2.4.6. L’actualité culturelle : les expositions
Lyon Renaissance
Une exposition délicate et poétique
Musée des Beaux-arts de Lyon
Le Musée des Beaux-arts de Lyon, avec la collaboration des Musées Gallo-Romain, de l’Imprimerie, Gadagne et autres institutions de la
ville, grâce aussi aux prêts de prestigieux musées internationaux (Louvre, Vienne, New York), de la Bibliothèque Nationale de France et
Municipale de Lyon, nous a concocté une exposition d’une rare sensibilité, recherche du temps perdu et plongée dans un humanisme
lyonnais dont on avait perdu la trace. Village au centre d’un carrefour géographique déjà dans l’Antiquité préromaine, Lugdunum sera
refondé par Munatius Plancus, un des généraux de César à qui le Senatus Populusque Romanus n’avait rien trouvé de mieux, après
son assassinat, que de lui commander de fonder une ville pour éviter qu’il ne revienne à Rome avec ses troupes. Lyon a connu au
XVIème siècle les heures les plus riches et lumineuses de son histoire. La présence de marchands et banquiers florentins et flamands,
les séjours d’écrivains, tel que Rabelais et Marot et de Du Bellay dans ses allées et retours d’Italie, facilita son éclat artistique et culturel,
rendu possible par la richesse de la ville grâce aux implantations industrielles de la soierie et de l’imprimerie, cette dernière rivalisant
avec Venise – il suffit de rappeler les noms prestigieux de Sébastien Gryphe et Jean de Tournes, libraires raffinés, éditeurs de livres qui
sont aujourd’hui des trésors bibliographiques. Louise Labé, Maurice Scève et d’autres mineurs représentèrent une petite école de
poésie, aux marges mais orgueilleusement indépendante de la pléiade. La ville a vécu à l’unisson de l’effervescence créative et
révolutionnaire de l’humanisme européen et de la Renaissance italienne. Les œuvres d’art ou de haut artisanat – tableaux, manuscrits
enluminés, mobiliers, émaux, majolique et autres – rassemblés pour l’exposition (commissaire Ludmilla Virassamynaïken, assistée par
Federica Carta) témoignent de cette émergence à la lumière de la vie lyonnaise. Avec un appréciable soin didactique et
scénographique, sept sections introduites par des vers de poètes de l’époque, développent un véritable parcours initiatique et de
découverte, mettant en valeur l’humanisme lyonnais, ses personnages, les influences italiennes et nordiques, le rôle de l’imprimerie et la
diffusion des ses modèles en Europe. Et ici on voit bien que même pendant la période plus noire du déchirement religieux entre
catholiques et réformés, le témoignage créatif n’a cessé de se manifester (voir le beau tableau, anonyme, Le sac de Lyon par les
reformés, ou le Reliquaire argenté). L’Humanisme à Lyon prend son départ par la découverte de la célèbre Table Claudienne (reprise au
burin du Musée Gallo- romain). On admire des œuvres d’une finesse artisanale remarquable comme par exemple l’Horloge
astronomique de Jean Nazes. Dans la section Figures de Lyon, on peut admirer des portraits de personnages de la cour (Jean Perréal)
mais surtout une série de petits portraits de Lyonnais de Corneille de Lyon, d’une profondeur psychologique sobre et vibrante, dont
l’Homme au béret noir de récente acquisition. Parler des précieux livres et manuscrits relèverait d’un tour de force. Mieux vaut signaler
les gravures de Pierre Eskrich ou les majoliques attribuées à Gironimo Tomasi, les illustrations de Bernard Salomon ou de l’architecte
Philibert de l’Orme, diffuseur d’influences italiennes. On est cependant toujours débiteurs de centaines d’œuvres et d’artistes et seul le
très riche catalogue peut combler nos oublis. Reste le charme, mieux le souffle de poésie qui accompagne le visiteur de salle en salle.
Lyon Renaissance, Arts et Humanisme, Musée des Beaux-arts de Lyon, jusqu’au 25 janvier 2016
Andrea Genovese
(Extrait de Belvedere, n° 39, octobre 2015, a.genovese@wanadoo.fr)