Poésie en musique - chapitre 13 - suite
CANTO VII : la bellezza d’Alcina
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Non tanto il bel palazzo era escellente Le palais n’était pas tellement excellent
perché vincesse ogn’altro di ricchezza, parce qu’il surpassait tous les autres par sa richesse,
quanto ch’avea la piú piacevol gente
que parce qu’il avait les gens les plus aimables
che fosse al mondo e di piú gentilezza. qui soient au monde et de plus de noblesse.
Poco era l’un da l’altro differente Ils étaient peu différents les uns des autres
e di fiorita etade e di bellezza : dans la fleur de l’âge et de la beauté :
sola di tutti Alcina era piú bella, seule Alcine était plus belle que tous les autres,
sì come è bello il sol piú d’ogni stella. comme le soleil est plus beau que toutes les étoiles.
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Di persona era tanto ben formata, De sa personne elle était aussi bien faite
quanto me’ finger san pittori industri ;
que ce que savent représenter les peintres industrieux ;
con bionda chioma lunga et annodata : une longue chevelure blonde et bouclée :
oro non è che piú risplenda e lustri. il n’y a pas d’or qui resplendisse et brille plus.
Spargeasi per la guancia delicata elle répandait sur ses joues délicates
misto color di rose e di ligustri ; un mélange de couleurs de roses et de lys
di terso avorio era la fronte lieta, son front heureux d’un pur ivoire
che lo spazio finia con giusta meta. terminait un espace justement proportionné.
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Sotto duo negri e sottilissimi archi Sous deux sourcils noirs et très fins
son duo negri occhi, anzi duo chiari soli, se trouvent deux yeux noirs, plutôt deux clairs soleils,
pietosi a riguardare, a mover parchi ; tendres dans leur regard et lents à se mouvoir ;
intorno cui par ch’Amor scherzi e voli, et autour d’eux il semble qu’Amour plaisante et vole,
e ch’indi tutta la faretra scarchi et que delà il décharge son carquois
e che visibilmente i cori involi : et que de façon claire il vole les cœurs :
quindi il naso per mezzo il viso scende, et puis son nez descend au milieu de son visage,
che non truova l’Invidia ove l’emende. de sorte que l’Envie n’en a rien à redire.
13
Sotto quel sta, quasi fra due vallette, Au dessous, comme entre deux fossettes,
la bocca sparsa di natio cinabro ;
une bouche couverte de cinabre naturel
quivi due filze son di perle elette, Là deux rangées de perles choisies,
che chiude et apre un bello e dolce labro : que cache et ouvre une lèvre belle et douce :
quindi escon le cortesi parolette de là sortent les petits mots assez courtois
da render molle ogni cor rozzo e scabro ; pour amollir le cœur le plus rude et farouche ;
quivi si forma quel suave riso, ici se forme ce doux sourire,
ch’apre a sua posta in terra il paradiso. qui ouvre à son gré le paradis sur terre.
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Bianca nieve è il bel collo, e ’l petto latte ; De neige blanche est son beau cou, de lait est sa poitrine ;
il collo è tondo, il petto colmo e largo :
le cou est rond, la poitrine pleine et large :
due pome acerbe, e pur d’avorio fatte, deux fruits durs, également d’ivoire,
vengono e van come onda al primo margo, vont et viennent comme l’onde au rivage,
quando piacevole aura il mar combatte. quand l’agréable brise vient agiter la mer.
Non potria l’altre parti veder Argo : Arfos ne pourrait voir le reste de son corps:
ben si può giudicar che corrisponde mais on peut bien juger que la partie cachée
a quel ch’appar di fuor quel che s’asconde. doit être en harmonie avec celle qu’on voit.
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Mostran le braccia sua misura giusta ; Ses bras montrent de justes proportions ;
e la candida man spesso si vede et l’on voit souvent sa main blanche
lunghetta alquanto e di larghezza angusta, assez longue et étroite en largeur,
dove né nodo appar, né vena escede. où n’apparaît ni veine ni jointure.
