Les châteaux d’Italie (suite)
Les châteaux d’Italie
retour à la page 1
.
b) L’Italie centrale
* Castello dell’Abbadia - Viterbo- Latium
Il est construit pour protéger un ancien pont étrusque (Pont de
l’Arc-en-ciel ou du Diable, IIIe s. av.J.C.), il fut d’abord une
abbaye bénédictine au IXe siècle, fortifiée pour se défendre
contre les invasions sarrasines. L’essentiel de ce qu’on voit
relève du XIIe siècle. Il appartint entre autres aux Farnese dont
le cardinal Alessandro, futur pape Paul III, aimait venir y
séjourner. Il est aujourd’hui le siège du Musée Archéologique de
Vulci.
* Castello del Piagnaro - Pontremoli - Toscane
Il est construit à partir du XIe siècle pour contrôler et défendre les voies de communication aussi importantes
que la Via Francigena et autres voies commerciales. Son nom de « Piagnaro » vient des « piagne », les
dalles en grès utilisées en Lunigiana pour construire les toits des habitations. Il connut maintes destructions et
reconstructions adaptées aux nouvelles techniques d’armement.
* Rocca Monaldeschi della Cervara -Bolsena - Latium
On en connaît l’existence depuis 1156, quand le pape Adrien IV,
en vue des incursions de l’empereur Frédéric Barberousse, fit
fortifier les centres de la Via Cassia (les murs d’enceinte de
Bolsena), et construire ce château en quadrilatère avec ses 4
tours de défense qui permettaient la disposition des lignes de
défense : une des 4 est surmontée de créneaux guelfes, c’était une tour de défense primitive. Les
Monaldeschi, puissante famille guelfe descendant de la famille d’Anjou, s‘y installent à partir de 1295 et
transforment peu à peu le château en résidence princière, avant qu’il ne devienne une prison puis un dépôt
jusqu’à la restauration de 1970.
* Rocca Albornoziana di Spoleto - Ombrie. Située au-
dessus de Spoleto, c’est la plus importante forteresse du
système de défense des territoires pontificaux de l’Ombrie
institué par le pape Innocent VI, après le retour des papes de l’exil d’Avignon : elle est construite de 1363 à
1367 par le cardinal espagnol Egidio Albornoz, qui la fit organiser de façon à être très solide et défensive en
même temps qu’élégante pour y recevoir des hôtes illustres. Elle devient une prison de 1817 à 1982.
* Rocca Calascio - Abruzzes
Elle est commencée en 1140 par les Normands ; c’est la
plus haute forteresse des Apennins (1460 m.), destinée à
une fonction de surveillance et de cantonnement militaire.
Les Abruzzes sont une des régions qui ont plus grand
nombre de châteaux : c’était une région de transition entre
le Nord et le Sud, souvent attaquée de part et d’autre et où
il a donc fallu construire de nombreuses structures de
défense (quelques centaines, dont beaucoup ont été
abandonnées, ne laissant que quelques ruines), en
particulier contre les attaques des Hongrois venus du Nord
et des Sarrasins venus du Sud dès le Xe siècle.
Celle-ci a un plan carré avec 4 tours d’angle rondes et un
donjon carré au centre. Elle dominait et protégeait le
village qui était un des grands lieux de passage des troupeaux de moutons en transhumance. Elle est dévastée par un
tremblement de terre en 1703.
Elle est proche du village de Santo Stefano di Sessanio, doté de sa tour Médicis, avec ses créneaux et ses corbeaux
guelfes (Cf. ci-contre à gauche).
* Rocca Costanza di Pesaro - Marches
Modèle de « forteresse de plaine » à plan carré orienté sur les 4 points cardinaux, avec 4 grosses tours
cylindriques angulaires. Construite en 1474 par Costanzo Sforza en remplacement de l’ancienne
enceinte des Malatesta et sur l’ancien cimetière israélite. Occupée en 1500 par Cesare Borgia qui en fait
faire le dessin par Léonard de Vinci qui inspirera ensuite les architectes français. C’est probablement
aussi Léonard qui conseille la construction du grand fossé, devenu maintenant une belle promenade
pour les habitants avec leurs chiens.
