odoravamo di incenso.
Nous avions l’odeur de l’encens.
E dopo, quando amavamo,
Et ensuite, quand nous aimions,
ci facevano gli elettrochoc
on nous faisait des électrochocs
perché, dicevano, un pazzo
parce que, disait-on, un fou
non può amare nessuno.
Ne peut aimer personne.
Ma un giorno da dentro l’avello
Mais un jour, de l’intérieur de mon tombeau
anch’io mi sono ridestata
moi aussi je me suis réveillée
e anch’io come Gesù
et moi aussi, comme Jésus
ho avuto la mia resurrezione,
j’ai eu ma résurrection,
ma non sono salita nei cieli
mais je ne suis pas montée aux cieux
sono discesa all’inferno
je suis descendue en enfer
da dove riguardo stupita
d’où je regarde étonnée
le mura di Gerico antica.
Les murs de l’ancienne Jéricho.
Le dune del canto si sono chiuse,
Les dunes du chant se sont fermées
o dannata magia dell'universo,
Oh magie damnée de l’univers
che tutto può sopra una molle sfera.
qui peut tout sur une molle sphère.
Non venire tu quindi al mio passato,
Toi ne viens donc pas vers mon passé
non aprirai dei delta vorticosi,
tu n’ouvriras pas des deltas vertigineux
delle piaghe latenti, degli accessi
des plaies latentes, des accès
alle scale che mobili si dànno
aux escaliers qui se donnent avec mobilité
opra la balaustra del declino ;
sur la balustrade du déclin ;
resta, potresti anche essere Orfeo
reste, tu pourrais même être Orphée
che mi viene a rit
ogliere dal nulla,
qui vient me retirer du néant,
resta o mio ardito e sommo cavaliere,
reste oh mon grand et hardi chevalier
io patisco la luce, nelle ombre
je souffre de la lumière, dans les ombres
sono regina ma fuori nel mondo
je suis reine mais hors du monde
potrei essere morta e tu lo sai
je pourrais être morte et tu le connais
lo smarrimento che mi prende pieno
le désarroi qui me prend entièrement
quando io vedo un albero sicuro.
Quand je vois un arbre sûr.
RETOUR A LA TABLE DES MATIERES CHAPITRE 40 - Conclusion