Si vede al fin de la persona augusta On voit enfin de sa personne auguste
il breve, asciutto e ritondetto piede. son petit pied mince et potelé.
Gli angelici sembianti nati in cielo Ses apparences d’ange nées au ciel
non si ponno celar sotto alcun velo. Ne peuvent être cachées sous aucun voile.
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Avea in ogni sua parte un laccio teso, Sur toute sa personne un piège est bien tendu
o parli o rida o canti o passo muova : qu’elle parle, qu’elle rie ou chante ou fasse un pas :
né maraviglia è se Ruggier n’è preso, il n’est pas étonnant que Roger s’en éprenne
poi che tanto benigna se la truova. puisqu’il la trouve si bienveillante.
Quel che di lei giá avea dal mirto inteso, Ce qu’il avait entendu dire d’elle par le myrte
com’è perfida e ria, poco gli giova ; sur sa perfidie et sa méchanceté ne lui importe pas;
ch’inganno o tradimento non gli è aviso car il ne peut avoir l’idée que la tromperie et la trahison
che possa star con sí soave riso. puissent être cachées sous un si doux sourire.
CANTO XXIII : La follia d’Orlando
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Pel bosco errò tutta la notte il conte ;
Le comte dans le bois erra toute la nuit ;
e allo spuntar della diurna fiamma
et quand apparut la flamme du jour
lo tornò il suo destin sopra la fonte
son destin le ramena près de la source
dove Medoro insculse l’epigramma.
où Médor avait gravé son épigramme.
Veder l’ingiuria sua scritta nel monte
À la vue de sa honte inscrite sur le mont
l’accese sí, ch’in lui non restò dramma
il s’enflamma si bien qu’il n’y eut plus en lui
che non fosse odio, rabbia, ira e furore ;
une once autre que haine et rage et colère et fureur
né piú indugiò, che trasse il brando fuore.
et il ne tarda pas à tirer son glaive.
130
Tagliò lo scritto e ’l sasso, e sin al cielo
Il fendit l’inscription et la pierre, et jusqu’au ciel
a volo alzar fe’ le minute schegge,
en fit voler les plus petits éclats,
infelice quell’antro, et ogni stelo
malheur à cette grotte et à chaque tronc d’arbre
in cui Medoro e Angelica si legge !
où l’on trouve le nom d’Angélique et Médor !
Così restar quel dì, ch’ombra né gielo
Ainsi depuis ce jour, ni ombre ni fraîcheur
a pastor mai non daran piú, né a gregge :
ils ne donneront jamais plus aux bergers et aux troupeaux :
e quella fonte, giá si chiara e pura,
et cette source, autrefois si claire et pure,
da cotanta ira fu poco sicura ;
ne fut pas assurée contre un telle colère.
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che rami e ceppi e tronchi e sassi e zolle car les branches et les souches, les troncs, les pierres et les mottes de terre
non cessò di gittar ne le bell’onde,
il ne cessa de jeter dans les belles eaux,
fin che da sommo ad imo sì turbolle,
jusqu’à ce que de la surface au fond il les ait tant troublées
che non furo mai piú chiare né monde.
qu’elles ne furent jamais plus ni claires ni transparentes.
E stanco al fin, e al fin di sudor molle,
Et enfin fatigué et moite de sueur,
poi che la lena vinta non risponde
après que son haleine vaincue ne réponde plus
allo sdegno, al grave odio, all’ardente ira,
à son mépris, sa lourde haine, son ardente colère,
cade sul prato, e verso il ciel sospira.
il tombe sur le pré soupire vers le ciel.
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Afflitto e stanco al fin cade ne l’erba,
Affligé et fatigué il tombe enfin dans l’herbe
e ficca gli occhi al cielo, e non fa motto.
regarde fixement le ciel sans dire un mot.
Senza cibo e dormir cosí si serba,
Il se conserve ainsi sans manger ni dormir
che ’l sole esce tre volte e torna sotto.
tandis que le soleil se lève et redescend trois fois.