* Castello di Bracciano - Odescalchi / Orsini - Latium
Il est d’abord une forteresse médiévale du XIIIe siècle, au
bord du lac de Bracciano, et sur celle-ci Napoleone
Orsini fait édifier en 1470 le château actuel, pentagonal
avec ses 5 tours, sur projet de Francesco di Giorgio
Martini ; c’est un des plus beaux exemples d’architecture
militaire de cette époque. Somptueusement décoré de
fresques, il passe aux Odescalchi en 1698. Il est un des
plus grands châteaux et un des plus représentatifs des
châteaux de caractère militaire passant peu à peu au
stade de résidence seigneuriale des aristocrates de la
cour des papes. En 1560, les frères Zuccari y ont peint
des fresques à l’occasion des noces de Paolo Giordano
Orsini et Isabelle de Médicis ; la salle d’armes des
Odescalchi est très riche.
* Torre Astura - Latium
Dans l’antiquité romaine il y eut une villa de Cicéron, fréquentée aussi par plusieurs empereurs, aujourd’hui
complètement détruite et abandonnée sous la végétation. En 1193, le site fut occupé par les Frangipani qui y
construisent une forteresse maritime pour se protéger des Sarrasins, avec une tour pentagonale reliée à la terre
par l’ancien pont romain de la villa de Cicéron. La forteresse passe ensuite en possession de diverses familles
romaines avant de revenir à la commune voisine de Nettuno dans les années 1970.
* Castello di Civitella del Tronto - Abruzzes.
Une fortification existe depuis le début du XIe siècle pour
défendre cette frontière nord du Royaume de Naples ; c’est une
des plus grandes réalisations d'ingénierie militaire, à 600 m.
d’altitude au-dessus de l’agglomération. Après la mort de
Frédéric II, c’est Charles d’Anjou qui la fit restaurer et agrandir ;
puis elle passa à la famille d’Aragon qui en fit une forteresse de
25.000 m2. En 1860-61, les soldats de Garibaldi durent
l’assiéger pendant plus de 6 mois pour l’obliger à se rendre.
* Castello Piccolomini di Celano - Abruzzes (L’Aquila).
Sur la base d’un château en bois et en terre battue de Frédéric II, au-dessus du lac de Fucino, fut construite en
1392 la fortification actuelle par le comte de Celano sur la colline de San Flaviano, avec des créneaux gibelins.
Ce sont les Piccolomini, neveux du pape Pie II, qui poursuivirent le développement, transformant un château
de défense en palais résidentiel, ouvrant par exemple les fenêtres en architrave de style Renaissance)
c) L’Italie du sud
Les châteaux de Naples
Naples fut presque toujours une ville indépendante jusqu’en 1137, date de l’arrivée de Roger le Normand. Le
duc de Naples résida donc non dans un château, mais dans un grand palais. À partir du moment où la ville
devient capitale d’un immense royaume, les rois durent faire construire tout un système de défense autour de la
ville, qui devient « la ville des 7 châteaux », comme Rome est « la ville des 7 collines ».
* Castel dell’Ovo : le plus ancien monument historique de Naples depuis le Ve siècle où, sur cette petite
île s’installèrent des moines. Mais il avait été d’abord le
premier lieu de débarquement des Grecs de Cumes au VIIIe
siècle av.J.C., et c’est le lieu mythique de Naples, où s’est
échouée la sirène Parthénopé qui donne son nom à la ville, et
plus tard sainte Patricia, patronne de Naples … et c’est là que
selon la légende Virgile plaça dans une cage un œuf magique
auquel reste lié le destin de Naples… Mais il fut remplacé au
XIVe siècle, ce serait la source des maux de la ville !
* Castel Capuano, construit en 1154 par les Normands, mais
tellement restauré qu’il ne reste pas grand-chose de sa forme d’origine. Il
a été jusqu’à une date récente le palais de justice de la ville.
* Castel Sant’Elmo (= St Érasme) : construit en 1329 par Robert
d’Anjou sur la colline du Vomero, au-dessus de la chartreuse de San Martino, à la fois pour surveiller les
routes qui arrivaient à la ville et pour contrôler l’agitation de la population urbaine. Les Espagnols le
transformèrent ensuite dans l’étoile à 6 branches existant encore aujourd’hui.
* Castel Nuovo (Maschio Angioino) : réalisé en 1279 par Charles
d’Anjou, développé en 1442 par Alphonse d’Aragon ; il est au cœur de
l’histoire de Naples avec ses 5 tours, et sa porte principale ornée d’un arc de
triomphe célébrant le triomphe des Aragon : un arc de triomphe inférieur
entouré de reliefs qui représentent Alphonse d’Aragon entre sa famille et ses
capitaines ; sur l’attique, le triomphe d’Alphonse ; et un arc supérieur avec
des colonnes ioniques binaires qui devaient contenir la statue du roi, et en
haut, 4 statues, des 4 Vertus (Tempérance, Justice, Force et Magnanimité),
surmontées de statues de fleuves et de la statue de St Michel (Francesco
Laurana, Domenico Gagini, Isaia da Pisa Guillem Sagrera).
* Castello del Carmine, de 1382 pour défendre la partie sud-est de la ville, dont il ne reste que 2 tours cylindriques
après la démolition de 1906.
* Castello di Nisida (Cf. à droite) : construit au contraire sur une petite île pour protéger l’ouest de la ville, sur les
ruines d’une villa de Brutus et d’un manoir angevin : au XVIe siècle, les attaques des Arabes devenaient très redoutables
(le corsaire Khayr ad-Din Barberousse (1466-1546) dévaste Ischia et Procida en 1544).
* Forte di Vigliena, construit au XVIIIe siècle à l’est de Naples.
Dans la région, beaucoup d’autres châteaux défensifs ou résidentiels, par exemple :
* Castello di Sant’Aniceto - Calabre
Château byzantin du XIe siècle au-dessus de Reggio Calabria, un des rares exemplaires conservés de
château calabrais, lieu de contrôle des incursions sarrasines et de refuge de la population. Son nom est dû
à celui d’un saint sicilien très honoré par les populations siciliennes qui avaient émigré en Calabre et qui
participèrent à l’édification du château.
* Castello Pandone di Venafro (Molise) : ancienne fortification mégalithique samnite préromaine,
transformée par les Longobards (le donjon carré), puis par les
Angevins qui ajoutent les trois tours rondes et l’enceinte crénelée ;
en 1443, les Aragonais donnent la forteresse à Francesco Pandone, qui la fait décorer de fresques de ses chevaux
(Cf. ci-contre à gauche).
* Castello di Bosa - Sardaigne - côte ouest) : édifié au XIIIe siècle par la famille toscane de
Malaspina, descendants des Obertenghi, au sommet de la colline de Serravalle. Les Malaspina possédèrent
la province de Massa, sur la rive toscane, la Sardaigne et une partie de la Ligurie.
Mais un des grands constructeurs de châteaux fut l’empereur Frédéric II (1194-1250), surtout dans le sud de l’Italie.
Frédéric II, roi de Sicile à 4 ans en héritage de sa mère, Constance d’Altavilla, empereur à 22 ans, avait pour but de transformer l’empire, à partir d’une
grande vision du monde qui devait le conduire à la paix entre les civilisations juive, chrétienne et musulmane. Un de ses soucis fut la protection militaire de
l’empire et donc la construction ou la restauration d’environ 200 châteaux ; selon son décret de 1239, chacun de ses châteaux devait être l’ombre du
souverain, de sa magnificence, de sa force, de sa protection.
La Pouille fut sa région préférée (on le disait Puer Apuliae, fils de la Pouille). Parmi les villes qu’il préférait, d’abord Foggia, mais entre tremblements de
terre, bombardements et volonté de destruction pontificale, il ne reste pratiquement rien de son splendide château. Mais il construisit des châteaux dans
beaucoup d’autres villes des Pouilles :
Castelli de Federico II (1194-1250) :
* Castello di Trani - Pouilles, près de Barletta. Il fut édifié en 1233 sur la base d’une tour du Xe siècle,
pour la protection du port et complété en 1249. Manfred, le fils et l’héritier de Frédéric II, y séjourna souvent.
Le château passa ensuite sous la domination de la famille d’Anjou qui commença à le modifier, puis sous
celle de Charles Quint et des Espagnols qui l’adaptent aux nouvelles armes à poudre. Il devient une prison,
est restauré et ouvert au public en 1998
* Castello di Bisceglie - Pouilles, près de Barletta. Château construit à partir de 1060, et repris par
Frédéric II, puis refait par les Aragon, transformé et dégradé par des particuliers au XVIIIe siècle, restauré
récemment.