Di crescer non cessò la pena acerba,
Sa peine acerbe ne cessa de grandir,
che fuor del senno al fin l’ebbe condotto.
jusqu’à ce qu’à la fin elle lui fit perdre la raison.
Il quarto dí, da gran furor commosso,
Le quatrième jour, agité d’une grande fureur,
e maglie e piastre si stracciò di dosso.
cotte de mailles et plastron il arracha de son dos.
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Qui riman l’elmo, e là riman lo scudo,
Ici reste son heaume, là reste son bouclier,
lontan gli arnesi, e piú lontan l’usbergo : au loin ses armes, et plus loin son haubert :
l’arme sue tutte, in somma vi concludo,
toutes ses armes en somme pour conclure
avean pel bosco differente albergo.
se retrouvaient aux quatre coins du bois ;
E poi si squarciò i panni, e mostrò ignudo Puis il déchira ses vêtements, et montra nu
l’ispido ventre e tutto ’l petto e ’l tergo ; son ventre poilu, toute sa poitrine et son dos ;
e cominciò la gran follia, sí orrenda,
et commenca la grande folie, si horrible
che de la piú non sará mai ch’intenda.
que l’on n’en verra jamais de plus grande.
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In tanta rabbia, in tanto furor venne, Il en arriva à tant de rage et de fureur
che rimase offuscato in ogni senso.
que tous ses sens en furent voilés.
Di tor la spada in man non gli sovenne ;
Il ne se souvient plus qu’il tient à la main une épée ;
che fatte avria mirabil cose, penso.
il en aurait fait de magnifiques choses, je pense.
Ma né quella, né scure, né bipenne
Mais il n’a besoin ni d’épée, ni de cognée
era bisogno al suo vigore immenso. ni de hache gauloise, tant sa vigueur est immense.
Quivi fe’ ben de le sue prove eccelse,
Ici il en donna d’excellentes preuves,
ch’un alto pino al primo crollo svelse :
arrachant un très grand pin à la première secousse.
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e svelse dopo il primo altri parecchi,
et après le premier, il en arracha plusieurs autres pareils,
come fosser finocchi, ebuli o aneti ;
comme si c’était du fenouil, du sureau, de l’aneth ;
e fe’ il simil di querce e d’olmi vecchi,
et il en fit de même et chênes et de vieux ormes,
di faggi e d’orni e d’illici e d’abeti.
de hêtres et de frênes, d’yeuses et de sapins.
Quel ch’un ucellator che s’apparecchi
Ce que fait l’oiseleur qui appareille
il campo mondo, fa, per por le reti,
une place nette pour poser ses filets,
dei giunchi e de le stoppie e de l’urtiche,
en arrachant des joncs, des chames et des orties
facea de cerri e d’altre piante antiche.
il le faisait avec des chênes et d’autres plantes séculaires.
Fammi combattere
(Texte inspiré de l’Orlando furioso de l’Arioste
Musique : Georg Friedrich Haendel
Orlando, Acte I, scène X, 1733)
Fammi combattere, mostre e tifei, Fais-moi combattre monstres et hydres
novi trofei se vuoi dal mio valor. Si tu veux de mon courage de nouveaux trophées.
Muraglie abbattere, disfare incanti,
J’abattrai des murailles, je dissiperai des sortilèges
se vuoi ch’io vanti darti prove d’amor.
Si tu veux que je te donne des preuves d’amour.
Dans cet acte I arrive le moment où Orlando (contralto) croit avoir enfin retrouvé la princesse Angelica. Celle-ci ne l’aime pas, elle aime Medoro ; mais pour se
débarrasser d’Orlando, elle feint d’être jalouse et lui demande d’accomplir pour elle de nouveaux exploits, tandis qu’en secret elle prévoit de s’enfuir avec Medoro.
Una bella immagine dell’ideale della bellezza
fmminile del Cinquecento.Cf. altre descrizioni
dal Boccaccio al Tasso.