* Castello di Barletta - Pouilles. Édifié peu à peu à partir du XIe
siècle, développé par Frédéric II à partir de 1228 ; il en fit non seulement
une œuvre défensive mais un palais royal pour sa cour. Il fut ensuite
modifié par les Angevins et par les Espagnols. On y conserve une statue de
Frédéric II (rare, car les papes firent détruire beaucoup d’œuvres pour faire
oublier sa mémoire).
* Castello di Bari - Pouilles - Fortification médiévale de 1132, construite sur des forteresses romaines par les
Normands, détruite par les habitants et reconstruite par Frédéric II en 1233 ; il en reste le donjon et le château, les
Aragon ajoutent le mur d’enceinte actuel. Les nouvelles illuminations à partir de 2017 permettent de distinguer les
différentes époques de construction, dont beaucoup ont été détruites ; il reste surtout l’enceinte de défense aragonaise
entourée de son fossé sur trois côtés (ci-dessous à gauche).
* Castello di Brindisi - Pouilles : le château de mer par opposition à l’autre château dit château de terre, pour
protéger la vie et le port de Bari. Probablement réalisé sur des restes de forteresse romaine. Bari comme Brindisi
étaient les ports de départ du commerce avec l’Orient dès l’Antiquité. Les murailles extérieures sont des XVe et XVIe
siècles (voir à droite).
* Castello di Lucera - Pouilles : il domine le plateau du
Tavoliere des Pouilles sur le Colle Albano, occupé depuis le IIIe
millénaire av.J.C. En 1223, Frédéric y concentre les Musulmans de
son Royaume, et Lucera devient une ville musulmane, où Frédéric fait
construire son Palatium. En 1269, Charles d’Anjou édifie une enceinte
de plus de 900 mètres de long, fait assassiner la population
musulmane et installe des émigrés provençaux. Une immense citerne
alimentait le château en eau potable. Ci-contre à droite une
reconstitution et à gauche la Tour de la Lionne.
* Castello di Melfi - Basilicata, c’est un des plus importants châteaux médiévaux d’Italie, construit
à l’époque normande vers 1043 et très utilisé par les papes (il s’y tient 5 conciles et plusieurs synodes)
et agrandi en 1231 par Frédéric II qui y attachait une grande importance. C’est là qu’il écrit l’essentiel de
sa réforme des constitutions du Royaume. C’est aussi dans ce château qu’il rencontre son grand
amour, Bianca Lancia, d’où naîtra son fils préféré Manfredi. Le château avait une cathédrale détruite par
un tremblement de terre en 1851.
* Castello di Catania - Sicile : voulu et construit par Frédéric II entre 1239 et 1250, comme base de la défense côtière
orientale sicilienne, avec celui de Syracuse. Schéma classique de château en
quadrilatère (Cf. ci-contre). Transformé en prison, il comporte des graffitis intéressants
de prisonniers.
* Castello di Siracusa - Sicile - Construit sur d’importantes forteresses grecques de l’Antiquité, stratégique pour
la défense du port. Commencé en 1038 par le commandant byzantin Giorgio Maniace, reconstruit par Frédéric II entre
1232 et 1239 (ci-contre à gauche).
Castello di Caccamo - Sicile, vers Palerme - Construction normande à 513 m. au-dessus du niveau de la mer, à
partir d’une tour arabe, au-dessus du bourg médiéval (Photo à droite)
Dans le Centre, Frédéric II ne construisit qu’un château, à Prato, sur la route stratégique entre l’Allemagne et la Sicile :
* Castello di Prato -Toscane. Il fut construit en 1248 sur une forteresse antérieure par Frédéric II dans le
cadre de la lutte avec le pape pour la domination de la Toscane ;
c’était aussi sur la route entre l’Allemagne et le Sud. Comme pour
beaucoup d’autres, c’est le grand architecte de Frédéric qui procéda
à son élaboration, Riccardo da Lentini, venu exprès des Pouilles.
C’est un édifice classique à plan carré, avec 4 tours d’angle et 4
autres tours dont 2 étaient héritées du précédent édifice. Il fut
ensuite transformé en prison, et restauré en 1975.
Mais la principale réalisation de
Frédéric II est le château de
Castel del Monte, conçu par
Frédéric et réalisé aussi par
Riccardo da Lentini. Depuis sa
construction vers 1240, jusqu’à
aujourd’hui, on n’a pas cessé de
s’interroger sur sa signification,
qui reste un mystère. Il est tout
entier bâti sur le chiffre 8, unique
dans les Pouilles : 8 côtés, 8 tours
octogonales, cour octogonale, 8
salles identiques à chaque étage,
la vasque octogonale qui se
trouvait probablement dans la
cour octogonale ; c’est un des
plus anciens symboles de la Rose des vents (et les
roses ont souvent 8 pétales), de l’Infini, de l’Incommensurable dans presque toutes les religions
(Cf. les 8 pétales du lotus) ; et l’octogone est symbole de résurrection, d’équilibre (la carte VIII des
Tarots signifie la Justice), de bonheur parfait, de reconquête du Paradis : voir les 8 Béatitudes de
Jésus, la forme octogonale des baptistères … les historiens parlent des années en 8 du XXe
siècle, 1948, 1958, 1968, 1978, 1988, 1998 !!. Pour les philosophes grecs pythagoriciens, le carré
de 8 (8x8 = 64) était le nombre de la sagesse créative. C’est aussi le symbole du Constructeur, du
Souverain, du chef décidé à conquérir pouvoir et autorité, à comprendre la totalité du monde et
des lois qui le gouvernent, posséder l’ensemble des savoirs (Frédéric fut un grand scientifique, attaché aux mathématiques, à
l’astronomie, une « Stupor Mundi », stupeur du monde, comme on l’appelait …). La semaine n’a que 7 jours parce que le temps
continue et n’est donc pas achevé. La mesure moyenne de l’homme au Moyen-Âge était de 8 à 9 empans (plus ou moins 20
cm).
L’autre chiffre significatif est le 3 : la « trifora » de la salle Nord du 1er étage, les 3 fenêtres intérieures, les 3 entrées de la cour,
les 3 escaliers en colimaçon, les 3 côtés où il n’y a pas d’écoulement pour l’eau.
Castel del Monte ne semble pas adapté à la défense : pas de fossé, pas d’écuries, pas de cuisines … Alors à quoi ? la dernière hypothèse des architectes
de l’Université de Bari est qu’il s’agissait d’une sorte de hammam à l’orientale, autour de la vasque octogonale de la cour, qui a disparu, dont on retrouve
aujourd’hui dans les murs les dispositifs de circulation de l’eau. C’était donc à la fois un lieu mystique (dont la structure interne semble souvent inspirée de
celle des abbayes cisterciennes) et un lieu de plaisir ordonné selon des symboles numériques et autres.
4. Enfin, à partir du XVe siècle, les Communes évoluent vers des « seigneuries ».
Elles sont caractérisées par le pouvoir d’une seule grande famille, comme les Savoie qui, eux, continuent à régner au Piémont depuis le IXe siècle, et
deviendront ducs puis rois au XVIIIe siècle, après avoir déménagé leur capitale de Chambéry à Turin en 1563, et ils collectionneront les grands châteaux
comme lieux de chasse ; les Sforza sont maîtres de Milan, les Este de Ferrare, les Gonzague de Mantoue, les Médicis de Florence, les Espagnols dans le
Royaume de Naples et en Lombardie, à partir de la défaite de François 1er, et évidemment le pape à Rome, maintenant monarque absolu d’un grand État
où il gouverne avec quelques grandes familles nobiliaires, ses vassaux (voir par exemple leurs châteaux des lacs qui environnent Rome).
C’est seulement quand les « communes bourgeoises » se transforment ainsi en « seigneuries » que les villes commencent à se construire leurs
châteaux, comme postes de défense tournés contre la ville et permettant d’en maîtriser les révoltes populaires. C’est le cas à Florence, Turin, Milan,
L’Aquila. Dans le Sud où la situation reste féodale mais sous le contrôle d’un roi ou d’un empereur, on continue à construire des châteaux.
* Castelli dei Savoia - Piémont :
– Castello di Moncalieri : contrôlant le passage du Pô depuis le XIe siècle, il est transformé en demeure ducale
dans la seconde moitié du XVe siècle ;
– Castello di Rivoli : existant depuis le XIe siècle et devenu résidence
ducale après 1559, abandonné après la guerre jusqu’en 1979, et restauré en
laissant les ruines en l’état, puis devenu Musée d’Art Pauvre.
– Castello di Racconigi : devenu résidence royale, puis Musée royal après
la déclaration de la République (photo à droite)
– Castello di Pollenzo : où s’installe l’Université des Sciences
Gastronomiques de Slow Food (photo à gauche) ;
– Venaria Reale : bâtie comme résidence de chasse à partir du
XVIIe siècle, et intégrant tout le village d’Altesano dans la
reconstruction de Filippo Juvarra à partir de 1706 (Cf. à gauche).
C’est aujourd’hui un des plus intéressants, avec son grand parc,
riche aussi d’œuvres de Pennone, et de ses expositions (Cf. à
droite).
* Castello Sforzesco - Milan :
il est construit au XVe siècle par Francesco Sforza sur les ruines d’une ancienne forteresse des Visconti du
XIVe siècle. Il a environ 200 m. de côté, est flanqué de douves (fossés autour du château) et, côté ville (à
droite), de deux tours rondes, tandis que du côté campagne d’alors, il avait deux tours carrées qui
protégeaient la petite forteresse dans la forteresse, où habitait le duc (au fond à gauche sur l’image). La
grande tour côté ville est construite par le Filarète (architecte toscan, 1400-1469) et servait de dépôt de
poudre. À partir de 1893, il fut peu à peu transformé en musée d’art ancien, d’archéologie, d’instruments de
musique, etc.
* Castello Estense de Ferrare - Emilie-Romagne : Il est construit à partir de 1385, et dès l’origine, les bombardes étaient
dirigées vers la ville, alors que les Este ne sont vicaires pontificaux que depuis
1372. En 1917-18, le peintre Giorgio De Chirico a représenté le château sur un
tableau pour la seconde fois, dans Le Muse inquietanti.
* Castello di Mantova - Lombardia : construit à partir de 1395, mais restauré en 1459, résidence d’Isabelle d’Este, femme de Francesco II di
Gonzaga, qui réunit les plus grands artistes de son temps, dont Andrea Mantegna qui peint La Camera degli Sposi en 1459 ; il y représente les membres
de la famille de Ludovic Gonzague (Cf. photos 1 et 2).
* Castello dell’Aquila - Abruzzes : construit en 1532 par les Vice-Rois espagnols pour défendre la
ville contre les révoltes de la population (Voir ci-dessus à droite).
* Rocca Pia di Tivoli - Latium : construite en tuf volcanique en 1458 par le pape Pie II pour
s’assurer l’allégeance des habitants de la ville qui se révoltaient souvent, en hébergeant à Tivoli les
troupes fidèles au Saint-Siège. C’est une grande forteresse carrée dotée de 4 tours d’angle ; elle a des
murs de 4 m. d’épaisseur, et le pape la dota d’une fabrique d’armes pour mieux assurer son autonomie.
C’est là qu’en 1539, le pape Paul III reçut Ignace de Loyola pour la création de la Compagnie de Jésus.
En 1522, le pape Adrien VI avait supprimé la municipalité, soumettant définitivement la ville au pouvoir
pontifical.
* Castel Sant’Angelo de Rome :
Ce fut le Mausolée d’Hadrien construit en 125 apr.J.C., transformé en
forteresse pour protéger le Vatican lorsque les papes s’y installent au
XIVe siècle ; il sert souvent de refuge, à Alexandre VI en 1494 quand
Rome est occupée par Charles VIII, et Clément VII y résiste six mois
aux lansquenets de Charles Quint en 1527. Depuis Léon IV en 852, il est relié au Vatican par une muraille, et plus tard, en
1277, on construira un couloir secret (le « passetto di borgo ») pour que les papes puissent y accéder sans passer par
l’extérieur.
* Castello di Miramare - Frioul - Trieste : Un dernier
exemple de château de résidence, construit en 1856 pour
l’archiduc d’Autriche, empereur du Mexique, vice-roi de
Lombardie-Vénétie, Maximilien Joseph de Habsbourg,
frère de l’empereur d’Autriche, et pour sa femme la princesse
Charlotte de Belgique. Le duc Amédée d’Aoste y habita aussi.
Il est d’un romantisme néo-médiéval et néogothique. Le parc
est une sorte de jardin des merveilles, d’une grande richesse
botanique, surtout de plantes non-européennes. Le château
est aujourd’hui Musée historique.
Page suivante